Semi-conducteurs : « On peut fabriquer en Isère et être compétitif » (Pierre Barnabé, DG de Soitec)

Soitec, l’un des leaders mondiaux des matériaux semi-conducteurs innovants, poursuit son implantation du côté de Grenoble, dans la « Silicon Valley française ». Depuis l’Isère, l’industriel exporte 95% de sa production à l’étranger. Ce qui lui vaut de remporter, pour la région Auvergne-Rhône-Alpes, le prix International du forum « Transformons la France », organisé ce 1er juin par La Tribune à Lyon.
Selon Soitec, producteur de composants pour l'industrie électronique implanté en Isère, le marché des semi-conducteurs est voué à doubler en volume et en valeur dans les 7 ans à venir.
Selon Soitec, producteur de composants pour l'industrie électronique implanté en Isère, le marché des semi-conducteurs est voué à doubler en volume et en valeur dans les 7 ans à venir. (Crédits : © Lee Jae Won / Reuters)

Comme un signe de plus, s'il en fallait un, de l'attractivité de la vallée du Grésivaudan, Soitec va inaugurer une nouvelle usine d'ici la fin de l'année à Bernin en Isère. Ce fleuron industriel, producteur de composants pour l'industrie électronique, a choisi la « Silicon Valley française » (et non Singapour où il est aussi présent) pour se développer et implanter son nouveau site, destiné aux substrats de carbure de silicium, utilisés dans les véhicules électriques. Un marché porteur sur lequel l'entreprise compte fortement accélérer.

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« On peut fabriquer en Isère et être compétitif, se développer, recruter des talents : des docteurs, des scientifiques, des techniciens... Depuis Bernin, on est en capacité de fournir la totalité des pays. 95% de notre production part à l'étranger. La Région offre les infrastructures pour se déployer dans le monde entier » témoigne Pierre Barnabé, le directeur général de cette société de 2.300 salariés, dont 1.600 en France qui a reçu le prix International pour la région AURA, décerné par La Tribune.

Pour ce dirigeant, la région possède un environnement particulièrement propice à la fabrication de semi-conducteurs, grâce notamment à tout l'écosystème installé sur place. A commencer par la présence de STMicroelectronics, le fabricant franco-italien de puces, mais aussi du CEA-Leti, le centre de recherche et technologie spécialisé dans les micro et nanotechnologies, situé à Grenoble. Le territoire offre également un important vivier de candidats, des personnes formées et compétentes pour travailler dans la haute technologie et les produits de toutes dernières générations.

« Ici, nous avons des ingénieurs, des docteurs de très bons niveaux mais aussi des opérateurs qui travaillent dans des salles blanches avec un haut niveau de technicité », poursuit le dirigeant de l'entreprise qui fournit des substrats qui servent à la fabrication de composants dans la téléphonie mobile (appareils 5G), l'automobile et les objets connectés.

Les semi-conducteurs, un enjeu géostratégique

Une industrie mais aussi des compétences et un savoir-faire qu'il est essentiel de garder sur le territoire français, alors que la crise du Covid a montré la dépendance de l'Europe vis-à-vis des pays asiatiques, et notamment Taïwan, en matière de semi-conducteurs. L'Europe vient d'ailleurs de se mettre d'accord sur un « Chips European Act », un plan d'investissement à 43 milliards d'euros. Ce plan doit notamment permettre de renforcer l'industrie européenne de semi-conducteurs avec un objectif : doubler la part actuelle de l'Union Européenne dans la production mondiale de puces électroniques, pour la porter à 20 % en 2030.

