Les Pays de la Loire optent pour des coopérations renforcées

[ #Regionales 2015 ] Après le « Grand Est » où nous avons fait étape dans notre précédente édition, La Tribune poursuit son tour de France des Régionales… Repoussée de la 5e à la 8e place au gré de la réforme territoriale, la région des Pays de la Loire veut multiplier les partenariats pour raisonner à l’échelle du Grand Ouest.

Elle a tout d'une grande... mais ses contours, dessinés arbitrairement dans les années 1950, autour de la Loire-Atlantique (Nantes), le Maine-et-Loire (Angers), la Vendée (La Roche-sur-Yon), la Sarthe (Le Mans) et la Mayenne (Laval), resteront inchangés encore pour quelque temps.

Qu'à cela ne tienne, la région des Pays de la Loire, qui a évité le démantèlement d'un projet de France à 12 régions et buté sur un rapprochement avec sa voisine la Bretagne, laquelle lorgnait la seule Loire-Atlantique, se réjouit plutôt de rester à l'écart du chamboulement territorial. Elle y verrait même quelque avantage. Du moins à court terme. Même si, pour cela, elle doit glisser de la cinquième (sur 22) à la septième ou huitième place (sur 13).

Un changement au classement qui n'émeut guère Christophe Clergeau (PS), premier vice-président de la région et candidat à la succession du président actuel Jacques Auxiette, en décembre prochain.

« Nous n'allons pas perdre de temps, d'argent ni d'énergie dans ce redécoupage. Le débat a même montré une certaine solidarité entre les acteurs des Pays de la Loire. Une "plus petite région", c'est plus d'efficacité, d'agilité et de réactivité », prône-il, admettant quand même qu'il faudra bien avoir recours au marketing territorial pour réécrire son « profil ».

Cinquième région pour son PIB, sa superficie, et une population en progression de 27.500 habitants par an, seconde région agricole française et troisième région industrielle, les Pays de la Loire possèdent de nombreux atouts. Un cadre de vie et un dynamisme économique, d'abord. En raison de son attractivité géographique, patrimoniale et économique, la région devrait voir sa démographie augmenter de 25 % au cours des trente prochaines années. Une population qu'il faudra accueillir, former et employer.

D'où la nécessité de développer l'économie, de favoriser l'innovation, l'émergence de filières, l'investissement, de renfoncer le tissu très diversifié des PME, d'inciter la venue d'entreprises de taille intermédiaire (ETI) pour donner plus de valeur aux emplois proposés et attirer des talents. En net progrès, la recherche reste insuffisamment présente dans la région. Tout comme l'internationalisation des entreprises.

« Plus qu'à un mariage artificiel avec la Bretagne, ce qui est déterminant pour moi c'est le projet collectif porté sur un territoire, et de faire travailler ensemble des gens confrontés aux mêmes enjeux. Au niveau européen, la Bretagne et les Pays de la Loire sont périphériques. Nous avons chacune une dimension agricole, maritime, une histoire, un modèle social relativement proche, des entreprises et universités largement en réseau, et tout cela constitue un seul et même espace cohérent, de Saint-Malo à la Roche-sur-Yon et de Vannes à Angers. C'était une opportunité d'adapter les frontières administratives à une réalité qui existe déjà », argumente encore Christophe Clergeau qui, à défaut de rapprochement avec la Bretagne, préfère multiplier les coopérations et les partenariats avec les régions voisines (Bretagne, Poitou-Charentes, Centre).

« Pour peser au nom du Grand Ouest dans les débats nationaux ou européens », précise-t-il.

Bretagne et pays de la Loire : un destin commun

Que ce soit à travers les pôles de compétitivité (EMC2, Atlanpole Biotherapies, Images & Réseaux, etc.) ou le développement de filières traditionnelles comme l'agroalimentaire et les industries maritimes ou, plus récentes, comme les Énergies marines renouvelables (EMR), les deux régions se reconnaissent un destin commun. « Le temps que les autres utilisent pour leur fusion, nous devons l'utiliser pour renforcer nos coopérations. Sur les EMR, par exemple, même si l'on est concurrent, on mène le combat ensemble. »

Votée en juillet dernier pour accompagner le redécoupage territorial, la loi NOTRe va élargir les missions de la Région dans les domaines des transports, de la formation et de l'économie. Grâce à ce transfert de compétences, le budget ligérien devrait passer de 1,4 milliard à 1,8 milliard d'euros. En prenant la main sur des secteurs jusque-là incombant aux départements, la Région va couvrir des spectres plus larges et, surtout, pouvoir déterminer un schéma d'aménagement sur son territoire en ayant un œil sur toute la chaîne de la formation des jeunes, les aides aux entreprises et l'ensemble des transports (hors agglomération).

« Confier les transports scolaires aux régions, c'est pour moi une absurdité. Les départements le font très bien, les régions ne feront pas mieux », estime le sénateur (Les Républicains) Bruno Retailleau, président du conseil départemental de Vendée et candidat à la présidence de la région des Pays de la Loire.

« Ce n'est pas le rôle des nouvelles régions. Il manque à ce texte une dimension de décentralisation. Nous avons proposé au Sénat une régionalisation des politiques de l'emploi, sinon à quoi bon élargir les compétences économiques des régions, et avons obtenu une expérimentation très contrainte, très timide pour territorialiser une politique régionale de l'emploi. Maintenant, le texte est voté, faisons avec, mais je crois que les collectivités doivent se concentrer sur l'investissement et élaborer des stratégies pour l'avenir et non intervenir un peu partout », dit-il.

