L'Europe est malade et elle a besoin du moteur franco-allemand

POUR UN NOUVEAU SERMENT DE STRASBOURG (3/4). A quelques mois des élections européennes (le scrutin aura lieu le 29 mai 2019), nous publions en quatre volets une conférence de Cyrille Schott donnée en octobre dernier. Son regard lucide et chaleureux sur son expérience de "bâtisseur de l'Europe au quotidien" en tant que préfet d'Alsace est un stimulant rappel des grands enjeux de la construction européenne, alors que maints grincements se font entendre dans la charpente de cette construction attaquée aujourd'hui de toutes parts. Par Cyrille Schott, préfet honoraire de région, ancien directeur de l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ).
Cyrille Schott
Cyrille Schott, préfet honoraire de région, ancien directeur de l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ).
Cyrille Schott, préfet honoraire de région, ancien directeur de l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ). (Crédits : DR)

Retournons d'abord vers l'Europe et notre président. Celui-ci ne relâche pas ses efforts. Dans son discours de Strasbourg devant le Parlement européen, dans celui d'Aix-la-Chapelle, en mai, où lui a été remis le prix Charlemagne, dans ses visites aux différents pays de l'union, il plaide pour la souveraineté et l'unité européenne, pour le refus du repli sur soi, pour la nécessaire relance. Et il dénonce les nationalismes menaçants pour l'Europe, ce qu'il a encore fait en ce 11 novembre, centième anniversaire la fin de cette terrible guerre civile européenne que fut le premier conflit mondial. Cependant, son projet de relance paraît affaibli et des voix soulignent ce qu'ils appellent son isolement en Europe.

L'Europe est malade, menacée de décomposition

Et il ne faut pas se le cacher : l'Europe est malade. Certains observateurs anglo-saxons vont jusqu'à considérer que le Brexit a été l'indice de sa décomposition, celle-ci allant être l'issue de la crise migratoire. Le Brexit représente effectivement une épreuve considérable pour l'Union. Jusqu'alors, l'Europe s'est toujours élargie, cet élargissement, parfois critiqué, signifiant en tout cas un désir de rejoindre l'Union, un désir d'Europe, une attractivité de celle-ci, par-delà ses crises. Pour la première fois, un pays, l'un des plus importants, a décidé de partir. Il s'agit d'un retournement historique, même si d'autres candidats attendent encore aux portes.

La crise migratoire recèle également une dimension existentielle. En Europe centrale, dans ces pays appelés « de l'Est » du temps du rideau de fer, les peuples se replient sur eux, craignant pour leur identité, refusant d'accueillir une population étrangère, fut-elle réfugiée, échappée de cruels conflits. Ces peuples, sous le manteau de l'Empire soviétique, sont restés en famille, entre eux. Si l'on ne pouvait guère sortir de leurs frontières, on ne pouvait pas plus y entrer, sinon quelques infimes minorités, comme ces étudiants du monde venant se former aux théories de l'internationalisme prolétarien. La chute du mur a représenté une ouverture pour ces peuples, dont une fraction a rejoint l'ancienne Europe de l'Ouest, mais cette ouverture signifia aussi que l'on pouvait entrer chez eux. Le risque de migrations venant de l'Europe de l'Ouest restant insignifiant, celui de migrations issues d'autres continents, d'Afrique, d'Asie moyen orientale, est devenu plus significatif, surtout depuis les crises au Moyen Orient et en Lybie. Là s'est produit une fermeture des esprits, dont les gouvernement dits illibéraux, qui ont succédé aux démocrates des premiers temps de la fin du communisme, sont l'expression. L'illibéralisme installe un système qui remet en cause la séparation des pouvoirs et s'appuie sur un homme fort, se définissant comme la parole et la volonté d'un peuple nourri par la crainte obsidionale, la peur de l'autre. Il interpelle le modèle démocratique, fondement des nations de l'Union.

