La Hongrie plébiscite Viktor Orban

Les électeurs hongrois se sont rendu aux urnes ce dimanche pour renouveler leur parlement. Le parti de Viktor Orban est donné grand vainqueur.
Le premier ministre hongrois Viktor Orban devrait bénéficier à nouveau du soutien des électeurs

Ce dimanche, les Hongrois sont renouvelé leur parlement. Les premières projections ont confirmé les derniers sondages. Le parti Fidesz du premier ministre Viktor Orban aurait recueilli 48 % des voix, contre 52 % lors du dernier scrutin voici 4 ans. L'opposition de centre-gauche obtiendrait 27 % des voix et devancerait largement le parti d'extrême-droite Jobbik qui, aurait cependant glané 18 % des voix, soit le double de son score de 2010. Les Verts libéraux du LMP entrerait au parlement avec 6 % des voix. 

Dirigeant autoritaire, nationaliste et populaire

Le premier ministre devrait donc facilement conserver son poste et sa majorité absolue acquise en 2010. Un doute subsiste encore sur la majorité des deux tiers qui permet de modifier la constitution. Le nouveau système électoral, très favorable à la Fidesz, pourrait encore redonner à Viktor Orban cette importante majorité qui permet de modifier la constitution. Selon les premières projection, le Fidesz emporterait 133 sièges sur 199. L'Europe entière semble se désoler du triomphe de ce chef du gouvernement autoritaire, nationaliste, peu soucieux des admonestations européennes et parfois agissant à la limite du respect des libertés individuelles. Victor Orban a ainsi fait voter en quatre ans une constitution de son crû, il a profondément modifié la législation du pays, a mis aux ordres la banque centrale à ses ordres.

Une opposition à la dérive

Du reste, on se tromperait en pensant que les Hongrois sont ravis du gouvernement actuel. Près de la moitié s'en disent insatisfait. Pour autant, l'opposition a été faible et inexistante. L'absence de programme convaincant, le mauvais choix du leader de l'alliance et les dissensions internes ont eu raison de la coalition d'opposition. Surtout, le gouvernement actuel peut se prévaloir d'un bilan économique à faire rougir non seulement l'opposition, mais plus d'un des donneurs de leçons européens. Et c'est sans doute là une des clés du succès annoncé de Victor Orban.

En 2009, la Hongrie dans les griffes du FMI

Pour comprendre, il faut revenir en arrière. En 2009, la crise commerciale et la fuite des investisseurs vers la qualité fait chuter le forint, la monnaie nationale et l'activité. Les ménages sont étranglés par les prêts contractés en euros ou en francs suisses pour bénéficier de taux plus attractifs. La Hongrie est au bord de la faillite et le gouvernement de centre-gauche fait appel au FMI et à l'UE. Elle est alors, avec la Roumanie et les pays baltes, un laboratoire des plans d'ajustement qui seront imposés en zone euro un an plus tard. Les recettes habituelles sont mises en place : privatisations, coupes dans les dépenses, « réformes structurelles. »

Changement de politique économique

En 2010, Victor Orban arrive au pouvoir. Le changement de politique économique est radical. L'ambition du nouveau gouvernement est de se libérer des griffes du FMI et de continuer à s'appuyer sur la demande intérieure, notamment la consommation. Pas question, donc, de pratiquer l'ajustement proposé par les bailleurs de fonds. A l'époque, nul ne parie un forint sur le succès d'une telle politique.

La volonté de se libérer du FMI

Budapest fixe alors ses priorités. D'abord, se libérer du FMI. Pour cela, tous les moyens sont bons. Il faut nécessairement en passer par une période d'austérité budgétaire et par une hausse de la TVA de 24 à 27 %, mais pour adoucir l'amertume de la pilule, le gouvernement joue sur la fibre nationaliste en taxant les secteurs économiques où règnent les entreprises étrangères, comme la distribution et les banques. Surtout, il met la main sur le fonds de retraite privé de quelques 10 milliards d'euros. Pour s'assurer du succès de sa politique, il modifie la loi sur la banque centrale, réduisant l'indépendance de cette dernière. Il s'agit évidemment pour Viktor Orban de disposer du levier monétaire pour adoucir les effets de l'austérité.

L'Europe et les agences de notation matées

L'UE se fâche alors et menace. Les agences de notations, fin 2011, dégrade la dette de la Hongrie à l'état d'obligation pourrie. Mais Viktor Orban, fort d'un certain soutien populaire et d'un parlement soumis, s'en moque. Il tient tête aux Européens qui, finalement, rentrent dans le rang et le laisse faire. Quant aux agences de notation, il leur oppose le redressement des comptes publics. Alors que tous les analystes prédisaient en 2011 une faillite du pays, le déficit public est revenu sous les 3 % du PIB, la Commission de Bruxelles a dû exclure le pays de la procédure de déficit excessif. Budapest rembourse ses dettes auprès du FMI. Le déficit chronique des comptes courants s'est mué en excédent, plus de 3 % du PIB, tandis que le déficit frôlait les 8 % en 2009. Les agences de notation doivent finalement relever la note du pays. Viktor Orban a gagné le bras de fer avec le FMI, les agences et l'UE. Un coup dur pour une opposition qui apparaît alors comme ceux qui ont cédé devant « l'étranger. »

Relance de la demande

Depuis un an, Viktor Orban se lance alors dans une relance de la demande intérieure. Alors que la banque centrale lance une aide aux PME et baisse ses taux de façon spectaculaire. Entre août 2012 et mars 2014, le taux de refinancement hongrois est passé de 7 % à 2,6 %. La banque centrale s'est lancée parallèlement dans un plan de soutien aux crédits aux PME, une sorte d'assouplissement quantitatif. Le gouvernement a aussi mis en place une réforme fiscale pour réduire l'impôt sur le revenu et des baisses de prix de l'électricité de 20 %. Du coup, en 2013, l'économie hongroise s'est redressée avec des taux de croissance supérieurs à ceux de la zone euro. Au dernier trimestre de l'an passé, le PIB hongrois était supérieur de 2,7 % à celui du dernier trimestre de 2012. Le chômage a reculé de Certes, la plupart des économistes annoncent (encore) l'effondrement de ce système, mais les prévisions promettent une croissance de 2 % pour 2014 au pays, soit le double de la zone euro !

