Retraites : le mouvement se poursuit, Fillon ne cède pas

Le bras de fer des opposants à la réforme des retraites se poursuit. Le blocage des raffineries se maintient, les grèves continuent à la SNCF et les chauffeurs routiers entrent dans le conflit. Une sixième journée de manifestations est prévue mardi alors que la situation se tend dans les stations-service.

Alors qu'une nouvelle journée de grèves et de manifestations est prévue mardi, avant le vote du projet de loi par les sénateurs mercredi, une réunion s'est tenue à l'Elysée autour de Nicolas Sarkozy lundi matin, en présence du Premier ministre et de plusieurs ministres.

Dans la foulée de cette réunion, le ministère de l'Intérieur a annoncé l'activation d'un "centre interministériel de crise". Ce centre "aura pour mission de coordonner l'action des différents services de l'Etat visant à assurer la pérennité du ravitaillement en carburant ", a indiqué la place Beauvau.

Le carburant fait en effet l'objet d'une course de vitesse entre les syndicats qui brandissent la menace d'une pénurie et le pouvoir, qui mise sur le vote définitif du Sénat mercredi, ainsi que sur le début des vacances scolaires en fin de semaine, pour venir à bout des blocages et de la mobilisation en général.

"La rue s'est exprimée, la démocratie sociale s'est exprimée, maintenant je crois que la démocratie parlementaire doit prendre la main, s'exprimer à son tour, conclure le débat et permettre à cette réforme de s'appliquer", a dit le ministre de l'Agriculture Bruno Le Maire sur Europe 1.

Mais malgré la volonté du gouvernement d'en finir, le bras de fer avec les opposants à la réforme des retraites se poursuit de plus belle avec le maintien du blocage des raffineries et des dépots de carburants, des grèves à la SNCF et l'entrée dans le conflit, lundi, des chauffeurs routiers. Près de 825.000 personnes, selon la police, 3 millions selon les syndicats, ont défilé samedi.

Par ailleurs, lundi matin, un sondage CSA publié par Le Parisien estimait que 71% des Français voyaient d'un bon oeil la journée de mobilisation de mardi : 52% disent la soutenir et 19% éprouver de la sympathie à l'égard de ce mouvement.

 

L'ETAT DE LA MOBILISATION

Le début des barrages routiers

Les opposants à la réforme comptent sur le renfort des chauffeurs routiers qui dès dimanche ont commencé les barrages routiers et le blocage de sites stratégiques. "Ce n'est pas une action catégorielle, c'est une action en solidarité avec les Français, il faut viser ce qui créera le plus de désagrément au gouvernement", a déclaré à Reuters Maxime Dumont, patron du syndicat CFDT de la branche. 

Des actions étaient ainsi menées un peu partout lundi, comme des opérations escargot sur l'A6 au niveau de la banlieue sud de Paris ou encore entre Lillet et Arras.

Deux dépôts pétroliers à Caen et Ouistreham (Calvados), débloqués vendredi par les forces de l'ordre, ont de nouveau été entravés, de même que celui du port de Brest et celui de Saint-Pierre-des-Corps, près de Tours. Les dépôts de carburant de Saint-Priest, près de Lyon, et de Port-la-nouvelle, dans l'Aude, ont également été bloqués lundi matin.

 

La tention monte dans les stations-service

La situation est "extrêmement préoccupante" dans les 3.500 stations-service des distributeurs indépendants, situées pour la plupart dans les zones rurales, a annoncé lundi leur fédération (fédération française des combustibles, carburants et chauffage ou FF3C). Les distributeurs indépendants affiliés à la FF3C ravitaillent notamment en gazole les collectivités territoriales et les transporteurs routiers.

De même, de 500 à 1.000 stations-service de la grande distribution, sur les 4.000 du pays, sont affectées par les grèves, a déclaré à Reuters Alexandre de Benoist, délégué général de l'UIP, l'Union des importateurs indépendants pétroliers. Ces stations sont affectées "soit par une rupture totale, soit par une difficulté d'approvisionnement pour un produit, soit parce qu'elle sont en attente d'un produit", a-t-il précisé.

Dimanche, la compagne Total parlait de de 300 à 400 stations affectés sur son seul réseau, tandis que Dominique Bussereau, le secrétaire d'Etat aux transports, minimisait le phénomène en annonçant 200 sations-service seulement affectées par des problèmes d'approvisionnement, sur les quelque 13.000 du pays.

Les douze raffineries françaises étaient toujours en grève lundi. La raffinerie de Donges (Loire-Atlantique), la deuxième de France, dont la production est arrêtée depuis le 12 octobre, a reconduit la grève jusqu'à vendredi, lors d'une assemblée générale lundi

Par ailleurs, les blocages des dépôts se poursuivent et le terminal pétrolier de Fos-Lavéra, près de Marseille, est entré dans son 22e jour de grève lundi, bloquant en rade 61 navires dont 47 pétroliers.