La crise des migrants a fissuré l'Europe

En Europe de l'Ouest et spécialement en Allemagne, les flux massifs de l'année 2015 ont provoqué chez des franges de la population des rejets, renforcés par la montée du terrorisme islamiste et des incidents comme les agressions sexuelles de la nuit de la Saint Sylvestre à Cologne en 2016 ou, plus récemment, les faits divers de Kandel et de Chemnitz. Des voix populistes ont exalté la crainte de ces fractions du peuple. Désormais, les partis populistes semblent avoir le vent en poupe sur l'ensemble du continent, y compris en Scandinavie. Leurs idées représentent bien une menace existentielle pour cette Union qu'ils rejettent. Outre le combat des idées, qui marquera les élections européennes de 2019, une fissure semble bien s'être fait jour entre l'Est et la majeure partie de l'Ouest de l'Europe, spécialement entre les pays du groupe de Visegrad, Pologne, Hongrie, Tchéquie, Slovaquie, qui ont été libérés de l'empire communiste, et les pays qui ont vécu dans la mouvance atlantique.

Le refus d'aider la Grèce, une erreur économique et politique

Cette division s'ajoute à celle entre un Nord prospère, aux finances équilibrées, et un Sud qui a connu des turbulences. Le refus d'aider immédiatement la Grèce a été une erreur financière et économique, car elle a montré aux marchés financiers que la zone euro était faible et les a, d'une certaine manière, encouragés à attaquer l'un après l'autre les pays jugés fragiles, comme l'Irlande, l'Espagne, le Portugal, Chypre, précipitant la zone Euro dans une crise économique et monétaire, qui eût pu être évitée. Certes, des réformes étaient indispensables en Grèce, mais la première priorité, au moment où celle-ci fut attaquée, était de montrer au monde que la zone euro était puissante et interdisait que l'on s'en prisse à l'un de ses membres. La faute était, tout autant, voire plus, morale. A l'époque, on parlait en Europe du Nord des pays du « club Med » ou des PIGS (en anglais, Portugal, Irland, Greece, Spain), c'est-à-dire des « cochons » pour qualifier ces nations jugées insuffisamment disciplinées. Où était l'esprit européen, dans ce mépris affiché pour des membres de l'Union ? Nulle part. Une fracture psychologique a été créée. Un manque de confiance dans l'Europe s'est développé. Il a été amplifié chez les nos voisins transalpins par le sentiment de se retrouver seuls face à la déferlante migratoire. Et l'attitude de l'actuel gouvernement italien risque de relancer une crise de l'Euro.

L'historique et périlleux retournement des Etats-Unis contre l'Europe

Ajoutons à ce diagnostic de la maladie européenne un élément supplémentaire, relatif à notre rapport aux Etats-Unis. A l'issue de la dernière guerre, le chemin vers l'unité européenne se construit sous la protection de ceux-ci face à la menace soviétique, contenue derrière le rideau de fer. Historiquement et culturellement, par-delà nos différences, les Etats-Unis d'Amérique sont enfants de l'Europe et l'alliance atlantique unit, somme toute, les membres d'une même famille.

Or, ce qui se passe aujourd'hui, c'est que ce membre si éminent de la famille que sont les Etats-Unis se retourne contre l'Union européenne, souhaitant sa division, pour se retrouver dans des relations bilatérales avec ses différents pays, dans la position du puissant face au faible.

Ce retournement historique de l'Amérique est plus périlleux pour l'Union que la réserve ou l'hostilité de puissances comme la Russie, car celle-ci constitue un moteur pour renforcer l'unité, par-delà quelques comportements marginaux. L'attitude de l'Amérique s'exprime dans le cercle familial, avec la puissance conférée par la demande de protection militaire qui lui est adressée, spécialement dans le centre et l'Est de l'Europe, et la force de certains liens commerciaux, de sorte qu'elle fait peser un réel danger de division, voire de cassure, sur l'Union.

La construction européenne, délicate rencontre du pragmatisme et de l'idéal

Alors, docteur, ce diagnostic signifie-t-il que ce malade, cette Europe, est condamné ? Non, je ne le crois pas et, surtout, ne l'espère pas.