Politique inégalitaire

Cette politique ne fait cependant pas que des heureux. Viktor Orban manie aussi bien, pour parvenir à ses fins le libéralisme le plus sauvage que l'étatisme le plus sévère. Il a mené en 2011 et 2012 une politique d'austérité très douloureuse et sa réforme fiscale, par l'introduction d'une flat tax (un taux d'imposition unique) de 15 %, favorise les plus riches. La pauvreté a progressé en Hongrie entre 2010 et 2013. Mais les victimes de cette politique ne votent pas comme jadis pour le centre-gauche, mais pour le parti d'extrême-droite Jobbik qui a le vent en poupe. Reste que nul ne peut contester que le bilan économique du gouvernement sortant est bien meilleur que celui de l'opposition voici quatre ans. Et qu'il jouera un rôle dans l'issue du scrutin dans un pays traumatisé par la crise de 2009.

 

 

Commentaires 14
à écrit le 07/04/2014 à 15:40
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Beaucoup de parti pris dans cet article, mais mieux ficelé et plus factuel que la plupart des autres qu'on peut lire sur le sujet. Cela dit, parler par exemple de la flat tax comme inégalitaire, c'est gros. Mais il est vrai qu'une flat tax retire to...

à écrit le 07/04/2014 à 11:50
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La politique et la vision de la société hongroise d'Orban c'est apparemment ce que voulait faire Sarkozy en France, la coïncidence c'est qu'ils viennent du même pays, sauf erreur, ou au moins ont des origines géographiques communes. La question est: ...

à écrit le 07/04/2014 à 11:11
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L'Europe et les U.S. seraient ils entrain de préparer une intervention humanitaire pour imposer "les droits de l'homme et la démocratie" à un pays qui a mal voté?

le 07/04/2014 à 16:52
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Non les trolls poutiniens vont le faire revenir dans le droit chemin avec leur propagande anti-europenne et anti-américaine que l'on connait par coeur.

à écrit le 07/04/2014 à 0:37
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Et si la BCE appuyait elle aussi massivement les PME? Les ménages? Et si l'Europe finançait de grands plans d'investissement (déploiement réseaux très hauts débits, industrie spatiale, énergies renouvelables) pour compenser le désendettement des Eta...

à écrit le 06/04/2014 à 23:43
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Bravo aux hongrois d'avoir bien voté , notamment pour des pratiques libérales , qui , elles seules sont de nature à libérer l'économie et créer de la richesse et donc des emplois .. Bravo également pour la flat tax , un impôt juste qui responsabilis...

à écrit le 06/04/2014 à 19:19
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Si au minimum en France nous retrouvions notre souveraineté monétaire et le retour à une Banque de France au service de...la France sous l'impulsion du gouvernement, pour les entreprises et les français, nous accepterions certainement mieux les sacri...

à écrit le 06/04/2014 à 14:51
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Allo, la TRIBUNE ? Censure ou gène aux entournures ? J'aurais du mal à croire que vous seriez subventionnés par l'UE ?

à écrit le 06/04/2014 à 10:30
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ca prouve que la pensee unique dictee par bruxelles et le fmi n'est pas la seule,certes,ce n'est pas parfait,mais en grece ou chypre,c'est pire,a ce que je constate,les 2 seuls pays en difficultes pendant la crise,l'islande et la hongrie ,qui ont cho...

le 06/04/2014 à 11:09
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Je dirais même que ça prouve que la pensée unique de Bruxelles, du FMI et de nos "élites" françaises, est dans l'impasse. La France malade a besoin exactement du même traitement que la Hongrie, mais pour cela il faut sortir de l'Euro. La Hongrie a eu...

le 06/04/2014 à 12:00
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@ Micow : si la Hongrie s'est redressée c'est justement à cause de l'Europe et de l'euro et du différentiel de valeur comme des échanges détaxés avec l'Europe, sans barrières respectives !! Si tout le monde sort de l'euro et met des barrières douaniè...

le 06/04/2014 à 12:00
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@ Micow : si la Hongrie s'est redressée c'est justement à cause de l'Europe et de l'euro et du différentiel de valeur comme des échanges détaxés avec l'Europe, sans barrières respectives !! Si tout le monde sort de l'euro et met des barrières douaniè...

le 06/04/2014 à 14:48
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@Mayonnaise C'est clair que ce n'est pas la faute de l'attelage monétaire de l'UE si un yorkshire anglais, un berger allemand, un épagneul français, un chien d'eau espagnol, etc ne réussissent pas à avancer au même pas...

le 06/04/2014 à 19:27
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@Mayonnaise Le problème ce sont justement les capitaux externes et le intérêts que nous leur payons qui sont le problème. La France dans une Europe dominée par l'Allemagne qui veut un Euro fort ne peut pas s'en sortir. Force est de constater que qua...

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