L'OCDE tacle la délinquance en col blanc

Juristes, comptables, établissements financiers...dans un récent rapport, l'OCDE s'attaque à l'ensemble des intermédiaires qui facilitent la fraude fiscale et la corruption à l'échelle de la planète.
Grégoire Normand
Le cabinet Mossack Fonseca a été épinglé dans l'affaire des Panama Papers.
Le cabinet Mossack Fonseca a été épinglé dans l'affaire des Panama Papers. (Crédits : Carlos Jasso)

Corruption, pots de vin, argent sale...dans son dernier rapport dévoilé ce jeudi 25 février, l'OCDE brosse le portrait clinique des intermédiaires financiers qui jouent un rôle prépondérant dans la fraude fiscale. Le scandale des Panama Papers avait jeté une lumière crue sur le cabinet d'avocats Mossak Fonseka dont les fondateurs sont actuellement visés par un mandat d'arrêt international. Plus récemment, l'affaire des LuxLeaks a rappelé que malgré des avancées, le Luxembourg demeure un paradis fiscal de premier ordre au coeur de l'Europe et des transactions financières mondiales. Pour tenter de freiner les pratiques frauduleuses de ces intermédiaires, l'OCDE formule quelques recommandations à destination des Etats et des autorités fiscales.

« Le petit groupe de spécialistes qui contribuent à l'exécution et (ou) à la dissimulation des délits de cette nature ne mettent pas seulement en péril la règle de droit, mais font du tort à leur propre profession, à la confiance du public envers le système juridique et financier, et à l'uniformité de traitement entre les contribuables respectueux des règles et ceux qui les bafouent. À terme, c'est l'intérêt général que présentent les recettes fiscales et leur disponibilité à des fins publiques qui est compromis » informe le rapport intitulé « En finir avec les montages financiers abusifs : Réprimer les intermédiaires qui favorisent les délits fiscaux et la criminalité en col blanc ».

> Lire aussi : « Luxleaks » : le rôle toujours plus important du Luxembourg dans l'évitement fiscal

Des connaissances pointues sur la fiscalité

Il n'existe pas à proprement parler de définition universelle pour les intermédiaires financiers. Chaque pays a sa propre approche de ce type de structure. Dans leur dossier, les auteurs soulignent néanmoins des caractéristiques communes dans la plupart des pays étudiés. Il s'agit de personne physique ou morale qui possède :

  • des qualifications ou une formation professionnelles ;
  • une connaissance pointue des procédures fiscales, juridiques ou financières ;
  • une expérience du montage de structures fiscales, ou de structures comportant des éléments transnationaux ;
  • une expérience du montage de structures opaques pour éviter que les activités fiscales et économiques de leurs clients ne fassent l'objet de contrôles.

« Ce rapport veut mettre la lumière sur cette absence de définition commune. Il est nécessaire d'avoir des concepts communs. Tous les pays doivent appréhender les risques qui existent et mettre en oeuvre une législation plus précise. Ce document peut permettre aux Etats d'observer les définitions existantes dans les autres pays » explique Grace Perez-Navarro, directrice adjointe du Centre de politique et d'administration fiscales de l'OCDE interrogée par La Tribune.

Des stratégies toujours plus élaborées

Ces intermédiaires élaborent des stratégies toujours plus élaborées pour échapper aux services fiscaux et aux enquêteurs. Comme le rappellent les auteurs du rapport, la mise en oeuvre de dispositifs facilitant la création d'entreprise peut favoriser les pratiques frauduleuses. La multiplication des sociétés écrans et des entreprises « de façade » sont les exemples les plus flagrants de cette délinquance.

« Si la rapidité des formalités d'immatriculation a souvent pour objectif d'alléger la charge induite par le respect des obligations réglementaires pour les propriétaires d'entreprises légitimes et de stimuler la croissance économique nationale, elle peut aussi exposer le système à des actes illicites. Quand il est possible de créer rapidement une entreprise, les criminels n'ont pas besoin d'infiltrer des entreprises établies », indique le rapport.

« Les personnes qui veulent échapper aux impôts utilisent ces entreprises dans les paradis fiscaux ou des banques à l'étranger. Pour faciliter ces pratiques, ils ont recours à ces intermédiaires pour créer des sociétés. Les personnes qui veulent échapper à l'impôt ne connaissent pas forcément les modalités pour créer des sociétés à l'étranger donc il faut utiliser des intermédiaires. C'est la complexité des affaires qui permet d'occulter la fraude fiscale, les intermédiaires jouent un rôle important pour mettre en place cette complexité. C'est la complexité des affaires financières qui peut favoriser ces pratiques » ajoute Grace Perez-Navarro.

La pandémie pourrait augmenter les risques de fraude

Depuis le début de la pandémie, la plupart des Etats et des Banques centrales ont mis en place des vastes plans de soutien et des politiques monétaires ultra accommodantes pour protéger le tissu économique et permettre aux intermédiaires financiers d'injecter des liquidités. Selon l'institution internationale basée à Paris, cette période pourrait être propice à l'apparition de nouvelles menaces.

« Dans le sillage de la pandémie du COVID-19, de nouveaux risques continuent de surgir, comme la possible intervention d'intermédiaires fiscaux pour favoriser l'accès frauduleux aux financements de soutien, ce qui met en lumière la menace persistante que ces spécialistes représentent pour la société », indique l'organisation mondiale.

Grégoire Normand
Commentaires 10
à écrit le 26/02/2021 à 19:59
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LOL !!! 😂😂😂 le système repose sur la fraude ... et la dette ! Les paradis fiscaux et "l'optimisation" fiscale en sont les outils les plus pointus.

à écrit le 26/02/2021 à 18:19
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Paradis fiscaux?la crypto monnaie, ex.bitcoin, encore un moyen pour échanges en dehors des circuits surveillés. Réseaux maffieux suractifs depuis le covid.

à écrit le 26/02/2021 à 17:00
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Vitrifions le Luxembourg, monaco, andorre, jersey pour l'exemple ! Les autres se tiendront tranquille après ça.

à écrit le 26/02/2021 à 11:21
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Qu'à t on fait depuis au moins 30 ans pour lutter contre les paradis fiscaux ? Rien. Pire, avec l'informatisation, la liberté de circulation des capitaux, la mondialisation en général, le problème s'est aggravé. Il arrivera un jour où ce ne sera plus...

à écrit le 26/02/2021 à 10:19
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Encore un rapport qui va finir dans les limbes.

à écrit le 26/02/2021 à 9:59
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Quand on lit de tels propos, cela donne l'impression qu'ils ne sont pas responsable et que cela ne peut être résolue par la société civile alerté par les médias!

à écrit le 26/02/2021 à 9:08
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L'Europe doit virer le Luxembourg s'il ne change pas sa politique fiscale et interdire toute relation entre les particuliers et les entreprises de ses pays membres avec les autres paradis fiscaux. Voler l'argent public devrait être passible de sanct...

à écrit le 26/02/2021 à 8:47
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TOUT arrive avec des dizaines d'années de retard l'OCDE se réveille que se passe-t-il? c'est devenu trop énorme pour ne pas en parler?!

à écrit le 26/02/2021 à 8:37
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C'est courageux mais le travail est gigantesque tellement tout le milieu financier est plus ou moins concerné, plus ou moins complice, de l'actionnaire milliardaire au petit comptable de PME qui ne fait que conseiller de réduire le "coût du travail"....

à écrit le 26/02/2021 à 8:28
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Le Luxembourg est imprenable. Ses pratiques ne changeront jamais. Cette europe est condamnee a terme pour ce type d'exception accablante pour les peuples.

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