D'abord, souvenons-nous que l'Europe a toujours cheminé de crise en crise. On l'a oublié, mais de juin 1965 à janvier 1966, la France du général de Gaulle a pratiqué la politique de la chaise vide, refusant de participer aux réunions du conseil des ministres de la Communauté économique européenne et bloquant ainsi toute décision, cela jusqu'au compromis de Luxembourg. Songeons aussi aux incartades de Mme Thatcher, qui ont exigé un art certain du compromis.

En vérité, la construction européenne s'effectue dans la dynamique, mais délicate rencontre du pragmatisme et de l'idéal, dans la composition à trouver sans cesse entre les intérêts des Nations constitutives et l'idée d'une véritable union, pacifique et prospère. Robert Schumann l'a écrit dans son livre « Pour l'Europe » :

« Le véritable esprit européen est la prise de conscience des réalités, des possibilités et des devoirs, en présence desquels nous nous trouvons placés les uns et les autres par-dessus les frontières, au-delà de nos antagonismes et nos ressentiments. »

Le compromis est, au total, la marque de fabrique de l'Europe. La résolution de la crise nécessite généralement ce compromis. En définitive, elle fait avancer l'Europe.

A l'épreuve du Brexit, les Britanniques découvrent la force que représente l'Union

Il est vrai que la crise oblige aussi l'Europe, car elle doit être surmontée, sauf à remettre en cause sa construction même, et la réponse de l'Union doit à la fois porter le sceau de l'efficacité et celui du respect de ses valeurs. Les crises actuelles, caractérisées par leur multiplicité -l'on parle à Bruxelles de polycrises-, exigent des réponses s'inscrivant dans cette double exigence. Elles ne paraissent pas impossibles, malgré l'ampleur des défis.

Face au Brexit, les Européens ont su trouver jusqu'à ce jour l'unité et la clarté nécessaire dans leur position, les Britanniques découvrant, à travers la difficulté à la quitter, la force que représente l'Union. Celle-ci peut poursuivre son cheminement historique même s'ils partent, car le Royaume Uni s'est toujours situé sur la marge de l'Europe, contrairement à la France et à l'Allemagne.

Certes, la question n'est pas close, ni pour l'Europe ni surtout, au demeurant, pour le Royaume Uni. S'agissant de la crise migratoire, les diverses initiatives prises par l'Union ou les pays membres, parfois dans le désordre et de façon contestable, ont, en tout cas, eu pour effet de faire diminuer de façon drastique les flux migratoires dans la Méditerranée. Par-delà les positions, ostentatoires et difficilement admissibles au regard de l'esprit communautaire, prises par certains pays, un travail de fond est effectué par la Commission et les instances communautaires.

La maîtrise des flux migratoires fait obligatoirement partie de la réponse

Surmonter la crise signifiera, à la fois, réguler et maîtriser les flux migratoires, sauf à ignorer dangereusement un sentiment populaire réel, et respecter les valeurs fondatrices de l'Europe, dont l'accueil à accorder au réfugié. Si les mouvements populistes et de rejet de l'étranger ont gagné en puissance et visibilité, ils ne sont pas seuls représentatifs des peuples. Loin de là. En Allemagne, le parti xénophobe AfD est de plus en plus visible, mais a, en définitive, recueilli au scrutin de septembre 2017 un peu moins de 13% des suffrages et dans les récents scrutins en Bavière et en Hasse 10% et 13%.

Les mouvements hostiles aux dérives xénophobes n'ont pas manqué de se manifester à leur tour et de montrer leur ancrage dans le peuple allemand. Dans les toutes dernières élections, en Bavière, en Hesse, au Luxembourg, en Belgique, un parti europhile, celui de Verts, a connu une progression remarquée. Même en Europe centrale, les opinions sont loin d'être unies derrière la ligne xénophobe. En Pologne, contrairement aux campagnes, les villes ont voté massivement contre le parti au pouvoir lors des dernières élections locales.

Quant à l'Euro, s'il est vrai que les choses avancent lentement par rapport au projet du président Macron, l'Allemagne s'est rapprochée de la France et nos deux pays sont susceptibles de faire bouger à nouveau les lignes.