Selon Dominique Bussereau, les société pétrolières profitent des tensions pour augmenter les prix. "Ce n'est pas civique", a-t-il dit sur Europe 1. L'ex-Premier ministre socialiste Laurent Fabius a appelé le gouvernement à agir sur ce sujet tandis que la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a annnoncé des contrôles et menacé les pompistes de sanctions.

 

Mardi, 30% de vols annulés à Roissy, 50% à Orly

Concernant les transports aériens, Dominique Bussereau a assuré que le risque de pénurie de carburant à l'aéroport de Roissy, craint vendredi dernier, n'était plus d'actualité, après le retour de l'alimentation en kérosène dans l'oléoduc Trapil qui dessert une partie de la région parisienne, notamment les aéroports. La CGT a accusé le gouvernement de "coup de force", car selon elle, il a relancé Trapil par une action clandestine de quelques cadres au port du Havre, point de départ de l'oléoduc, où le personnel d'exploitation est pourtant en grève.

Dominique Bussereau a également expliqué que les avions français avaient pour instruction de faire le plein à l'étranger avant de revenir et il a fait état de perturbations régionales, à Nice et à Nantes.

Lundi matin, des retards et des annulations de vols étaient enregistrés à Roissy en raison d'un mouvement de grève au sein de sociétés d'avitaillement des avions en carburants, a annoncé l'Agence France Presse. Trois entreprises se partagent le marché de l'avitaillement de kérosène à l'aéroport parisien : GPA (Groupement pétrolier aviation), FAS (Fuelling aviation service) et Air Fuel.

Mardi, jour de grève, 30% des vols de Roissy et 50% de ceux d'Orly seront annulés, a annoncé par ailleurs la Direction générale de l'aviation civile, lundi.

 

SNCF, la grève se poursuit

Le mouvement se poursuit aussi à la SNCF, dont voici les prévisions pour ce lundi. La direction a comptabilisé 12,6% de grévistes dans l'entreprise, soit une nouvelle baisse, contrairement à la CGT qui a annoncé un taux de 28,32%, soit une petite hausse, au septième jour d'une grève reconductible contre la réforme des retraites. Pour la journée interprofessionnelle de mardi , "le taux sera supérieur à 30%", a annoncé Didier Le Reste, secrétaire général du syndicat.

Une grève des cheminots belges devait en outre interrompre à partir de dimanche soir le trafic sur l'Eurostar Bruxelles-Londres et le Thalys Paris-Bruxelles.

La RATP, en région parisienne, annonce un "trafic normal ou quasi normal" sur les réseaux de bus, métro, tramway et sur le RER A. Elle prévoit deux trains sur trois pour le RER B. Les RER B allant vers le nord ont pour terminus Gare du Nord, la connexion avec la SNCF n'étant pas assurée (Gare du Nord assure la jonction entre la portion de ligne gérée par la RATP et celle gérée par la SNCF).

 

Incidents autour des lycées

Les lycéens, nombreux dans les cortèges samedi, maintiennent aussi la mobilisation, avec 261 lycées perturbés lundi à des degrés divers, selon le ministère de l'Education nationale. Le chiffre représente 6% des 4.302 établissements du pays. L'Union nationale lycéenne (UNL) dénombrait pour sa part lundi 950 lycées mobilisés dont 600 bloqués".

Les blocages ont donné lieu à des violences et des affrontements entre jeunes et forces de l'ordre, notamment à Nanterre où les affontements se sont étendus près de la cité Pablo-Picasso, et à Lyon, où des voitures ont été renversées, une brûlée, un abribus brisé, selon l'AFP.

La préfecture de Seine-Saint-Denis a annoncé que 22 interpellations avaient eu lieu chez les lycéens et a déclaré que "l'ambiance était plutôt tendue sur l'ensemble du département". En tout, le ministère de l'Intérieur a annoncé 196 interpellations dans la matinée.

 

Quand François Fillon promet de ne pas laisser les protestaires bloquer le pays

Face à la mobilisation qui reste intense contre la réforme des retraites, "le gouvernement français ne laissera pas les opposants à la réforme des retraites bloquer le pays car cette méthode compromettrait la reprise économique", a déclaré dimanche soir François Fillon.

"J'ajoute qu'au moment même où la reprise économique se manifeste, ceux qui prennent ce genre de décisions devraient y réfléchir à deux fois car ce sont des emplois qui vont disparaître", a-t-il également dit.

Il n'est pas question de suspendre le débat au Sénat comme le demandent les syndicats et la gauche, a également dit le Premier ministre, qui s'exprimait sur TF1.

Le Premier ministre s'est également exprimé dimanche sur l'éventuelle mise à contribution des revenus de la finance, une des solutions avancées par les opposants à la réforme actuelle. Il a jugé qu'il s'agissait avant tout d'une "escroquerie. La taxation du capital n'a jamais permis de trouver des financement suffisants pour les masses qui sont en cause en matière de retraites", a-t-il dit.

Le financement du projet de réforme du gouvernement passe essentiellement par le recul de 60 à 62 ans de l'âge légal de départ et le recul de 65 à 67 ans de celui requis pour un départ avec une pension à taux plein.

 

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