Casse-tête chinois pour la Silicon Valley

De grandes entreprises mondiales comme Apple, Google ou l'éditeur de jeux vidéo Blizzard Entertainment, essuient de vives critiques de la part du public et de certaines personnalités pour les mesures de censure - voire les sanctions - qu'elles ont prises afin d'éviter de se mettre à dos le pouvoir chinois aux prises avec la contestation à Hong Kong.
Blizzard a répété que Ng Wai Chung avait enfreint le règlement imposé aux utilisateurs en amenant la conversation sur un terrain extérieur au jeu vidéo... tout en réduisant sa période d'exclusion à six mois.
Blizzard a répété que Ng Wai Chung avait enfreint le règlement imposé aux utilisateurs en amenant la conversation sur un terrain extérieur au jeu vidéo... tout en réduisant sa période d'exclusion à six mois. (Crédits : Blizzard)

Voici plusieurs mois que les manifestations de Hong Kong défient le gouvernement chinois. Mais depuis peu, elles donnent également des sueurs froides aux dirigeants de plusieurs grandes entreprises technologiques américaines, à commencer par l'éditeur de jeu vidéo Blizzard Entertainment. Après que Ng Wai Chung, un célèbre joueur vivant à Hong Kong, a exprimé son soutien aux manifestations lors d'une partie de Hearthstone (un jeu de cartes stratégique très populaire) diffusée en direct sur la Toile, l'entreprise l'a banni de toute compétition pour une durée d'un an.

Blizzard lui reproche d'avoir enfreint une règle interdisant aux joueurs d'effectuer des déclarations susceptibles d'offenser un groupe de personnes ou de nuire à l'image de l'entreprise.

Apple, de son côté, a retiré de l'Apple Store une application collaborative baptisée HKmap.live, utilisée par les manifestants pour localiser et éviter les policiers.

Lire aussi : Manifestations à Hong Kong : la Chine accuse Apple de "complicité" avec les "émeutiers"

Google a également fait le ménage au sein du Google Play Store, supprimant une application de jeu de rôle baptisée The Revolution of Our Times, qui permettait aux participants de se mettre dans la peau d'un manifestant hongkongais.

Tollé sur la Toile

Ces décisions n'ont pas manqué de susciter de vives critiques de la part du public et de certaines personnalités, qui y voient une censure exercée à la demande de Pékin. Des employés de Blizzard se sont ainsi mis en grève pour protester contre l'exclusion de Ng Wai Chung.

« Qui dirige Apple ? Tim Cook ou Pékin ? », a de son côté tweeté Josh Hawley, sénateur républicain du Missouri. Charles Mok, législateur hongkongais spécialisé dans l'industrie des nouvelles technologies, a, quant à lui, accusé Apple de renier son engagement au service de la liberté d'expression et des droits de l'homme pour se faire complice de la censure chinoise.

Face au tollé déclenché, les entreprises ont l'une après l'autre répliqué que leurs décisions n'avaient rien de politique.

Blizzard a répété que Ng Wai Chung avait enfreint le règlement imposé aux utilisateurs en amenant la conversation sur un terrain extérieur au jeu vidéo, tout en réduisant sa période d'exclusion à six mois.

Apple, de son côté, a affirmé que l'application HKmap.live était utilisée par les manifestants pour attaquer les policiers, mettant des vies en danger et enfreignant les règles de la communauté. Google a reproché à The Revolution of Our Times de faire de l'argent à partir d'un événement dramatique.

Malgré ces tentatives de noyer le poisson, le malaise persiste. Toutes ces entreprises ont naturellement des intérêts financiers en Chine qui expliquent leurs réticences à se mettre Pékin à dos. C'est particulièrement vrai pour Apple, qui est parvenu à mieux pénétrer un marché chinois réputé très difficile pour les Occidentaux que ses concurrents. L'entreprise à la pomme a réalisé pour 52 milliards de dollars de ventes dans l'Empire du Milieu l'an passé, soit 20 % de son chiffre d'affaires.

Alors que Donald Trump mène depuis plusieurs mois une guerre commerciale contre la Chine, le succès d'Apple rend l'entreprise vulnérable. Et si les autorités chinoises décidaient de la prendre pour cible en guise de représailles suite à l'affaire Huawei ? La situation d'Apple est d'autant plus difficile que son directeur général, Tim Cook, contempteur affiché de Donald Trump, insiste fréquemment sur la responsabilité qu'ont les entreprises de s'engager en faveur de la démocratie et de la défense des libertés individuelles. Le dirigeant d'Apple se voit désormais contraint de choisir entre ses idéaux et son porte-monnaie.

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Commentaires 2
à écrit le 20/11/2019 à 10:18
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Nous aurons donc bien compris (s'il en était encore nécessaire) que les GAFAM joueront toujours le business contre les libertés, les pouvoirs forts contre la démocratie, les intérêts de leurs actionnaires contre ceux des masses laborieuses, l'esclava...

à écrit le 20/11/2019 à 8:37
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IL faut quand même que nous vivions à une époque de puissance politique désastreuse, d'hypocrisie généralisée, de politiciens compromis avec le pognon, pour attendre de nos entreprises qu'elles punissent les pouvoirs défaillants ! Nous votons pou...

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