L'étonnant bond en avant de l'Europe de la défense

Observons que l'Europe de la défense a connu, en peu de temps, en 2017 et 2018, des avancées étonnantes, avec notamment la mise en place de la coopération structurée permanente, réunissant 25 des Etats membres, la création du Fonds européen de défense, l'émergence de l'Initiative européenne d'Intervention, portée par la France. Le 25 juin 2018, neuf Etats membres de l'Union ont signé une lettre d'intention en vue de sa constitution (la Finlande les a rejoint depuis).

La présence de deux pays, le Royaume-Uni et le Danemark, qui ne participent pas à la politique de sécurité et de défense communes et dont le premier veut quitter l'Union, a frappé les observateurs. Il est vrai que cette initiative, qui veut réunir les Etats européens volontaires et capables d'intervenir militairement, ne s'inscrit pas juridiquement dans le cadre de l'Union, tout en voulant établir des liens étroits avec la coopération structurée permanente.

Si certains observateurs ont vu dans cet engagement britannique une manœuvre de la « perfide Albion » pour diviser les membres de l'Union, beaucoup y ont reconnu la preuve de l'importance que le Royaume Uni attache à un lien étroit de sécurité avec l'Union, avec laquelle il souhaite conclure un traité sur la sécurité. Emmanuel Macron a appelé de ses vœux, peu avant le 11 novembre, la naissance d'une « armée européenne », pour laquelle Angela Merkel a, de son côté, plaidé le 13 novembre devant le Parlement européen à Strasbourg. Certes, nous ne sommes pas à la veille de la création d'une véritable armée européenne, mais de vrais pas en direction d'une défense européenne sont en train de s'accomplir.

Travailleurs détachés, taxation des GAFA... l'UE est en chemin

Enfin, n'oublions pas des avancées comme la révision de la directive sur les travailleurs détachés, la création prochaine d'universités européennes, l'adoption par le Parlement européen du « droit voisin », tant attendu par nos journaux, voire des perspectives comme celle d'une taxation des GAFA, des multinationales du numérique, qui ne paraît plus hors de portée.

Quant au couple franco-allemand, si certains pays rechignent à reconnaître son caractère central, personne, en réalité, ne propose une solution autre pour la poursuite du cheminement européen.

En finir avec ces "alliances" qui ne sont que des coalitions de refus

Les « alliances » forgées de façon circonstancielle, dans les temps récents, n'ont été que des coalitions de refus. Refus par des pays d'Europe du Nord de l'approfondissement de la zone Euro ; dans une prise de position autour des Pays-Bas, huit d'entre eux mettent en garde en mars dernier le couple franco-allemand contre toute initiative visant à s'éloigner du pacte de stabilité. Refus par les pays d'Europe centrale, ralliés par l'Italie et un peu par l'Autriche, d'une politique migratoire, alliant la nécessité de maîtriser les flux et le respect des principes moraux fondateurs de l'Union. En vérité, ce sont des rencontres d'égoïsmes nationaux, sur lesquels rien ne peut être bâti. Prenons la question migratoire.

Le ministre de l'Intérieur italien, le premier ministre hongrois, le gouvernement autrichien, enfin le ministre de l'Intérieur CSU allemand vont, dans le discours, se saluer réciproquement pour leur politique, le refus de nouveaux migrants. Il s'agit d'une pétition de principe. Voyons maintenant les faits. Le ministre de l'Intérieur allemand veut ouvrir des centres fermés en Allemagne, d'où la majorité des migrants sera automatiquement refoulée.

Hurlements des Autrichiens, pour lesquels il est hors de question d'accepter ces refoulements. Les Autrichiens eux-mêmes ne veulent plus des migrants venant d'Italie. Indignation du ministre de l'Intérieur italien. Celui-ci veut que les migrants descendant de bateaux abordant des ports italiens soient aussitôt répartis entre les divers pays européens. Hors de question en ce qui concerne mon pays, réagit le premier ministre hongrois, de même d'ailleurs que les gouvernement polonais, tchèque ou slovaque. L'Europe des Nations que nous proposent les souverainistes n'est que l'Europe des égoïsmes nationaux, ceux-ci se saluant dans le principe et se livrant bataille dans la pratique.

