Canicule en ville : l’îlot de chaleur, ennemi public numéro 1

Face au réchauffement climatique et à la poursuite de l’urbanisation, qui devrait voir 75% de la population mondiale vivre en ville d’ici à 2050, les températures plus élevées encore dans les zones urbaines constituent un sujet de préoccupation. Des solutions existent, mais les plus efficaces impliquent de repenser les usages de l’espace public urbain, à commencer par la place de la voiture…
Dominique Pialot
Les surfaces asphaltées accroissent l'effet de chaleur urbain

C'est un fait entendu, en France comme dans de nombreux lieux de la planète, il fait (très) chaud ces jours-ci. Et plus encore dans les villes. Le coupable ? L'îlot de chaleur urbain (ICU), responsable de températures en moyenne sur 30 ans de 3°C plus élevés pendant 12 jours par mois l'été et 4 jours par mois l'hiver à Paris et dans la petite couronne.

En période caniculaire, caractérisée par un ciel dégagé et l'absence de vent, cette différence peut atteindre jusqu'à 10°C. Lors de l'épisode de 2003, des écarts de 8°C avaient ainsi été relevés entre le centre de Paris et les zones rurales d'Ile-de-France.

Le béton et l'asphalte en ligne de mire

Cet effet baptisé « îlot de chaleur », qui peut d'ailleurs varier d'une rue à l'autre au sein d'un même quartier, est principalement dû à la forte proportion de surface artificialisée et imperméable, et à la chaleur absorbée dans la journée et restituée la nuit par les matériaux les plus utilisés, notamment béton et asphalte à fort pouvoir réfractaire. C'est pourquoi ses effets sont plus sensibles encore de nuit, privant ainsi les citadins de toute possibilité de récupération après des journées étouffantes. En général, l'ICU commence à croître en fin d'après-midi, augmente plus rapidement au coucher du soleil et atteint son maximum au milieu de la nuit. Cet écart diminue en revanche au lever du soleil pour être minimum dans le milieu de l'après-midi. Il peut même s'annuler en journée.

Outre l'utilisation de matériaux à fortes propriétés radiatives et thermiques, l'intensité de l'effet îlot de chaleur dépend également de la densité, de la présence et la répartition de surfaces végétalisées et d'eau. Une différence de 12°C entre pelouse et trottoir a ainsi pu être mesurée ! La forme de la ville joue et, plus localement, la configuration du quartier jouent également un rôle, en particulier la hauteur des bâtiments, leur orientation et leur exposition au soleil d'une part, aux couloirs de vent d'autre part. Elles déterminent en effet le degré d'exposition au soleil et la capacité de refroidissement nocturne.

L'émission de chaleur de certaines activités telles que les transports  - à commencer par la circulation automobile - ou les rejets d'air liés à la climatisation peuvent accroître encore l'intensité des ICU.

Arroser et repeindre en blanc

À court terme, les solutions disponibles consistent essentiellement à arroser la chaussée (ce que fait la ville de Paris depuis plusieurs années) et à repeindre certaines surfaces sombres (telles que les toits) en blanc afin d'augmenter leur effet albédo, c'est-à-dire leur pouvoir de réfraction du rayonnement solaire. C'est ce que pratiquent plusieurs villes d'Amérique latine, et, plus récemment, Los Angeles. Lyon, qui anticipe d'ici à 2100 le climat de Madrid, voire d'Alger si rien n'est fait pour y remédier - du béton de couleur clair a remplacé le bitume dans certaines rues du quartier de la Part-Dieu et quelque 3.000 arbres résistants à la sécheresse sont plantés chaque année. Un ancien tunnel a été transformé en bassin de récupération des eaux de pluie.

À moyen terme, il s'agit en effet également de multiplier les points d'eau et de végétaliser les villes afin d'augmenter l'effet rafraîchissant de l'évapotranspiration par laquelle les plantes resituent l'eau puisée dans le sol lors de la photosynthèse. De nombreuses villes s'y emploient, notamment en incitant à la multiplication des projets. C'est le cas de Paris, qui vise l'a végétalisation de 100 hectares de toits, murs et façades à l'horizon 2020. La capitale française participe également au plan "The million tree initiative" par lequel les villes s'engagent à planter un million d'arbres, un objectif d'ores et déjà atteint par New York.

