Analyse : Avec le fisc, il vaut toujours mieux prévenir que guérir

Jean Lioussou et Maxime Maeght, notaires chez Michelez et Associés, décortiquent le rescrit fiscal, un dispositif mis en place depuis le 1er janvier dernier.

Nouveauté depuis le 1er janvier 2009 : les contribuables peuvent demander que soit contrôlée une déclaration de succession ou une donation pour se prémunir d'un contrôle ultérieur. L'objectif, selon le gouvernement ? Eviter « des tensions inutiles » à ceux qui auraient mal évalué les biens transmis. Jusqu'alors, l'administration pouvait effectuer un contrôle sur la valeur des biens transmis pendant trois ans après l'année de dépôt des documents auprès de l'administration fiscale (six ans dans certains cas). Et le contribuable était dans l'impossibilité de raccourcir ce délai.

Instauré à titre expérimental du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, ce dispositif, appelé « rescrit fiscal » consiste à demander à l'administration une validation de la valeur vénale des biens donnés ou transmis, dans les trois mois suivant l'enregistrement de l'acte ou de la déclaration. En contrepartie de cette démarche volontaire, le délai de prescription est réduit à un an à compter de la demande. Si des droits supplémentaires (ou des intérêts de retard) sont dus, ils seront calculés sur ce laps de temps. Mieux, en l'absence de réponse dans ce délai, l'administration ne peut plus exercer son droit de reprise : les valeurs du bien sont considérées comme acceptées. Qui ne dit mot consent, en quelque sorte.

Ce mécanisme comporte de nombreux avantages. D'abord, il permet d'éviter un contrôle fiscal lorsque l'on n'a rien à se reprocher. Une erreur d'estimation, commise en toute bonne foi, peut toujours arriver. Ensuite, il a le mérite de figer les valeurs déclarées. Enfin, lors d'un partage familial, il permet aux héritiers de se débarrasser de l'aspect fiscal avant d'envisager la cession ou le partage des biens.

Il existe toutefois plusieurs cas particuliers pour lesquels les garanties du rescrit ne fonctionnent pas. En cas d'abus de droit, ou si des biens ont été omis dans le calcul des droits, bien évidemment. Mais aussi, lorsque une exonération ou un régime de taxation favorable est remise en cause. Lorsque les parts d'une PME n'ont pas été conservées pendant quatre ans dans le cadre d'un pacte Dutreil par exemple ... Dans ces cas de figure, l'administration a le droit de contrôler la donation ou la succession dans les conditions de droit commun. Dans l'absolu, elle pourrait même revenir sur une situation déjà portée à sa connaissance et découvrir un motif de redressement qui aurait pu être retenu lors du premier contrôle.

Autre limite du système : il peut constituer une nouvelle source de tensions entre héritiers ou entre donataires. En effet, la réponse de l'administration fiscale engage tous les héritiers, quand bien même la demande n'est exercée que par l'un ou quelques uns d'entre eux (du moment qu'ils représentent au moins un tiers de l'actif net transmis). Ainsi, un héritier représentant plus du tiers, et s'estimant lésé, pourrait utiliser le principe du rescrit fiscal pour tenter de nuire à ses cohéritiers.

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