Municipales à Paris : Hidalgo plierait le match, Dati doublerait le score de Buzyn

Par César Armand  |   |  1515  mots
La maire (PS) de Paris Anne Hidalgo. (Crédits : POOL New)
Selon notre étude exclusive BVA pour La Tribune et Europe 1, à une semaine du second tour des élections municipales, Anne Hidalgo bénéficierait d'une dynamique favorable, confortée par l'alliance avec EELV. Rachida Dati n'aurait pas pour autant dit son dernier mot, alors qu'Agnès Buzyn peinerait à capitaliser les électeurs de Cédric Villani. La Covid-19 et ses conséquences économiques et sociales figurent en tête des préoccupations des Parisiens.

Dans une semaine jour pour jour, Paris connaîtra-t-il sa (nouvelle) maire ? Pas si sûr. Début juillet, les élu(e)s sorti(e)s des urnes le 28 juin au soir se réuniront en Conseil de Paris et (ré)éliront, lors d'un troisième tour, la locataire de l'Hôtel de Ville pour une durée de six ans. Ce sera alors l'épilogue d'une folle campagne de plus d'un an, entre l'abandon d'un "marcheur" historique adoubé par le président de la République mais contraint de retirer sa candidature, une ancienne ministre de la Santé propulsée sur le devant de la scène en pleine crise sanitaire, un virus qui a décalé de trois mois le deuxième tour et une maire d'arrondissement sortante qui n'a cessé de lâcher ses coups. 

Selon notre sondage BVA pour La Tribune et Europe 1, Anne Hidalgo, arrivée en tête le 15 mars dernier avec 29,33% des voix, est aujourd'hui créditée de 45% des intentions de votes pour le second tour. Ralliée par Europe-Ecologie-Les Verts (EELV) (10,79%) dans l'entre-deux-tours comme en 2001, 2008 et 2014, la maire (PS) sortante écrase la concurrence. Les deux autres candidates peinent à suivre: la candidate des Républicains, Rachida Dati, obtiendrait 34%, alors que la candidate d'En Marche, Agnès Buzyn, tomberait à 18%, contre 22,72% et 17,26% au soir du premier tour il y a trois mois. Soit une progression inférieure à 1% pour cette dernière malgré l'éviction de Cédric Villani.

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Quelle est la liste pour laquelle il y a le plus de chances que vous votiez ?

Soutenue dès le début par le PS, Génération-s - le parti de Benoît Hamon -, Place Publique - celui de Raphael Glucksmann -, le PCF - comme c'est toujours le cas depuis dix-neuf ans - et désormais par EELV, Anne Hidalgo apparaît comme la mieux placée pour remporter la mairie de Paris. Malgré son image parfois clivante auprès des centristes et des électeurs de droite, la maire sortante garde un fort capital sympathie à gauche avec 69% de reports de voix de la liste de la France Insoumise et même de 74% des écologistes. Sa base est en outre stable: 90% des sondés se disent sûrs de leur choix, dont 59% des professions intermédiaires.

Avec 87% des Parisiens qui se disent sûrs de leur choix, Rachida Dati tutoie le pourcentage de sa rivale. La maire sortante du VIIème arrondissement a de même la confiance de 50% des seniors, la population qui vote le plus, bien que la plus exposée à la Covid-19, de même que 89% des Républicains et 71% des électeurs de François Fillon au premier tour de la présidentielle de 2017 la soutiennent.

Une base plus volatile pour Buzyn

A contrario, la base d'Agnès Buzyn semble beaucoup plus volatile. Seuls deux tiers (66%) des électeurs qui optent pour la candidate d'En Marche sont sûrs de leur choix. Cette tendance se retrouve dans les autres indicateurs. Les électeurs de l'ex-marcheur Cédric Villani (7,88% le 15 mars, qui se maintient en son nom dans le XIVè) sont par exemple davantage séduits par Anne Hidalgo (54%) que par Agnès Buzyn (31%). Idem avec les électeurs d'Emmanuel Macron de 2017: 48% pour la maire sortante contre 34% pour l'ex-ministre de la Santé.

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"Concrètement, elle devrait réussir à faire à peine mieux que son score de 1er tour alors qu'un quart de ses électeurs ont l'intention de « voter utile », soit pour Anne Hidalgo soit pour Rachida Dati" relève BVA. "Cette « perte » serait compensée notamment par le vote de certains électeurs de Cédric Villani au 1er tour. A noter également : Agnès Buzyn ne parvient pas à convaincre les sympathisants LREM."

Quelles sont les conséquences de la Covid-19 que vous redoutez le plus dans le futur ?

La Covid-19 demeure par ailleurs la première préoccupation des Parisiens. 78% des sondés, hommes (75%) et femmes (81%) confondus, estiment que le virus aura des conséquences qui vont bouleverser durablement leur quotidien. Les jeunes adultes (83%), les professions intermédiaires (86%) et les électeurs d'Europe-Ecologie-Les-Verts (84%) le pensent avec vigueur. A l'inverse, plus d'un quart des retraités (28%) - la population à la fois la plus fragile et la plus citoyenne - considère que ce sera sans conséquence.