Conception des bâtiments et usages de l'espace public

Mais à plus long terme, c'est en améliorant la conception et la réhabilitation thermique des bâtiments, en particulier en tenant compte de leur orientation bioclimatique et des possibilités de ventilation que l'on peut s'attaquer durablement et de façon structurelle au fléau que constituent les îlots de chaleur urbains en été. Le choix  de matériaux aux meilleures propriétés réfléchissantes et absorbantes afin d'allonger la durée d'évaporation après arrosage sont également des pistes clairement identifiées. L'inutilité de recouvrir (puis d'entretenir) l'asphalte qui recouvre la couche de béton des trottoirs ou encore les joints entre les pavés fait aussi l'unanimité parmi les experts.

Mais fondamentalement, si l'îlot de chaleur est inhérent à toute urbanisation, c'est le mode d'occupation des sols qui a le plus d'influence sur son intensité. En effet, c'est avant tout pour leurs propriétés mécaniques, notamment leur résistance à la circulation automobile, que des matériaux tels que l'asphalte et le bitume ont été privilégiés dans l'aménagement des villes. En revanche, plus les parcs sont nombreux et certains lieux rendus aux piétons et, à cette occasion, végétalisés, plus les effets des îlots de chaleur sont atténués.

Si, contrairement à certaines idées reçues, la pollution n'est pas responsable de la hausse des températures en ville, la présence plus ou moins intensive de la voiture joue un rôle. Sans compter que la combinaison de fortes chaleurs et de fortes pollutions atmosphériques peut entrainer des risques sanitaires, comme c'est actuellement le cas avec les pics d'ozone.

Dominique Pialot

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 28
à écrit le 10/08/2018 à 10:22
Signaler
la politique écologique n est pas un remède ! le résultat le confirme par nigauderie

à écrit le 08/08/2018 à 22:45
Signaler
Ah, les villes à la campagne, un vieux rêve d'actualité !

le 09/08/2018 à 8:25
Signaler
Sauf qu'avant d'être les villes … c'était la campagne! Si 'est la ville, ça n'est plus la campagne, c'est l'un ou l'autre ...

à écrit le 08/08/2018 à 17:11
Signaler
Comme tous nos médias, la tribune nous sert sa soupe quotidienne sur le "drame" du réchauffement climatique. Comme dans tout changement, il y a des risques mais aussi des opportunités. Vous vous distingueriez à présenter une information équilibrée et...

à écrit le 08/08/2018 à 15:02
Signaler
L'auteur de l'article ne s'est pas trop foulé : - emploi de mots à tort ("réfraction" au lieu de "réflexion") - fatras de notions mélangées il aurait pu relire son brouillon

à écrit le 08/08/2018 à 12:38
Signaler
Mêmes les Mayas ne se sont pas remis de la sécheresse et des canicules à répétition. Pourtant à l'époque, pas de voiture, de transport, de climatiseur, pas de chauffage au charbon, fuel, gaz. Pas de gaz à effet de serre. Les plus heureux de la situat...

à écrit le 08/08/2018 à 12:33
Signaler
Et si ce n’etait que le phénomène de concentration urbaine exacerbée qui réchauffait la planète ???

à écrit le 08/08/2018 à 11:46
Signaler
En tous cas ce n'est pas en interdisant à quelques milliers de pauvres de circuler (voitures classées 4 ou 5) que la pollution a diminué! Une extraordinaire mesure discriminatoire de notre drame de Paris (hidalgope) qui de plus est une vaste fumist...

le 08/08/2018 à 13:44
Signaler
Pour votre information, la centrale EDF de Porcheville est définitivement fermée depuis mai 2017.

à écrit le 08/08/2018 à 11:40
Signaler
Visitez la ville de Mazdar à 50 km d'Abu Dhabi, ville futuriste à la conception révolutionnaire en matière de qualité environnementale. 10 à 12 degrés de moins que le centre d'Abu Dhabi uniquement grâce aux matériaux utilisés, à l'orientation des bât...

le 08/08/2018 à 22:49
Signaler
50 moins 10, cela nous laisse à 40°C et tout le monde fonctionne à la clim là-bas....

