Escroquerie financière : les réseaux sociaux au cœur du mode opératoire des délinquants

Les escroqueries en ligne ont été multipliées avec la crise sanitaire et les délinquants ont dérobé 500 millions d'euros au cours de l'année 2021. Lors d'une conférence de presse, quatre autorités publiques (le Parquet, l'AMF, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et la DGCCRF) ont alerté sur la recrudescence des offres frauduleuses sur les réseaux sociaux, qui constituent désormais une porte d'entrée privilégiée pour les escrocs. Dans le viseur des délinquants: un public jeune, d'origine souvent plus modeste que la cible traditionnelle des arnaques au placement.
Les délinquants attirent leurs victimes avec des bannières publicitaires sur Internet, sur les réseaux sociaux, des applications mobiles de messagerie, des sites d'information réputés ou par mail.
Les délinquants attirent leurs victimes avec des bannières publicitaires sur Internet, sur les réseaux sociaux, des applications mobiles de messagerie, des sites d'information réputés ou par mail. (Crédits : Pixabay / CC)

Dans un contexte de crise sanitaire et de taux d'intérêt bas, les offres frauduleuses de placements et de services financiers (investissement, épargne, crédit) battent leur plein. À l'occasion d'une conférence de presse commune, le Parquet, l'Autorité des marchés financiers (AMF), l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), ont fait le point sur l'évolution de ce phénomène.

Principal enseignement : les réseaux sociaux constituent désormais « un nouveau point d'entrée pour les escroqueries financières » qui ciblent des victimes plutôt jeunes et modestes, particulièrement dans le domaine du trading, comme l'ont relevé lundi les quatre autorités concernées par cette délinquance en ligne.

500 millions d'euros dérobés en 2021

Concrètement, dans un environnement marqué par des taux d'intérêt bas, les épargnants sont attirés par des placements "alternatifs" qui rapporteraient davantage que les produits financiers classiques.

Selon les autorités concernées, « les escroqueries financières visent un large spectre de faits frauduleux et un vaste public, qu'il s'agisse de fausses offres sur des produits financiers du quotidien, comme celles de rachat de crédit à la consommation (chaudière, panneaux solaires...), de propositions fictives d'investissement dans des places de parking ou des chambres d'Ehpad...».

D'après le Parquet de Paris, le nombre de procédures liées à ces actes de délinquance financière est resté relativement stable cette année, mais certaines procédures regroupent en revanche un nombre important de victimes (plusieurs centaines).

Au total, le Parquet évalue le préjudice pour les victimes d'escroquerie financière en France à « environ 500 millions d'euros pour l'année 2021 ». Le phénomène n'a donc pas diminué par rapport aux précédentes estimations, puisque, selon les données communiquées par l'AMF, les actes d'escroqueries financières ont causé « plus d'un milliard d'euros de pertes sur deux ans sur la période 2017-2019 », soit un montant annuel identique à celui pour l'année 2021, à savoir 500 millions d'euros par an environ.

Plus spécifiquement, sur le trading au Forex, le marché non régulé des devises, et sur les "crypto-actifs", les escroqueries ont fortement repris en 2020 et en 2021, alors qu'elles avaient connu une certaine accalmie pendant deux ans. Conséquence ? Des préjudices importants, de l'ordre de 38.000 et 20.000 euros par épargnant respectivement, selon les déclarations des victimes auprès de l'AMF.

Concernant les fausses offres d'investissement dans des places de parking d'aéroport ou dans des chambres d'Ehpad, elles ont généré des pertes plus élevées encore, de plus de 50.000 euros et 70.000 euros respectivement.

Enfin, les escroqueries aux livrets et aux crédits se sont quant à elle intensifiées ces deux dernières années, causant des pertes élevées, allant de 72.000 euros en moyenne par victime concernant les livrets d'épargne à 12.000 euros concernant les crédits pour les dossiers signalés à l'ACPR en 2021.

Les réseaux sociaux, nouveau point d'entrée aux escroqueries

« Les réseaux sociaux et les influenceurs sont le nouveau point d'entrée apparu ces dernières années », ont averti à l'unisson le ministère de la Justice, les gendarmes des banques (ACPR) et des marchés financiers (AMF), ainsi que la DGCCRF.

Et les délinquants ont recours à un mode opératoire bien particulier : ils attirent leurs victimes avec des bannières publicitaires sur Internet, sur les réseaux sociaux, des applications mobiles de messagerie, des sites d'information réputés ou par mail. « Ils collectent les données personnelles des internautes ayant cliqué sur la bannière par la voie d'un formulaire de contact en ligne », notent les quatre autorités compétentes. De faux conseillers, décrits comme professionnels, disponibles et empathiques, contactent ensuite par téléphone les futures victimes et les mettent en confiance, par un discours manipulatoire et des relances insistantes.

« Puis, après un premier investissement modeste présenté comme gagnant et parfois un premier retrait, l'épargnant, désormais en confiance, est incité à placer beaucoup plus. Lorsqu'il souhaite récupérer son argent, il n'a brutalement plus de réponse à ses mails ou ses appels, ni ne peut accéder à son compte ou à ses fonds », détaillent les autorités.

Plusieurs dossiers traités récemment par la DGCCRF confirment la montée inquiétante des pratiques commerciales trompeuses en ligne dans le domaine des services financiers, notamment de la part d'influenceurs.

L'arnaque financière, « c'est une délinquance que nos modes de communication favorise », c'est un « recours de plus en plus accru à internet », assure Laure Beccuau, procureure de la République de Paris.

Les nouvelles cibles : un public plus jeune, de milieu plus modeste

Ainsi, les réseaux sociaux et les influenceurs sont le nouveau point d'entrée apparu ces dernières années.

« C'est un public jeune, de milieu plus modeste que la cible traditionnelle des arnaques au placement, qui est désormais touché, en particulier dans le domaine du trading (Forex et cryptomonnaies) », ont souligné les quatre autorités compétentes.

« On confie, sans véritablement désormais se poser la question, de multiples données de notre vie privée -et nos économies font partie de ces données-, mais on les adresse à des inconnus jamais rencontrés, dont la seule légitimité est un site qui inspire la confiance, qui semble être un gage de sérieux », a poursuivi la procureure de la République de Paris.

Pour y pallier, l'ACPR et l'AMF entendent renforcer leurs dispositifs de détection des offres frauduleuses en amont, et alerter ainsi au maximum le public et les professionnels. En parallèle, les deux autorités mettent à jour leurs listes noires d'acteurs non autorisés. Et preuve supplémentaire que les arnaques battent leur plein, le nombre de sites inscrits sur les cinq listes noires recensées sur leur site commun avec la Banque de France, dénommé Assurance Banque Epargne (Abe) Info Service, « a triplé depuis fin 2019 ».

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Commentaires 2
à écrit le 15/12/2021 à 10:13
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Les "méchants".

à écrit le 15/12/2021 à 0:10
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500 millions, c'est sous estimer ou ne pas prendre en compte, le projet Hercule et les prix d'achat des vaccins Pfizer...

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