Emmanuel Straschnov veut rendre le codage obsolète

Le codage est-il déjà mort, alors qu'on nous répète que c'est la clé des emplois présents, et surtout futurs, pour les jeunes comme les chômeurs longue durée ? Peut-être, si Emmanuel Straschnov et sa startup Bubble remplissent leur mission.
(Crédits : DR)

Chevelure noir de jais, regard pétillant et grand sourire, Emmanuel Straschnov ne fait pas ses 34 ans. Ce polytechnicien à l'allure juvénile et décontractée vivant à New York a pourtant un objectif très ambitieux : remplacer les fastidieuses lignes de codes servant à créer sites Web et applis mobiles par une méthode plus simple, accessible à tous. Mais avant de cofonder sa startup Bubble en 2012, le trentenaire a commencé son parcours dans un petit village du pays d'Auge, en Normandie. Il passe son bac S dans un lycée « pas très bon, avec 60% de réussite », fait sa prépa à Louis-le-Grand à Paris et entre à Polytechnique en 2003.

« Je voulais être fonctionnaire. J'ai même dit à mon père que la seule façon d'être utile, c'était de travailler pour l'État. J'ai d'ailleurs commencé à préparer l'ÉNA. » Sorti de l'X avec un très bon classement, il se voit ouvrir la voie royale du corps des Ponts, et abandonne l'objectif de l'ÉNA. « Je me suis rendu compte que travailler pour l'État voulait dire rester en France toute ma vie. Et moi, j'avais envie de vivre à l'étranger quelques années. »

Pendant trois ans, il occupe le poste de consultant en stratégie pour le cabinet Roland Berger dans des mégalopoles inconnues comme Guiyang, capitale du Guizhou. Le choix de la Chine n'est pas anodin car sa famille a une histoire avec ce pays. Son père part à Taïwan en 1978 à l'âge de 18 ans sur un coup de tête, et y rencontre la future mère du jeune homme, diplômée de langues orientales et passionnée par les caractères chinois. Emmanuel visite le pays de Mao dès 12 ans et commence son apprentissage du mandarin, qu'il pratique ensuite avec ses parents. Le retour en France en 2010 n'est pas évident durant cette « période de fin de règne des années Sarkozy » selon le lecteur de Marx qui ne cache pas son penchant politique à gauche.

Il part donc aux États-Unis passer un MBA de général management à Harvard. Une expérience « géniale ! On peut parler à n'importe qui, et avec une adresse email harvard.edu, tout le monde vous répond ».

Il fait un stage chez Prada à New York, mais s'aperçoit assez vite que le luxe et son côté paillettes ne l'intéressaient pas, confie celui qui est aujourd'hui le compagnon d'une actrice sino-américaine.

« J'ai aussi compris que j'avais envie de rester aux États-Unis. En 2012, c'était le début de la startup wave, juste après l'IPO de Facebook [Initial Public Offering, introduction en Bourse, ndlr] », décrit-il.

Une interface pour créer ses logiciels

Après son diplôme, il navigue entre New York, San Francisco et Boston, et trouve un job dans une startup de l'univers mobile. Mais la veille de sa prise de fonction, il rencontre Joshua Haas. « Il avait commencé à travailler sur un moyen de rendre accessible la programmation à tous. On ne se connaissait pas du tout et, cinq ans après, nous sommes toujours ensemble, c'est assez rare dans ce milieu », estime le polytechnicien. Leur concept : créer logiciels et applications à l'aide d'une interface visuelle. « L'analogie que j'utilise, c'est le saut entre MS-DOS et Windows et MacIntosh, qui ont remplacé la ligne de commande par des icônes. N'importe qui pouvait désormais utiliser des ordinateurs sans être des spécialistes. Nous proposons la même chose pour programmer les machines », décrypte le diplômé d'Harvard. Mais il y a un truc : les équipes de Bubble ont déjà précodés les briques élémentaires. « Ça fait cinq ans qu'on travaille dessus. On a commencé à gagner de l'argent en 2014. Nous n'avons pas levé de fonds car je préfère utiliser mon énergie à créer quelque chose plutôt que d'essayer de séduire des investisseurs », précise Emmanuel Straschnov.

Les clients sont principalement des startups, comme la marketplace française Comet, qui, grâce à Bubble, a pu éviter d'embaucher des ingénieurs très coûteux. Le business model est celui du Saas (logiciel en tant que service) : l'accès au logiciel est gratuit mais pour en utiliser toutes les fonctions, il faut payer un abonnement (14 à 445 dollars par mois). Bubble recense sur sa plateforme 120 000 utilisateurs, dont 1 500 entreprises payantes.