à écrit le 08/08/2018 à 10:39
Signaler
En échange de la bouffe, des produits et de l'énergie qu'elles "volent" aux campagnes, les villes ne produisent rien que des ordures dont elles font cadeau a qui n'en veut... Si on arrêtait enfin d'y empiler des gens totalement improductifs et final...

le 08/08/2018 à 22:52
Signaler
Tss, dans les pays "sous développés" les gens sont moins malheureux dans les villes qu'aux campagnes, d'où la croissance des mégapoles...

à écrit le 08/08/2018 à 10:02
Signaler
Merci pour cet article qui met bien l'accent sur les principaux moyens de gérer la chaleur en ville due au rayons du soleil : ombre, rayons réfléchis vers le haut, évaporation, absorption. L'arbre apparaît comme le champion des climatiseurs. Force es...

le 08/08/2018 à 22:57
Signaler
" Le principal souci des villes n'est pas l'automobile, mais la pauvreté des aménagements." Exact mais les climatiseurs arbres peuvent avoir du mal à fonctionner, par exemple les marronniers qui perdent déjà leurs feuilles. Ce qui n''est pas le cas d...

à écrit le 08/08/2018 à 9:00
Signaler
"la pollution n'est pas responsable de la hausse des températures en ville," Non mais l'énergie fossile impliquant une combustion ne peut qu'amplifier la chaleur à un endroit donné. Toutes cas bagnoles collées les unes derrière les autres toute l...

à écrit le 08/08/2018 à 8:54
Signaler
Mr Fred, envisager le changement, quel qu'il soit, vous est trop difficile. Vous n'aimez pas l'effort (sauf peut-être d'épargne), et ne reconnaissez pas ceux des autres. Avant de "distribuer" le foin à ses vaches l'agriculteur doit le produire. Cela ...

à écrit le 08/08/2018 à 8:39
Signaler
En France, l'hiver il fait un peu froid, l'été un peu chaud et sinon il peut pleuvoir plus ou moins. A chaque période et chaque année on est assez étonné de redécouvrir notre climat saisonnier. Attention de ne pas dramatiser les quelques inconvénient...

le 08/08/2018 à 23:04
Signaler
Trés justes observations, je vous aurait liké si la possibilité existait ici.

à écrit le 08/08/2018 à 8:07
Signaler
un ministre soit disant écolo ose demander aux français de prendre leur responsabilité! suite a son très mauvais bilan ! le monde a l envers...

à écrit le 08/08/2018 à 1:14
Signaler
Décidément quel est le rôle d'un journal? Reprendre les informations et les distribuer tel le fermier distribue le foin aux vaches, ou les critiquer? Repeindre en blanc.... Vous rendez vous compte de l'énormité? Repeindre les routes les trottoirs l...

le 08/08/2018 à 23:06
Signaler
Tss, connaissez vous Alger la blanche ? N'avez vous jamais voyagé en Grèce ?

à écrit le 07/08/2018 à 21:04
Signaler
Pendant des années et des années, on a fait des choses à l'opposé du bon sens. Suppression des arbres pour éviter l'entretien, et les maladies... Toutes les rues pietonnent ont été décloisonnées pour faire de belles artères pour être rendues accessib...

à écrit le 07/08/2018 à 21:01
Signaler
Lille. 15m2 d'espaces verts contre 45 en moyenne en France. La ville dispose en centre ville des 23 hectares libres de l'ancienne gare St Sauveur. Le projet aurait pu être d'en faire un parc. On va bétonner (logements) et asphalte + abattre un ilôt d...

le 08/08/2018 à 23:09
Signaler
Auriez vous soupé de Dame Tartine ?

le 10/08/2018 à 10:56
Signaler
Il semble que vous ayez soupé de Dame Tartine..:-)

à écrit le 07/08/2018 à 18:51
Signaler
Ce n'est pas le cas de toutes les villes. Ex : Rouen. En travaux sur les quais, tout refait en asphalte : personne n'a eu l'idée de faire des coins pelouses pourtant comme l'indique l'article même de la terre sèche retient moins la chaleur (et serait...

le 08/08/2018 à 11:37
Signaler
Rouen une ville socialiste de plus, donc des résultats catastrophiques en matière de qualité environnementale...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.