Favoriser l'accélération de l'investissement à long terme vers l'économie réelle grâce à l'épargne retraite

TRIBUNE. Comment faire entrer la France du 21e siècle dans le temps long? La loi Pacte a profondément rénové les dispositifs d'épargne retraite par la réforme du PER. L'enjeu est maintenant de réussir son lancement, de renforcer la compétitivité de notre économie en améliorant, pour les Français, la performance et l'orientation de notre épargne longue. Par Grégoire Sentilhes (Citizen Entrepreneurs), Thibaut Béchetoille (Croissance Plus), Frédéric Coirier (METI), Geoffroy Roux de Bézieux (MEDEF), Dominique Gaillard (France Invest).
(Crédits : DR)

« La force la plus puissante dans l'univers est celle des intérêts composés, qui sont la huitième merveille du monde. Celui qui les comprend, les gagne... Et celui qui ne les comprend pas, les paie. » Albert Einstein

Dans un contexte où les transformations structurelles engagées (droit du Travail, formation...) commencent à porter leurs fruits, la loi PACTE et le PER sont une opportunité unique de réhabiliter la « France du temps long ». L'épargne retraite constitue une formidable opportunité économique, à court et moyen terme, comme source d'investissement dans notre économie, au moment où celle-ci doit investir massivement dans sa transformation digitale, environnementale, santé intelligente, mais aussi créer de la valeur pour les épargnants, créer des emplois, et aussi reconstruire la confiance des Français dans l'avenir.

Véritable co-construction

La loi PACTE de 2019 a donné lieu à une véritable co-construction entre acteurs publics et acteurs privés, gestionnaires d'actifs comme assureurs et banques. Son accueil positif par le marché témoigne de l'intérêt qu'elle suscite. Elle constitue une première étape clé pour une épargne plus agile, permettant de construire une retraite par capitalisation, en complément de la retraite par répartition, qui est l'une des réformes clés du quinquennat. Développer la culture de l'investissement de long terme, après 40 ans de devoir de conseil « axé sur la gestion du risque », est une tâche pédagogique d'une ampleur sans précédent. L'enjeu se situe entre 50 et 100 milliards d'euros qui pourraient dans les cinq ans être orientés vers l'investissement dans l'économie réelle (cotée et non cotée), avec un impact majeur sur la compétitivité de notre appareil productif. C'est comme cela que nous pourrons faire de nos entreprises des championnes, alors qu'elles ont trop souvent été contraintes par le passé de se vendre ou de poursuivre leur développement en Bourse, aux Etats-Unis.

La France du temps long est celle du Général de Gaulle à Georges Pompidou, qui a su investir sur des paris industriels pour l'avenir, et générer des taux de croissance du PIB de 5% par an et le plein emploi, jusqu'en 1974. La paralysie progressive du processus de destruction créatrice en France et « l'étrange défaite économique » depuis 1975 du tryptique (entrepreneur, innovation, investissement à long terme) ont annihilé imperceptiblement notre capacité à innover et celle de faire émerger des champions mondiaux capables de remplacer les précédents, conduisant à une érosion de notre souveraineté économique et une attrition progressive de la performance de l'épargne des Français, principalement placée en obligations.

Faire émerger les champions français du 21e siècle

La France du temps long doit se montrer aujourd'hui capable de prendre des risques intelligents pour investir à long terme, en capitaux propres, dans les meilleures startups, PME et ETI, pour faire émerger dans tous les territoires les champions français du 21e siècle, et aussi plus investir dans nos grandes entreprises, dont le capital est insuffisamment détenu par des actionnaires français. Face à la troisième révolution industrielle en cours, elle doit redessiner sa capacité compétitive, sa capacité de création d'emplois comme sa souveraineté économique et technologique, tant dans le domaine digital, que dans la cybersécurité, la santé intelligente et le greentech. Elle doit aussi générer de la performance financière dans le temps, et donc du pouvoir d'achat pour les épargnants en particulier dans la perspective de leur retraite, et montrer que l'investissement en actions, cotées et non cotées, est la vraie réponse face à la situation des taux négatifs, qui remet en cause profondément le modèle économique de l'industrie financière.

La France du temps long est celle qui permet de reconstruire la confiance en l'avenir, en accompagnant la mutation de nos sociétés et en faisant grandir les champions industriels innovants irriguant économiquement, socialement et culturellement nos territoires. C'est aussi celle qui apporte une réponse à l'anxiété exprimée par les Français, tant par rapport au chômage, pour qu'il continue sa décroissance, que par rapport à la peur du déclassement et des déserts économiques tant exprimée lors du Grand débat.

Des obligations qui rapportent de moins en moins

Les Français investissent massivement leur épargne dans une dette qui finance des obligations leur rapportant de moins en moins chaque année (1,6% en moyenne pour les contrats assurance-vie en euros en 2018 en France), quand les étrangers investissent en actions dans nos entreprises. Les foyers américains ont aujourd'hui 66% de leur retraite investie en actions cotées et non cotées. La France s'est « piégée « avec l'adoption de Solvency II, depuis 2010 alors qu'elle ne disposait pas de fonds de pension.

La France du temps long, c'est celle qui dit adieu à l'« aversion au risque » qui prend en otage l'économie française et ses épargnants depuis trop longtemps, et permet la rencontre de la culture entrepreneuriale qui connait une vraie renaissance depuis 10 ans et celle de la culture de l'investissement à long terme privé qui nous fait encore défaut, et qu'il nous faut engager pour poursuivre la bascule « positive», et prévenir au mieux les effets d'une éventuelle récession économique. C'est l'opportunité qu'offre la loi PACTE et le PER dont les Français, comme les entrepreneurs et les entreprises, doivent massivement s'emparer.

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Commentaires 5
à écrit le 07/11/2019 à 23:15
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je me pose une question. Pourquoi faire? Il me semble qu'aucune forme de pensée, car la transformation ne sera pas simpement technique, mais aussi philosophique d'une telle nature que le non discours des autorités, de perspectives, de prospectives, q...

à écrit le 07/11/2019 à 18:06
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A titre de réflexion.. Le Monde diplomatique – Fév. 2018 Un favoritisme fiscal que rien ne justifie. Le fléau de l’assistanat - Extraits : " ...Dans un environnement prédateur qui ne se soucie guère de l’investissement, mais plutôt de la valeur...

à écrit le 07/11/2019 à 11:23
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miam l'assurance vie et ses 1400 milliards, ca en fait saliver plus d'un le francais met de l'argent de cote pour sa retraite, pas pour financer les entreprises d'avenir de segolene royal, genre heuliez ' futur leader mondial de la voiture electri...

à écrit le 07/11/2019 à 10:54
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30 ans de retard en raison d'une idéologie marxiste véhiculée par de nombreux gouvernements qui ont toujours refusé le développement de fonds de pension français . Notre système de retraites par répartition n'est plus viable, il va falloir ajouter ...

à écrit le 07/11/2019 à 10:20
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Avec le retard dramatique que nous avons pris du fait de l'avidité maladie de nos mégas riches européens qui ne veulent pas investir en europe si ce n'est dans des secteurs en déclin, sans retour de puissance politique imposant un protectionnisme int...

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