En Normandie, l'éco-village des Noés, un laboratoire de R&D urbaine

SPÉCIAL MIPIM. À Val-de-Reuil, la plus jeune des villes nouvelles imaginées par Paul Delouvrier dans les années 1960, un village humaniste conjugue environnement et « bon vivre ».
(Crédits : Pierre-Yves Brunaud)

Il est auréolé d'une batterie de prix impressionnante et cité en exemple jusqu'à Taïwan, île qui se veut pourtant en pointe sur l'écologie. Conçu par l'atelier Philippe Madec pour le compte du bailleur social normand Siloge, l'éco-village des Noés - du nom dont on baptisait les lieux qui bordent les rivières - a tout du modèle. Situé à Val-de-Reuil, la plus jeune des villes nouvelles imaginées par Paul Delouvrier dans les années 1960, cet éco-village démontre avec brio que l'écoconception immobilière n'est l'apanage ni des métropoles, ni des grosses opérations.

Signe particulier ? L'approche humaniste dont il a fait l'objet dès l'amont. Ici, maître d'ouvrage et maître d'oeuvre ont voulu, avec l'aval enthousiaste de l'équipe municipale, conjuguer exemplarité environnementale et « bon vivre », allant jusqu'à s'assurer les services du sociologue Philippe Rucheton, spécialiste des « socio-portraits ».

« L'idée était d'offrir à des occupants du parc social, des logements hautement performants mais aussi à un cadre de vie influant sur les comportements pour favoriser le vivre ensemble. La technique s'est mise au service de l'humain, en somme », décrypte Peggy Abert, directrice de la Siloge.

Répartis dans trois hameaux, les 98 logements passifs, en location ou en accession pour encourager la mixité, sont desservis par de petites venelles afin de faciliter les relations de voisinage. Alimentées par une chaudière à biomasse, les constructions, orientées au Sud, ont été densifiées afin de ménager de vastes espaces partagés où la voiture est non grata : jardins familiaux, prés, cultures maraîchères et horticoles, maison commune, parc paysager dans la partie inondable, éco-crèche, halle publique...

Autant de lieux autogérés par les résidents ou par des structures locales. « Dès la conception, nous avons fait appel à cette strate du monde associatif et du monde coopératif sur un mode inhabituel », explique Philippe Madec, pour qui « l'éco-village possède à plus petite dimension toutes les qualités de la ville elle-même ».

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éco-village Les Noés, Normandie

[Les bâtiments ont été densifiés afin de ménager des espaces partagés comme les jardins, une éco-crèche... Crédits : APM Architecture & Associé]

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Dire que la mise en oeuvre a été facile serait mentir : dix ans de réflexion ont été nécessaires pour arriver à ce résultat. « Cette opération a beaucoup interpellé les acteurs de la construction, à commencer par Bouygues, en les obligeant à revisiter profondément leurs pratiques », signale Peggy Abert. Mais le fait est que, trois ans après son inauguration, le projet tient ses promesses. Les troubles de voisinage y sont inexistants et les habitants se sont approprié les lieux qu'ils entretiennent, salue Marc-Antoine Jamet, maire de Val-de-Reuil :

« Il suffit de s'y promener pour constater une véritable adhésion à la manière dont ce projet a été réfléchi. Les comportements du quotidien changent. Il y règne une forme de douceur et de simplicité des relations humaines qui renoue avec l'esprit dans lequel a été conçue la ville nouvelle. »

Le concept essaime dans la réhabilitation

L'innovation ne s'arrête pas aux portes de l'éco-village. L'approche utilisée pour concevoir ce « laboratoire de R&D » a infusé dans les autres programmes de la Siloge, justifiant a posteriori le surcoût de 15% consenti par le bailleur sur ses fonds propres. « Les compétences de nos collaborateurs ont évolué, nous ne construisons plus comme avant », confirme sa directrice.

Démonstration dans le village voisin de Léry, où une opération de réhabilitation est conduite sur un modèle proche de celui de l'éco-village, à partir d'un diagnostic réalisé par Philippe Rucheton. Objectif : démontrer que la réhabilitation peut, outre ses apports en termes de performance énergétique, devenir vectrice de lien social. L'analyse du sociologue a notamment mis en lumière le fait que le logement était vécu par beaucoup des résidents du quartier comme « un rempart vis-à-vis de l'extérieur ».

Pour recréer du lien, les appartements ont été pourvus de balcons, « premier pas vers le dehors », et de jardins familiaux. À Val-de-Reuil, les 90 logements du Hameau de l'Andelle jouxtant les Noés, également propriété de la Siloge, attendent aussi d'être rehabilités par l'atelier de Philippe Madec, avec les mêmes principes d'aménagement : espaces partagés, modes de déplacements doux... Là aussi, la voiture sera repoussée aux franges du quartier pour laisser place aux piétons. Où quand l'éco-construction rejoint l'innovation sociale. Les Noés, c'est trois hameaux, 98 logements en location ou en accession, et des venelles pour faciliter les relations de voisinage.

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Commentaire 1
à écrit le 17/07/2019 à 7:39
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Madame, monsieur, Je suis intéressée par une maison ou appartement dans un eco village, le votre, l eco des noés. Nous sommes plusieurs à aimer ce concept. Nous aimerions vous rencontrer. Bien cordialement. Me tmt

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