Jacques Auxiette a d'ailleurs fait savoir, cet été, au gouvernement qu'il était prêt à mener cette expérimentation en Pays de la Loire.

Si l'enjeu des prochaines échéances électorales portera bien évidemment autour des questions d'emploi dans une région où le taux de chômage atteint 9 %, la collectivité devra faire face à la pression démographique et aux enjeux de transition énergétique et écologique. Car, pour satisfaire ses besoins en logements et la croissance des entreprises, les Pays de la Loire seraient l'un des territoires français qui consomment le plus d'espaces naturels pour son développement.

« C'est une opportunité de ne pas être dans le premier wagon de grandes fusions. Ce recul permettra d'être innovant. Nous sommes à une période charnière. La région a vraiment un rôle à jouer dans cette transition. Tout le monde répond numérique, mais je pense que le vrai enjeu sera de travailler sur l'humain et l'équité territoriale », estime Sophie Bringuy, la candidate d'EELV.

Une fusion avortée

Passée à côté du redécoupage territorial, la région des Pays de la Loire a envisagé toutes les hypothèses. Elle préfère aujourd'hui miser sur les coopérations.

«Quand je vois les cernes sous les yeux de mes homologues d'Aquitaine, Poitou-Charentes, Limousin, et les difficultés auxquelles ils ont à faire face en gérant concomitamment le désengagement des départements, la préparation des élections régionales, la fusion avec une ou deux autres régions imposée en un an, nous avons au moins l'avantage de ne pas être soumis au rouleau compresseur organisationnel des fusions », estime Lionel Delbos, directeur général délégué à l'économie et à l'innovation dans la région des Pays de la Loire. Soulevée en début d'année 2014, la question d'une fusion avec la Bretagne a agité le landerneau ligérien.

Tous les scénarios ont été examinés, jusqu'à un rapprochement avec les régions Poitou-Charentes et Centre. Des hypothèses sans véritables fondements. « Pour l'Ouest, l'intérêt des populations est la fusion Pays de la Loire-Bretagne autour des métropoles Nantes et Rennes », twittait, à l'époque, Jean-Marc Ayrault, l'ex-maire de Nantes. Si les Ligériens se sentaient favorables à la fusion, les Bretons, emmenés par Jean-Yves Le Drian, soutenu par l'UDB (Union démocratique bretonne), revendiquant une Bretagne à cinq départements — Loire-Atlantique incluse —, n'en ont pas voulu. La précipitation de la réforme a-t-elle été préjudiciable à une région de l'Ouest à neuf départements ?

« On est passé à côté d'une réforme qui aurait pu être majeure pour la France, en allant vers un État fédéral comme en Allemagne, dont l'organisation me semble plus adaptée aux enjeux actuels. En Pays de la Loire, on a eu la chance d'échapper à un redécoupage dicté de Paris, prônant que la solution, c'étaient les grandes régions. En fait, on voit que ces regroupements sont très compliqués en termes d'enjeux. La réforme n'a pas pris en compte la dynamique des territoires et va peut-être poser plus de problèmes qu'elle ne va en résoudre », estime Sophie Bringuy, vice-présidente du conseil régional des Pays de la Loire chargée de l'environnement, candidate EELV à la présidence.

Selon Christophe Clergeau, vice-président du conseil régional, « on pouvait concilier la reconnaissance d'une réalité, d'une histoire et d'une culture partagées et, sur un territoire plus large, construire l'avenir... »

Sentiment d'être passé à côté de quelque chose.

« Mais sans doute fallait-il prendre le temps d'un vrai débat. Il existe aujourd'hui une continuité d'aménagement, de transport, d'échange entre ces deux régions. Faire des choix collectifs sur un espace où l'on a envie de vivre, c'est le même débat que pour l'intercommunalité : il faut se choisir. Il y avait des réticences en Bretagne, c'est pourquoi je me bats aujourd'hui plutôt pour multiplier les projets communs et les coopérations renforcées », indique Christophe Clergeau

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nantes

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>>> Retrouvez notre série "Régionales 2015" dans le Grand Soir/3 présenté par Patricia Loison chaque jeudi vers 22h30

Extrait du Soir 3 du jeudi 17 septembre 2015

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Commentaires 6
à écrit le 23/09/2015 à 8:17
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Bruno Retailleau n'est pas le président du conseil général de Vendée...!!

à écrit le 22/09/2015 à 7:54
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Ne pas vouloir fusionner avec la Bretagne mais en citer le nom tous les deux mots..... Y aurait il un probleme d'identité?

à écrit le 22/09/2015 à 7:54
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Ne pas vouloir fusionner avec la Bretagne mais en citer le nom tous les deux mots..... Y aurait il un probleme d'identité?

à écrit le 22/09/2015 à 7:53
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Ne pas vouloir fusionner avec la Bretagne mais en citer le nom tous les deux mots..... Y aurait il un probleme d'identité?

à écrit le 21/09/2015 à 23:31
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Enfin une excellente idée de la région technocratique P.D.L. Celle-ci a tout intérêt de lier un partenariat très serré avec la nouvelle région Val-de-loire qui bénéficie d´une reconnaissance internationale. Cette nouvelle politique de PDL va permettr...

le 28/09/2015 à 12:50
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Vous devez confondre Val de Loire et la région Centre-VdL! Le Val de Loire (de l'Unesco) est à cheval sur les 2 régions Pays de Loire et Centre dont le coeur le PNR est aussi à cheval. Le Val de Loire maraîcher et horticole est centré sur l'Anjou et ...

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