François Fillon "doit faire de la pédagogie" pour "expliquer la cohérence de son projet", insistait fin décembre Jean-François Lamour, président de la commission nationale d'investiture de la campagne du candidat de la droite sur Europe 1. Et il devrait commencer par ses propres troupes.
Interrogé au micro de RTL ce vendredi matin, le député-maire de Tourcoing, Gérald Darmanin, s'est pris les pieds dans le tapis au sujet de la rémunération des fonctionnaires. "Il est bien précisé [dans le livre Faire de François Fillon publié en 2015, ndlr] que ceux qui travailleront 39 heures seront payés 39", a-t-il affirmé. L'élu du Nord s'est quelque peu repris par la suite, expliquant que les fonctionnaires auront droit à des revalorisation salariales, "soit payées par les heures supplémentaires", "soit par une revalorisation de carrière".
Moins d'une heure plus tard sur Franceinfo, le député-maire de Chantilly, Eric Woerth, a concédé qu'"il y aura une augmentation des salaires et des traitements des fonctionnaires", mais a été très clair : "Non, ça ne peut pas être 39 heures payées 39, il faut évidemment l'assumer."
Une revalorisation salariale en échange d'une hausse du temps de travail
Pour éclaircir la question, il faut remonter au "grand débat" du 24 novembre (48'23'' sur la vidéo), entre les deux candidats du second tour de la primaire de la droite et du centre. À cette occasion, Alain Juppé avait frontalement posé la question à son adversaire sur la rémunération des fonctionnaires en fonction de leur temps de travail.
François Fillon avait indiqué son intention de les faire passer aux 39 heures. "Ça ne peut se faire que dans le cadre d'un accord, une négociation. Cette négociation doit porter sur une contrepartie de l'augmentation du temps de travail", avait-il expliqué. Une proposition inscrite dans son projet, disponible sur son site Fillon2017.fr, où il précise vouloir "réaffecter une partie des économies réalisées [sur la dépenses publique] à la revalorisation salariale [des fonctionnaires]. Dans la gestion des carrières, le mérite de chacun sera récompensé."
"Quand on est passé de 39 à 35 heures on n'a pas diminué les salaires"
François Fillon veut ainsi revaloriser les conditions de travail, mais chaque heure travaillée sera-t-elle payée ? La réponse est de nouveau donnée lors du débat de l'entre-deux-tours de la primaire.
Reprenant l'exemple de l'entreprise Smart (Lorraine) "où les salariés, à la majorité, ont décidé de travailler 39 heures payées 37", le député de Paris avait estimé que : "D'une certaine manière je trouve que l'Etat est un peu dans une situation identique. Il est en grande difficulté, il faut que tout le monde fasse un petit effort."
Dans cette configuration, les fonctionnaires travailleraient 39 heures, mais pas payées 39 heures, "ce n'est pas juste" lui avait rétorqué Alain Juppé. François Fillon avait pour sa part rappelé que : "Quand on est passé de 39 à 35 heures on n'a pas diminué les salaires au passage. Il y a un espace de négociation possible."
"Par exemple à l'hôpital, aujourd'hui, une négociation sur l'augmentation du temps de travail, en échange d'améliorations des conditions de travail et des perspectives de carrière, je dis pas que c'est facile, mais c'est possible", avait conclu le député de Paris.
Les compensations de la hausse du temps de travail restent donc floues. De ce point de vue, Eric Woerth maîtrise les propositions de son candidat. Quant à Gérald Darmanin, il devra réviser son "petit Fillon illustré", comme il l'appelle, avant sa prochaine intervention médiatique.