C?est la dernière ligne droite. Ce mercredi, l'assurance-maladie et les trois syndicats de pharmaciens devraient enfin se mettre d?accord sur la façon dont ces professionnels de santé seront rémunérés au cours des prochaines années. Cette réforme est d?envergure puisqu?elle modifie le rôle du pharmacien dans la chaîne de santé et ne doit pas coût un euro à la Sécurité sociale dont, rappelons-le, le régime général devrait afficher un déficit de 14 milliards d?euros cette année.
Aujourd?hui, la rémunération des 22.000 pharmaciens installés dans l?Hexagone dépend exclusivement du nombre de boîtes de médicaments qu'ils délivrent, et de leur prix. Etablis par l'Etat pour les produits remboursables, ceux-ci représentent plus de 80 % de leur chiffre d'affaires.
Recul des marges
Or, leurs marges sur la vente de médicament reculent d?année en année. Depuis 2007, celles-ci ont baissé de 0,2% chaque année et ce, pour deux raisons : d?une part, le gouvernement abaisse régulièrement les prix des produits de santé afin de réduire le déficit de l'assurance-maladie ; d?autre part, pour atteindre le même objectif, les médecins sont incités à prescrire des molécules moins coûteuses.
Dans le cadre de cet accord, la rémunération des pharmaciens serait établie sur d'autres critères tels que des honoraires pour les actes qu'ils réalisent. Le texte soumis aux syndicats fixe à 25 % la part que cette rémunération devra représenter dans cinq ans. La première année, cette part pourrait être de 10%.Concrètement, ils seraient rémunérés au mérite puisque seraient pris en compte le nombre de patients reçus et le nombre de lignes sur chaque ordonnance, afin de valoriser le temps passé avec les patients aux pathologies les plus graves.
Multiplication des critères pour établir cette nouvelle rémunération
Cette nouvelle rémunération intégrerait aussi les économies que les pharmaciens permettront à l'assurance-maladie de réaliser. Des économies qui peuvent notamment être obtenues par l?augmentation de la prescription des génériques et la transmission des ordonnances sous format électronique par exemple. Chaque année, la Caisse nationale d?assurance-maladie (CNAM) reçoit 750 millions d'ordonnances, ce qui représente 420 kilomètres d'archives. À Paris, un camion de 6 tonnes de papiers arrive chaque semaine à la caisse primaire pour livrer ces ordonnances.
Assurée par 4.000 agents, la gestion de ces archives coûte environ 4 millions d'euros par an. Validée par la convention signée en juillet entre médecins et l'assurance-maladie, la dématérialisation des ordonnances dans les pharmacies, qui voient passer 550 millions de prescriptions par an, a déjà commencé à titre expérimental. Depuis 2010, environ 900 officines volontaires dans sept départements scannent les ordonnances lorsque le patient est au guichet, puis gravent des CD, envoyés tous les quinze jours à l'assurance-maladie. Progressivement, le système sera étendu aux 23.000 pharmacies d'ici la fin 2012, début 2013.
Un nouveau rôle de surveillance
Une partie de la rémunération serait également liée à des objectifs de santé publique. Comme pour les médecins, les pharmaciens devraient notamment jouer un rôle de vigie en surveillant que les asthmatiques prennent bien leur traitement, en améliorant le suivi des patients sous anticoagulants pour réduire les hospitalisations. "Grâce à cet accord, la profession de pharmaciens retrouvera enfin ses lettres de noblesse. Leur activité ne se limitera pas quasi exclusivement aux seules activités commerciales", se réjouit Lucien Benattann, le président du groupement de pharmaciens PHR, qui réunit 11% des officines de France.