« Les semi-conducteurs sont de plus en plus un enjeu géostratégique. Pour autant on ne peut pas parler de guerre dans les semi-conducteurs, je dirais plutôt qu'il y a de fortes tensions géostratégiques » a analysé Pierre Barnabé au cours de son échange avec Philippe Mabille, directeur de la rédaction de La Tribune. « Il y a effectivement eu des pénuries dans le secteur automobile (ce qui a freiné les ventes) mais c'est en train de se résorber. Ce qu'il faut surtout prendre en compte, c'est que les besoins en semi-conducteurs sont croissants. Le marché est voué à doubler en volume et en valeur dans les 7 ans à venir. Il est donc essentiel de maîtriser certains éléments clé. »

Mais pour ce dirigeant, il sera très difficile pour un pays de produire à lui seul les milliers de composants nécessaires dans la fabrication d'une voiture. Il faut en revanche développer la puissance industrielle de la France et nouer des partenariats stratégiques. C'est ce que l'entreprise fait notamment avec STMicroelectronics. Une récente collaboration vise à développer la nouvelle feuille de route de la prochaine génération de la technologie du substrat phare de Soitec, le FD-SOI.

Chiffre d'affaires consolidé de 344 millions d'euros au 4ème trimestre

Soitec investit, par ailleurs, de plus en plus dans la recherche et développement; 25% de l'effectif de cette branche est constitué de docteurs. Et l'entreprise n'échappe pas aux grands enjeux actuels. Elle s'inscrit évidemment dans une démarche de développement durable et d'économie d'énergie.

« Par structure, par design, nos produits consomment moins d'énergie. Pourquoi ? Parce que la surface active sur laquelle sont fabriqués, lithographiés les semi-constructeurs est beaucoup plus fine que dans les technologies précédentes. Cela permet d'économiser beaucoup d'énergie. Vous avez remarqué que la batterie de votre smartphone tient beaucoup plus longtemps, alors même que l'on consomme de plus en plus de données. C'est grâce à Soitec. Demain les voitures électriques rouleront plus longtemps et leurs batteries pourront être rechargées plus vite, là encore c'est grâce à Soitec » estime Pierre Barnabé.

Lire aussiSemi-conducteurs : l'Europe accouche d'un plan pour rester dans la course face à l'Asie

Soitec, qui présentera ses résultats annuels le 7 juin prochain, a déjà annoncé, fin avril, un chiffre d'affaires consolidé de 344 millions d'euros pour le 4ème trimestre de l'exercice 2022-2023 (clos le 31 mars 2023), en hausse de 22% par rapport au chiffre d'affaires du 4ème trimestre 2021-2022. L'entreprise prévoit cependant de faire face à un ralentissement de son activité au premier semestre de son nouvel exercice 2023-2024 avec un repli sur le marché des smartphones, lié aux stocks sur la chaîne d'approvisionnement.

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Commentaires 8
à écrit le 08/06/2023 à 20:58
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Bonjour, 21 milliards d euros d aides pour 252000 emplois, zut non, en fait la France l europe été manipulé et en plus ils peuvent faire une liquidation judiciaire

à écrit le 02/06/2023 à 10:37
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ridicule!! soitec va de subvention en augmentation da capital, on se demande pourquoi ca n'a pas encore fait faillite! alors c'est un peu facile de dire que tout va bien! on dirait les start ups qui ne vendent rien et pour lesquelles tout va bien tan...

le 02/06/2023 à 19:00
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Parce que les usa ne subventionnent pas leurs industries ?

à écrit le 01/06/2023 à 20:25
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C'est facile d'être rentable quand on est gavé de subventions et exonérés de taxes...

le 01/06/2023 à 22:55
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Assez faux pourtant, les produits Soitec se trouvent dans la quasi totalité des smartphones, dans la partie front end RF notamment. C'est un grand succès car même les Américains de Global Foundries investissent dans cette techno qui est une retombée ...

le 02/06/2023 à 0:14
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La prédation de la société des assistés sur les entreprises est telle que même avec un peu de subventions, réussir en France reste un miracle. Et le solde net est très (trop) favorable pour l'état.

le 02/06/2023 à 9:17
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Souvenir : 2011 : Des subventions à la recherche et au développement (R & D) d'un montant global de 135 millions d'euros vont être accordées à trois entreprises spécialisées dans la micro et la nanoélectronique, ont annoncé, jeudi 21 juillet, Laure...

le 02/06/2023 à 10:13
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Le chip act American c est plus de 50 milliards de dollars injectés dans la filière. L industrie Chips Coréenne est entièrement née d une initiative publique dans les années 90. Faut arrêter de se comporter en petit greffier , il y a des investisseme...

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