« De nos jours, n'importe quelle société qui se crée doit être en ligne. Or, la plupart sont devenues de fait des entreprises de logiciels, avec des ingénieurs. Le prochain Airbnb n'aura pas besoin de programmeurs car Bubble n'est pas plus compliqué à utiliser que Microsoft Office. Je veux redéfinir la façon dont les gens programment les ordinateurs », proclame Emmanuel Straschnov. S'il respecte sa promesse, l'univers informatique s'en trouvera radicalement changé.

1983 Naît à Paris.

2000 Décroche son bac S.

2000-2002 Classe préparatoire à Louis-le-Grand.

2003 Entre à Polytechnique.

2006 Intègre le corps des Ponts.

2007-2010 Part en Chine pour Roland Berger.

2010-2012 MBA à Harvard.

2012 Co-fonde Bubble avec l'américain Joshua Haas.

2014 Gagne ses premiers clients.

2017 Rentable avec un CA d'1 million d'euros.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 30
à écrit le 14/03/2018 à 7:57
Signaler
Bravo a ce jeune homme tres ambitieux. Meme s'il vend du vent, il a reussi a s'extirper de France, pays condamne a rester a la traine. Il vit ses reves, d'autres revent leurs vies. J'entends deja les critiques,....

le 14/03/2018 à 18:01
Signaler
Cet homme ne vend pas du vent mais changer la logique même de l'informatique de puis 60 avec les langages c.c++, java et autres n'est pas si simple car tout est "question de code" dans le monde de l'informatique et des réseaux informatiques. Simplif...

à écrit le 12/03/2018 à 21:59
Signaler
Comme ça a déjà été signalé, la programmation accessible à tous, ça existe déjà et c'est plus vraiment tout neuf. Ensuite les "sites web et applis mobiles", ça n'est pas vraiment l'alpha et l'oméga de l'industrie logiciel (comparé à l'automobile, l'i...

à écrit le 12/03/2018 à 12:16
Signaler
J'utilisais un logiciel qui permettait de faire des interfaces visuelles sans aucune ligne de code. Mais avec "la révolution web" cela est devenu ringard, il fallait tout faire en ligne de commande et à la main. Ce que semble redécouvrir Emmanuel, c'...

à écrit le 12/03/2018 à 9:37
Signaler
Ça n’a rien de nouveau, et c’est toujours du codage... Même si cela se fait visuellement c’est exactement le même principe. Et d’ailleurs tous les bons outils de conception d’une application ont des éditeurs graphiques... Bref un article inutile s...

à écrit le 06/03/2018 à 15:08
Signaler
L'idée est géniale, ce qui est un fait c'est que cet X comme beaucoup de Bac ++++ quittent la France et trouvent facilement aux USA des fonds, alors qu'en France.......

le 06/03/2018 à 17:09
Signaler
la France n'aime que les mendiants, cela lui permet de régner en Maître. La formule consacrée "ils viendront me manger dans la main !" Un disciple de Marx qui aime la vie aux USA ?! cela n'en fait pas moins un schizophrène.

à écrit le 05/03/2018 à 19:30
Signaler
"L'analogie que j'utilise, c'est le saut entre MS-DOS et Windows et MacIntosh". Simple phrase, qui suffit à discréditer tout le discours... L'analogie qu'on pourrait faire à son endroit, c'est celle d'un perroquet...

à écrit le 05/03/2018 à 9:49
Signaler
Belle cohérence intellectuelle: je suis de gauche et je préfère vivre dans le pays du capitalisme débridé.

à écrit le 05/03/2018 à 9:37
Signaler
L'idée n'est pas nouvelle. Le premier codage de programmation d'un ordinateur est le langage machine qui pourraient être comparés aux phonèmes humains. Puis viennent des langages de plus en plus construits : l'assembleur (comparable aux mots), les la...

le 11/03/2018 à 17:44
Signaler
Exact. De même qu'il existe de longue date des programmes créant eux-mêmes du code en langage évolué (quel qu'il soit, de Perl à C ou C++ en passant par Java) destiné à programmer graphiquement n'importe quelle tâche (du simple menu déroulant au desi...

à écrit le 05/03/2018 à 1:49
Signaler
Les géants de la silicone vallée s'y sont déjà cassés les dents, il va pondre comme cela existe déjà un outil lourdo et peu évolutif. Les naifs vont claquer leur fric chez lui comme chez wix et jimdo et quand ils auront compris l'arnaque ils iront vo...

le 06/03/2018 à 20:01
Signaler
Absolument d'accord.. son analogie le reflète bien d’ailleurs .. windows permet un accès limité au potentiel d'un ordinateur ... la seule chose qui pourrait être faites pour remplacer concrètement un dev ... c'est une intelligence artificielle qui pr...

à écrit le 04/03/2018 à 19:47
Signaler
Pas sur pour du développement bas niveau. Produire un micro noyau en embarque avec autre chose que du C et de l'assembleur parait complique. Tout est question du niveau d'abstraction, ok pour utiliser des outils automatises pour de l'applicatif mais ...

