Thibault Jarrousse et sa D-Vine, vainqueur au CES de Las Vegas

Avec sa D-Vine, 10-vins vient de remporter le prix de la meilleure startup au Consumer Electronics Show de Las Vegas. Zoom sur Thibault Jarousse, l'initiateur de cette nouvelle manière de consommer le vin.

Ce soir-là, dans le concept-store de 10-Vins ouvert en fin d'année 2014 sur l'île de Nantes, Thibault Jarrousse a le sourire. Celui d'un père comblé et soulagé. À quelques jours de la présentation officielle aux côtés du sommelier Philippe Faure-Brac, il tient entre ses mains, l'ultime et première version de la D-Vine, inspirée de la fameuse « Nespresso ». Il aura fallu une bonne dose de ténacité et pas moins d'une quinzaine de prototypes pour accoucher d'une machine capable de servir un verre de vin, blanc ou rouge, à la température adéquate, aéré comme s'il avait été carafé pendant trois heures. Cela en moins d'une minute. Et à domicile. La solution est inédite. Et c'est bien ce qui explique la complexité d'un projet qui aura nécessité cinq années de recherche, deux campagnes de financement participatif, de la sueur, du sang froid et des nuits agitées.

Une solution pour conserver du vin sans cave

« On répond à une tendance de fond du marché de l'alimentaire. La vente en portion connaît un réel engouement. On l'a vu dans le café avec les dosettes, l'eau gazeuse ou la cuisine, les gens veulent une qualité professionnelle à la maison. Or, dans le vin, rien n'existait. Alors on s'est dit, si ce n'est pas en France qu'on le fait !.. » raconte Thibault Jarrousse.

Ingénieur, diplômé de l'Institut catholique d'Arts et Métiers à Nantes, il a fait ses armes au sein du groupe de cosmétiques Yves Rocher où il pilote des opérations industrielles au Mexique, au Canada... réorganise des filiales en Espagne, au Portugal, en Belgique et entre au comité de direction de la centrale de distribution. C'est là qu'il côtoie Jérôme Pasquier, manager de la chaîne logistique. Tous deux sont amateurs de vins.

« Or, il manquait un truc pour les gens non experts qui aiment le vin. Ceux qui vivent à Paris n'ont pas la place d'avoir une cave. Dans une soirée, on n'a pas, non plus, tous envie de boire le même vin... » argumente Thibault Jarrousse, 35 ans.

Bientôt, il est rejoint par Luis Da Silva, son ami d'enfance, ingénieur à Airbus. C'est lui qui va mettre les mains dans le moteur.

« En 2010, c'était un peu le forfait soirs et week-ends », se souvient Thierry Jarousse qui perfectionne ses compétences et étoffe son réseau en s'engageant dans un MBA à temps partagé à HEC.

En plein dans la crise, le trio d'ingénieurs sent qu'il faut faire bouger les lignes. Soudée, l'équipe se complète à merveille. Pragmatique, Luis prend en charge la partie technique. Fort d'un relationnel évident, Jérôme s'attaque au marketing et au commercial. Thibault, qui dans son for intérieur, ambitionnait de créer son entreprise, se charge de l'exécution, des finances et de la communication administrative. 10-Vins est officiellement créé deux mois plus tard.

En attendant une mise au point complexe et coûteuse de la machine, le trio compose une carte d'une trentaine de vins (Bourgogne, Rhône, Provence, Loire, Bordeaux, Languedoc...), commercialisés sous la forme de flacon de 10 cl. Le concept du vin au verre s'installe. Signe encourageant, la profession viticole se montre plutôt ouverte à ce nouveau service. Il faut dire que les fondateurs ont fait en sorte de mettre toutes les chances de leur côté. Dès le départ, ils s'entourent des conseils de l'oenologue nantaise Béatrice Dominé et mettent en place un comité de sélection des vins.

« On a retenu en moyenne un vin sur dix. Résultat, aujourd'hui, pas une semaine ne passe sans qu'un viticulteur ou un château ne nous appelle pour travailler ensemble », observe-t-il.

Chaque flacon est doté d'une puce RFID lisible par les smartphones, et qui ouvre de multiples perspectives de communication. En une minute, une vidéo présente le viticulteur et son domaine. L'oenologue détaille le vin, son nez, ses arômes, sa robe, les accords mets et vins, etc.

10-vins séduit rapidement 4.000 passionnés

« On peut perdre jusqu'à 50 % de la qualité du vin, s'il n'est pas carafé et pas à la bonne température », rappelle Thibault Jarrousse. Pour trancher la question, le trio décide de lancer une campagne de financement participatif sur Ulule pour payer la préfabrication. « Il nous fallait 15.000 euros en quatre semaines ; on a récolté 40.000 euros auprès de 180 contributeurs. »

À partir de là, la R & D et les prototypes vont s'accélérer pour résoudre l'équation d'une descente en température en moins d'une minute sans altération du vin. L'Icam et l'École centrale de Nantes sont sollicités.

« On a beaucoup travaillé sur la mécanique des fluides », précise Luis Da Silva.

L'appareil étant trop volumineux, son design doit être repensé. Et puisque l'opération de précommande a bien fonctionné, pourquoi ne pas la reproduire pour lancer l'industrialisation ? Ce sera la mission de Proximea, filiale de la Banque populaire Atlantique, qui va orchestrer une levée de fonds de 850.000 euros en juin 2015. Soixante investisseurs amènent de 2.000 à 200.000 euros, et deviennent actionnaires au gré d'un subtil montage, ficelé par Proximea. Soutenu par Bpifrance et des banques (CIC, BPA, BNP), l'investissement global atteint 1,3 million d'euros.

L'industrialisation de la D-Vine est lancée pour une série de 500 pièces. Conçue, fabriquée et assemblée en France, elle réunit une trentaine de fournisseurs de la région. Les premiers appareils ont été livrés mi-novembre. « Une vraie aventure industrielle et un gros challenge technologique », reconnaît le dirigeant de 10-vins, invité parmi les 20 startups de la French Tech lors du Consumer Electronics Show de Las Vegas en début d'année. Un événement mondial de l'électronique grand public où 10-Vins a finalement décroché le prix de la meilleure startup. Un divin rendez-vous.

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MODE D'EMPLOI

Où le rencontrer ? Sur la route des vins, dans le concept-store de Nantes ou la salle d'exposition de Paris.

Comment l'aborder ? Par courriel : [email protected]

À éviter ! Donner un avis sans avoir testé le concept ! Et d'autant plus que les démonstrations sont gratuites, à Paris et à Nantes, en adressant la demande à : [email protected]

TIME LINE

  • 1981 Naît le 15 janvier à Nantes.
  • 1999 Icam Nantes.
  • 2004-2010 Groupe Yves Rocher.
  • 2012 Création de 10-Vins.
  • 2014 Premier démonstrateur fonctionnel. Campagne de crowdfunding sur Ulule (40.000 euros). Ouverture d'un concept-store à Nantes. Levée de 1 million d'euros.
  • 2015 La campagne de crowdfunding rapporte 850.000 euros. Industrialisation et commercialisation de la D-Vine.
  • 2016 Projet d'ouverture d'un corner à Paris et à Londres.

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Commentaire 1
à écrit le 30/01/2016 à 8:26
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bel encart publicitaire ; reconnaissez qu'il est quand meme difficile d'y croire ? non ? ceci dit comme vous le mentionnez : il ne faut pas commenter avant d'avoir vu la demonstration et goutté; quand à tester ?? avez vous notion des prix ??

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