La France et l'Allemagne sont conscientes de leur responsabilité

Par-delà les critiques et l'agacement que suscite parfois Emmanuel Macron, l'intérêt, voire la séduction, que provoquent sa conviction, sa jeunesse, sa volonté réformatrice, son projet de nouvel élan pour l'Europe n'ont pas disparu en Allemagne. Pour le premier anniversaire de son élection, des chaines de télévision allemandes ont consacré des émissions spéciales à son action. Des voix, chez les Verts, les sociaux-démocrates, les chrétiens-démocrates, et même chez les Libéraux de la FDP, incitent les Allemands à bouger. Le franco-allemand, Daniel Cohn Bendit, a stigmatisé, il y a quelques mois, lors d'un débat télévisé sur une chaine allemande, « une paresse intellectuelle en Allemagne à se confronter avec les propositions de Macron pour l'Europe. »1 Le vice-président du groupe FDP au Bundestag, chargé de la politique extérieure, Alexander Graf Lambsdorff, le neveu de l'ancien ministre fédéral, a pris une position claire à l'occasion du centenaire de la fin de la première guerre mondiale : « ... L'Allemagne doit enfin saisir la main tendue par le président français pour une réforme de l'Europe et s'emparer des projets d'Emmanuel Macron.2 »

Défense, zone euro, union bancaire... il faut renforcer l'Europe

En tout cas, même si les avancées ont pris un certain temps, à l'issue de leur sommet tenu le 19 juin 2018 au château de Meseberg près de Berlin, Macron et Merkel ont signé une déclaration, qui témoigne d'une ambition commune face à ce qu'ils appellent les « défis existentiels » auxquels est confrontée l'Europe.

Sans nous arrêter à tous les sujets abordés, notons : que des mesures pour renforcer la défense européenne y sont développées (la ministre française des Armées Florence Parly et son homologue allemande Ursula von der Leyen ont signé́ à Meseberg une lettre d'intention communes sur le char de combat du futur et une autre sur le système de combat aérien du futur) ; que les différents chapitres pour le renforcement de la zone Euro, mécanisme européen de stabilité, union bancaire, budget de la zone Euro, y sont traités de façon concrète et concordante; que sur la fiscalité, les deux pays se prononcent pour une assiette commune de l'impôt sur les sociétés et une taxation équitable du numérique ; qu'en matière de recherche et d'enseignement supérieur, ils veulent agir pour la création rapide d'universités européennes, comme celle qui doit se créer le long du Rhin.

Ils n'omettent pas le sensible chapitre migratoire, où ils ont déjà réussi à regrouper certains pays européens pour un accueil commun de migrants. Ce sommet de Meseberg n'a guère fait l'objet de grands commentaires dans les médias ou a parfois été présenté comme de peu d'intérêt.

Pourtant, malgré un certain affaiblissement réciproque en politique intérieure, les deux dirigeants ont confirmé une volonté commune, celle de continuer à être moteur dans la construction européenne. Cette ambition a été réaffirmée à plusieurs reprises depuis, et notamment lors de la rencontre à Marseille le 7 septembre entre Macron et Merkel.

La force des symboles

Elle a été déclinée à divers échelons ministériels et reprise par les assemblées parlementaires : dès son élection, le président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand, a rencontré à Lubeck le 20 septembre dernier, son homologue allemand, Wolfgang Schäuble, et ils se sont prononcés pour la création d'une assemblée parlementaire commune réunissant cinquante députés de chaque pays, cette création devant figurer dans l'accord entre les deux assemblées prévu le 22 janvier 2019, pour le 56e anniversaire du traité de l'Elysée.

En résumé, derrière le bruit médiatique du Brexit et de la question migratoire, l'Europe continue de travailler, tandis que la France et l'Allemagne demeurent, même si elles éprouvent de la peine à avancer dans un certain nombre de domaines, conscientes de leur responsabilité, Celle-ci est certes immense, s'agissant de la réponse à apporter à tant de défis existentiels pour l'Europe. Et leur couple doit être capable de s'ouvrir à des partenaires susceptibles de contribuer à cette réponse et décidés à faire progresser l'Union.

