Google défie Pékin sur la censure

cite>Google a choisi d'entrer dans un rapport de force avec Pékin. Fatigué de la censure que les autorités chinoises lui imposent, furieux d'une série d'attaques informatiques imputées à des intérêts chinois, le géant de la recherche Internet a fait savoir mercredi qu'il étudiait ni plus ni moins un éventuel retrait du pays.Dans une note postée sur le blog de l'entreprise, Google a révélé avoir été la cible, à l'instar de vingt autres grandes entreprises opérant dans des secteurs variés, d'une attaque informatique « hautement sophistiquée » venue de Chine, qui visait son infrastructure et avait entraîné un vol de propriété intellectuelle. Le groupe a ajouté avoir des éléments prouvant que l'objectif principal des attaquants, qui ne seraient pas parvenus à leurs fins, était d'accéder aux comptes de messagerie Gmail de militants chinois des droits de l'homme.Dans sa spectaculaire charge contre le gouvernement chinois, Google a également mis en cause la censure en vigueur dans le pays et dit ne plus vouloir s'y contraindre. « Nous avons décidé que nous ne voulons plus censurer nos résultats sur google.cn, et au cours des prochaines semaines, nous allons discuter avec le gouvernement chinois de la possibilité de faire fonctionner, dans le cadre de la loi, un moteur de recherche sans filtre », a déclaré David Drummond, chef du département juridique de Google. « Ces attaques et la surveillance qu'elles ont révélée, combinées aux tentatives de restreindre la liberté d'expression sur le Net, nous ont conduits à la conclusion que nous devions réexaminer la possibilité de nos activités commerciales en Chine. [?] Nous comprenons que cela pourrait signifier de fermer Google.cn et nos bureaux en Chine », a ajouté le dirigeant.Face à cette mise en cause sans précédent, Pékin est resté à peu près mutique. Seule réaction officielle, un représentant du gouvernement a pudiquement déclaré à l'agence Chine Nouvelle « chercher à en savoir plus sur la déclaration de Google ». Fait rare, le message de Google, dont le PDG, Eric Schmidt, avait conseillé Barack Obama pendant sa campagne, a été relayé par la chef de la diplomatie américaine, Hillary Clinton, qui a exprimé de « sérieuses inquiétudes » sur ces attaques et dit « attendre du gouvernement chinois une explication ».Depuis son arrivée en Chine, en 2006, Google a dû comme tout un chacun se plier aux règles imposées par le pouvoir chinois, dont l'illustration la plus controversée avait été donnée par Yahoo en 2005. Le portail avait alors communiqué au gouvernement des informations qui avaient contribué à l'inculpation d'un journaliste chinois, entraînant une polémique mondiale sur les limites du pacte faustien à payer pour faire du business en Chine. Google a accepté de censurer ses recherches dans le pays, sur des thèmes déplaisant au gouvernement chinois, comme le dalaï-lama ou les émeutes de Tiananmen. Lors de la récente période de troubles au Tibet, l'accès à Youtube a été bloqué par les autorités.Malgré tous ses efforts, Google n'a jamais autant percé qu'espéré en Chine. Son chiffre d'affaires sur place représente environ 300 millions de dollars, selon le « New York Times ». Les 350 millions d'internautes chinois ne réalisent qu'environ 30 % de leurs recherches sur Google, loin derrière les 60 % du moteur local Baidu.com, dont le cours de Bourse a bondi hier sur ces informations. Et loin derrière les 70 %, 80 % ou 90 % des parts de marché de Google dans la plupart des pays occidentaux.La charge de Google contre les autorités chinoises a hier logiquement été saluée par différentes organisations de droits de l'homme. Elle permettra au groupe de redorer son image, alors que sa domination du Web et son appétit apparemment illimité soulèvent de plus en plus d'inquiétudes et d'oppositions dans le monde. Sur le papier, le combat entre le Goliath de l'Internet, pour l'occasion redevenu le David de l'histoire, au vu de l'adversaire qu'il s'est choisi, semble inégal. Il apparaît improbable de voir Pékin relâcher le contrôle de l'Internet qu'il a toujours opéré.
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