Le maillot branché selon Marie Spinali

Avec ses bikinis connectés, elle est depuis deux ans la créatrice en vogue, née d'une alliance entre l'industrie textile et l'économie numérique. La société qu'elle a développée à Mulhouse fait l'objet de toutes les attentions des médias, jusqu'aux États-Unis. Reste à transformer le « buzz » en projet économique. Objectif : 100 salariés dans un atelier 100% connecté.
"L'informatique et le numérique m'ont attirée, j'en ai fait mon premier métier mais la passion pour le textile a été plus forte", explique Marie Spinali.

Adolescente, Marie Spinali a vu s'éteindre les dernières manufactures textiles de la vallée de Thann, dans le Haut-Rhin. Ses grands-parents lui racontaient la gloire passée de ces industries plus que centenaires dont il ne reste, autour de Mulhouse, que la trace effacée. « L'informatique et le numérique m'ont attirée, j'en ai fait mon premier métier mais la passion pour le textile a été plus forte. Je ne pouvais pas me contenter de créer des costumes de carnaval pour mes enfants ! Les maillots de bain connectés, c'est mon savoir-faire et ma passion », résume celle qui, à 40 ans, s'est retrouvée sous les feux des projecteurs dans tous les salons technologiques auxquels elle a participé depuis deux ans.

Le bikini qui vous prévient avant le coup de soleil

Avec une promesse : le bikini prévient son utilisatrice en cas de menace de coup de soleil. Un capteur d'UV émet un signal, via un smartphone connecté par Bluetooth, et suggère d'appliquer une nouvelle couche de crème solaire. Le dispositif n'a pas fait l'objet de validations médicales scientifiques, mais il a intéressé les médias.

« En janvier 2017, au CES [Consumer Electronics Show, Salon mondial de l'électronique grand public, Ndlr] de Las Vegas, nous avons loué un stand de 9 mètres carrés. Les Américains sont en avance sur les vêtements connectés. Nous sommes passés à la télévision, il y a eu un buzz incroyable. 'USA Today' a consacré une page à notre histoire », témoigne Marie Spinali.

Romain, son époux et associé, accompagne depuis deux ans la nouvelle aventure de l'entreprise familiale, spécialisée à l'origine dans l'édition de logiciels de gestion pour la promotion immobilière.

« Les logiciels nous ont rapporté assez d'argent pour investir dans les maillots de bain et nous autofinancer à hauteur de 400.000 euros, avec quatre partenaires amis locaux et une avance remboursable de BPI. Sans cette double activité, nous aurions dû lever 1 million d'euros et nous aurions sûrement perdu notre indépendance », explique-t-il.

La médiatisation du projet de Spinali Design, avec 1.800 articles de presse recensés dans le monde depuis 2015, masque des réalités économiques encore balbutiantes : en deux ans, la société n'a vendu que 1.000 maillots de bain. Le prix de vente initial (198 euros) a été revu à la baisse. Il se positionne désormais, en moyenne, à 119 euros. Le chiffre d'affaires prévisionnel s'établit à 420.000 euros en 2017.

Après les bikinis, la créatrice parie sur les jeans connectés : relié à une application de géolocalisation, le vêtement pourrait indiquer le chemin à suivre en émettant une vibration au niveau de la ceinture, à droite ou à gauche. D'autres applications, plus ludiques, restent à imaginer. Autre projet : la miniaturisation du capteur d'UV présent sur son produit phare, le bikini. La pastille d'un centimètre carré, livrée par un prestataire alsacien et cousue sur le maillot au niveau de la hanche, pourrait disparaître au profit d'un dispositif intégré dans la maille. Cette évolution technologique est en cours de développement avec un laboratoire du CEA à Grenoble.

L'important, c'est le "Made in France"

Le modèle économique reste, pour l'instant, artisanal et établi sur la vente au détail.

"Nos maillots sont réalisés à la main, dans notre atelier à Mulhouse. Chaque pièce est unique, sur mesure, et mon équipe s'organise pour effectuer l'expédition en 48 heures après la commande », détaille Marie Spinali.

Pour vendre ses jeans, dès cette année, elle mise sur des partenariats avec des marques de vêtements ou des enseignes établies. Mais il ne sera pas possible de lancer la production de plusieurs centaines d'unités dans l'atelier actuel, situé à l'étage de l'ancienne maison individuelle qui accueille également un showroom.

« Nous devons investir dans une découpeuse numérique, pour une centaine de milliers d'euros. Si les commandes affluent, nous serons obligés d'ouvrir le capital à des partenaires extérieurs, quitte à perdre cette fois notre indépendance », prévoit Romain Spinali.

L'ancrage mulhousien de l'entreprise, dans une région éloignée de la mer et pas réputée pour son ensoleillement, a évidemment suscité quelques railleries. « On a fait rigoler beaucoup de monde. Un visiteur institutionnel nous a même conseillé de supprimer notre référence à Mulhouse et de nous revendiquer parisiens », rapporte Marie Spinali. « Biarritz nous a offert un pont d'or pour nous convaincre de relocaliser. Mais nous restons mulhousiens et, l'important, c'est le made in France », estime la créatrice. Les mannequins qui présentent les collections dans le catalogue en ligne ont été recrutés localement. Deux jeunes femmes, d'abord modèles pour les photographies, ont ensuite été recrutées dans l'équipe administrative de Spinali Design, et profité de formations.

Appli connectée et connaissance de la clientèle

Investie sur les réseaux sociaux, l'équipe (12 salariés) pilote collectivement l'application pour smartphone aux fonctions enrichies : les utilisatrices peuvent aussi publier leurs photos en maillot de bain, communiquer entre elles et avec les créateurs mulhousiens des bikinis et passer commande sur une boutique en ligne. « C'est notre valeur ajoutée, parce que nous sommes issus du monde du logiciel », rappelle Marie Spinali. « Une entreprise textile ne saurait pas créer une telle appli, gérer une hotline. L'outil connecté nous offre une connaissance exceptionnelle de notre clientèle », estime-t-elle. Marie Spinali rêve d'un atelier de 100 salariés, piloté par des outils numériques et conçu dans l'esprit d'une usine du futur. Le projet a déjà trouvé ses financiers. En 2016, à Las Vegas, sur un salon de passionnés d'objets connectés, des investisseurs nord-américains lui auraient suggéré d'« arrêter de bricoler » en Alsace avec ses moyens artisanaux, offrant des moyens financiers d'une autre ambition. Promesse de développement ou grand coup de bluff ?

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REPERES / MINIBIO

  • 2018 En projet : levée de fonds, partenariats commerciaux
  • 2017 1.000 maillots de bain vendus
  • 2016 Ouverture du capital. L'entreprise est valorisée à 1 million d'euros
  • 2015 Lancement de la gamme de maillots de bain connectés
  • 2012 Licence de webdesigner à l'université de Haute-Alsace
  • 1996 DUT carrières juridiques à Colmar
  • 1994 Bac ES à Mulhouse
  • 1976 (le 28 juillet) Naissance à Mulhouse

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Commentaire 1
à écrit le 08/06/2017 à 11:50
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<BigBrotherPervers> Bof, si la puce ne prend pas la température corporelle de la femme pour informer l'entourage de ses phases d'ovulation et donc de sa très forte disponibilité sexuelle, ça ne présente pas d'intérêt. </BigBrotherPervers>. Que n'inve...

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