à écrit le 04/03/2018 à 19:39
Signaler
j'oubliais! lire marx, c'est bien, apres faut pas oublier de lire lenine, polpot et hitler........ plein de gens petris d'humanite et dont on a vue les resultats que tout le monde espere voir un jour se repeter avec envie!!! pas vrai? en plus ca a u...

le 06/03/2018 à 15:15
Signaler
T'as raison. Il faut lire tous ces penseurs, dont certains ont été des acteurs, ainsi si tu as un peu de jugeotte, tu peux étudier ce qui était bien, ce qui était mal et ce qui a fonctionné, pas forcément bien, nais efficace. Lire Mein Kampf c'est co...

à écrit le 04/03/2018 à 19:36
Signaler
entre faciliter le codage et le supprimer, y a un monde....... le simplifier, c'est genial ( suffit de penser aux langages qui ont supprimer l'obligation de gerer des pointeurs, ou qui permettent a tout un chacun de faire des operations de calcul san...

à écrit le 04/03/2018 à 17:20
Signaler
La simplification du codage existe déjà à travers d'autres logiciels. Mais ils n'ont jamais percés pour 3 raisons : ils ne permettent que de faire des logiciels simples (Vous n'utilisez que les briques existantes mises en place par des vrais codeurs ...

à écrit le 04/03/2018 à 13:35
Signaler
" J'ai aussi compris que j'avais envie de rester aux États-Unis." Cela me rend triste que la France forme des élites de Gauche, de véritables talents, qui votent à Gauche en France et partent s'exiler dans le pays le plus capitaliste de la planète. ...

le 11/03/2018 à 13:23
Signaler
La vraie question est : "pourquoi un chercheur brillant s'exile" et voilà les réponses : - parce que les recrutements sont notoirement insuffisants en France. De mon côté, je ne prends plus de doctorant sauf s'ils ont un autre métier, une fortune pe...

à écrit le 04/03/2018 à 12:59
Signaler
Ça fait bien de dire de gauche ....! Mais on oublies de rajouter caviar ....!

à écrit le 04/03/2018 à 12:28
Signaler
On passe plus de temps à nous parler du CV du type que de la boite en elle -même ... qui ne fait que 1 million d'euro en 2017 ... probablement la somme qu'on devrait faire payer à cet individu pour rembourser le coût réel de sa formation... payée par...

à écrit le 04/03/2018 à 12:21
Signaler
Really new.....: https://en.wikipedia.org/wiki/DRAKON https://scratch.mit.edu http://www.ni.com/fr-fr/shop/labview.html et il y en a d'autres.... Ne pas oublier que pour coder, il faut penser. On peut remplacer le stylo par une machine à écrire,...

à écrit le 04/03/2018 à 12:01
Signaler
une page sans «  code » Une sorte de nouvelle norme , qui déresponsabilise en cas «  de piratage » les créateurs - développeurs ? Obligé , il y a un cadre et un «  code » C’est du «  marketting » ce projet. C’est un «  projet » pour rassurer l’op...

à écrit le 04/03/2018 à 11:57
Signaler
Tout cela existe déjà et depuis longtemps,le titre est complètement à côté de la plaque, toute la question est de savoir si la solution proposée est plus efficace et polyvalente que les autres.

le 04/03/2018 à 13:27
Signaler
Exacte ! J'ai développé il y a 25 ans des applications sophistiquées pour une multinationale avec un atelier de génie logiciel sans saisir une seule ligne de code, et donc sans bugs. Les outils actuels date des années 1970 (Langage C, Unix...) et ne ...

à écrit le 04/03/2018 à 11:25
Signaler
En effet Macron mise beaucoup sur l'encodage pour faire des emplois, même si on voit bien que générer des emplois n'est pas son but, alors que l'encodage est le nouveau travail à la chaine, la plupart qui en font le faisant pour des raisons alimentai...

le 04/03/2018 à 11:54
Signaler
Vous confondez codage et encodage, et croyez-moi quand on utilise une interface de programmation simplifiée, ça reste du codage. Donc non, tout ça ne va pas disparaître et restera de toutefaçon de l'ordre de la haute qualification donc pas des emploi...

le 04/03/2018 à 18:39
Signaler
C'est vrai c'est bien du codage, ben ça alors vous racontez pas n'importe quoi, incroyable... "Même si c'est sûr que le numérique ne va offrir des emplois que pour une élite" Donc vous êtes d'accord sinon sur l'ensemble de mon commentaire, le...

le 05/03/2018 à 9:04
Signaler
" si on vous suit, il faut revenir au cartes perforees......." comem d'habitude je lis votre première phrase qui n'est souvent que l'expression de votre névrose et je ne lis pas le reste ne méritant que signalement forcément. Apprenez à écrir...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.