Plus de la moitié du panel redoute en effet une crise sociale (55%) ainsi qu'une crise économique pour les entreprises locales (54%), devant le risque sanitaire (45%) et une hausse de la fiscalité (30%). De l'autre côté du spectre, les Parisiens ne sont que 7% à craindre une plus grande difficulté à se loger ainsi qu'une crise migratoire, et seulement 11% une dégradation de la propreté et 13% des conditions de circulation.

Quelle candidate est la plus en mesure de protéger la ville face... ?

Dans ces conditions, quelle candidate incarne le mieux la protection face à toutes ces menaces ? Sur les thèmes chers à la droite, c'est logiquement Rachida Dati qui se détache. Que ce soit dans la lutte contre la crise économique et le chômage (26%), la montée de l'insécurité (37%), le déséquilibre budgétaire (29%) ou la crise migratoire (29%), la candidate des Républicains fait mieux qu'Anne Hidalgo (24%, 21%, 22% et 20%).

A contrario, sur les marqueurs de gauche, la maire s'impose comme la femme de la situation. En matière de lutte contre la crise sanitaire (28%), la crise écologique et le risque climatique (38%) et la fracture sociale (31%), la sortante fait en effet mieux.

De droite et de gauche, Agnès Buzyn peine, elle, à s'imposer. Outre la protection contre la crise sanitaire (13%) et la fracture sociale (10%), conférée par son statut d'ex-ministre de la Santé et des Solidarités, la "marcheuse" n'arrive pas à rassembler dans les autres domaines, avec un pourcentage entre 6% et 9% dans chaque catégorie.

Avantage Hidalgo, Dati en embuscade

Si Anne Hidalgo réalise un très bon score, proche de la majorité absolue, rien ne dit pour autant qu'elle transformera l'essai dès dimanche prochain. Cette étude se fonde en effet sur les têtes de listes parisiennes et non sur les seize scrutins - Rachida Dati ayant remporté sa mairie d'arrondissement dès le premier tour - secteur par secteur. L'incertitude des électeurs d'Agnès Buzyn - comme les cadres - pourrait même déboucher sur un duel plus serré.

"Bien entendu, ce tableau global cache des disparités selon les arrondissements", souligne l'institut de sondage: la gauche devrait réussir à garder la majorité dans l'ensemble des arrondissements qu'elle détient aujourd'hui (y compris Paris-Centre qui comprend le 1er arrondissement de droite, Ndlr) et la droite devrait s'imposer dans les arrondissements où elle est implantée de longue date. "L'incertitude est en revanche totale dans le Vè (où la droite pourrait l'emporter d'un cheveu comme souvent) ainsi que dans le IXè où Delphine Bürkli, la candidate LREM (ex-LR, Ndlr), pourrait finir au coude-à-coude avec la gauche unie", prévient-il.

In fine, l'équilibre des forces à Paris ne devrait guère évoluer par rapport à 2014, voire évoluer en faveur de la majorité sortante, conclut BVA.

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Méthode

Étude réalisée par l'Institut BVA auprès d'un échantillon interrogé par Internet entre le 12 et le 18 juin 2020

Échantillon de 1200 personnes inscrites sur les listes électorales, issues d'un échantillon représentatif de 1458 habitants de Paris âgés de 18 ans et plus. La représentativité de l'échantillon a été assurée par la méthode des quotas appliquée aux variables suivantes : sexe, âge, profession de l'interviewé et arrondissement de résidence.

Les intentions de vote qui figurent dans ce rapport reposent sur la base des personnes inscrites sur les listes électorales à Paris, certaines d'aller voter et ayant exprimé une intention de vote, soit 430 individus. Pour cet effectif, pour un pourcentage obtenu par enquête de 20%, la marge d'erreur est égale à 4. Le pourcentage a donc 95% de chance d'être compris entre 16% et 24%. Les résultats d'intentions de vote ne constituent pas un élément de prévision du résultat électoral. Ils donnent une indication significative de l'état du rapport de forces à une semaine du 2nd tour du scrutin. Chaque répondant a été interrogé sur l'offre réelle des listes déposées en préfecture pour son arrondissement. Les résultats ont ensuite été regroupés pour donner des scores au global (sur l'ensemble de la ville de Paris).

Avertissement : Ces intentions de vote ont été réalisées au global sur la ville de Paris alors qu'il s'agit d'un scrutin par arrondissement. Il s'agit donc ici de mesurer des tendances générales et non de réaliser des projections précises pour chaque arrondissement. Les électeurs du VIIème arrondissement n'ont pas été interrogés sur les questions d'intentions de vote, ayant élu leur maire d'arrondissement dès le 1er tour. Ils ne sont donc logiquement pas comptabilisés dans les résultats globaux pour le 2nd tour.

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