Beaucoup vont soutenir qu'œuvrer pratiquement à cette réponse suffit largement à occuper l'agenda européen et que le temps n'est pas, ou plus, aux initiatives symboliques, les Européens voulant du concret et rien que du concret. Et pourtant... lorsque l'on regarde l'histoire de la relation franco-allemande, l'on constate que les moments symboliques, que j'ai évoqués plus haut, comme la messe de Reims d'Adenauer et de Gaulle, la poignée de main de Kohl et Mitterrand à Verdun ou le 11 novembre dernier à Rethondes ont été des moments essentiels de cette histoire. Tous nos romans nationaux sont d'ailleurs nourris par ces moments symboliques. Le symbole, en effet, compte dans l'Histoire. Comme l'a dit Emmanuel Macron dans son discours de la Sorbonne :

« L'Europe aussi est une idée... L'Europe ne vivra que par l'idée... »

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NOTES

1 « ...eine intellektuelle Faulheit in Deutschland sich mit Macron's Vorschläge für Europa zu konfrontieren...", Weltspiegel, „Ein Jahr Macron - Monsieur Macron", 24 HD, 14ten. Mai 2018.

2 « ...Deutschland muss jetzt endlich die ausgestreckte Hand des französischen Präsidenten für eine Reform Europas ergreifen und die Vorschläge Emmanuel Macrons aufgreifen.", DPA, cahier en allemand des DNA du dimanche 11 novembre 2018.

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(*) Ce texte est issu d'une conférence prononcée le 18 octobre 2018 au FEC (Foyer de l'étudiant catholique) à Strasbourg.

Cyrille Schott

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Commentaires 9
à écrit le 05/12/2018 à 20:56
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Encore ce vieux leitmotiv du moteur franco - allemand ! qui n'a jamais existé car cela n'était que de la coopération politique momentanée. En 2019 il faut changer de chanson ne croyez vous pas? les changements qu'il faut absolument faire doivent...

à écrit le 05/12/2018 à 20:32
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Mr Schott pour faire l Europe il faut des hommes politiques capables de rassembler .et pas des marionnettes comme Mr Macron toujours a la botte de Me MERKEL l Europe est composée de plusieurs grandes nations et ces autres nations ont leurs mots a di...

à écrit le 05/12/2018 à 20:19
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Le problème de l’Europe c’est l’idée en 3D. L’idée devrait être une «  image » claire nette, des couleurs tellement réelles que nous nous noyons dedans , une telle authenticité que nos cœurs battent en chamade, l’union est la force. En fait la réal...

à écrit le 05/12/2018 à 17:06
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Les trois strates dépensières qui ont conduit la France au chaos : les métropoles (transfert des compétences et des revenus vers la commune mère, concentration de la misère, de la pollution et de la délinquance, entre autres, sacrifice de la France p...

à écrit le 05/12/2018 à 16:56
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C'est justement la recherche de cet hypothétique couple franco allemand qui rend malade les européens et désorganise cet administration hors sol qu'est l'UE de Bruxelles et la viabilité de l'euro!

à écrit le 05/12/2018 à 15:47
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Justement Europe est malade des arrogances franco-allemande, des stupidites ideologiques de ses deux pays gravement malades sont insupprtables. En plus ils essayent d`exporter ses maladies mortelles aux autres

à écrit le 05/12/2018 à 14:10
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L'Europe n'est pas malade, elle est mourante. Les gilets jaunes sont en train de l'achever comme l'accord sur le climat, l'écologie, ils n'en n'ont rien à faire, seul le pouvoir d'achat... (pour polluer un peu plus...) intéresse en ces temps. L'éco...

à écrit le 05/12/2018 à 13:36
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Que de camouflage. Ce que la France veut reellement c'est de mutualiser sa dette vers les pays nordics mieux administrees.

à écrit le 05/12/2018 à 8:38
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"Par Cyrille Schott, préfet honoraire de région, ancien directeur de l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ). " Hé oui les préfets s'ennuient alors ils écrivent et prêchent la bonne parole. "Un rapport d...

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