La Chine face au "dilemme du stimulus" pour relancer sa croissance

La multiplication des signes de ralentissement de l'économie chinoise oblige les autorités à réagir. La solution est de passer par la relance des investissements publics dans les secteurs habituels, comme elles l'avaient fait après la crise des subprimes. Or Pékin souhaite tourner le dos à ce modèle qui a montré ses limites sur le long terme.
Un vendeur de voirures attend des clients sur un marché automobile à Pékin le 16 mai dernier /Copyright AFP

La Chine est passée en mode "relance". Alors que la reprise attendue peine à se faire sentir, la croissance est à nouveau la priorité du gouvernement soucieux d'éviter ce que les économistes appellent un "atterrissage brutal" de l'économie à seulement quelques mois de la relève politique qui aura lieu à la rentrée en automne.
Dimanche dernier, le Premier ministre Wen Jiabao a donc changé le ton de sa rhétorique habituelle en annonçant qu'il fallait donner "une priorité plus importante à la croissance".

Relance par les investissements

Dans la semaine qui a suivi, toute une série de mesures ont été annoncées pour soutenir les investissements et la consommation intérieure dans la lignée de ce qui avait déjà été fait en 2008-2009, après la crise financière provoquée par les subprime, mais en moins spectaculaire.
L'idée est d'avancer toute une série de grands travaux qui été programmés dans le plan quinquennal. Le conseil d'Etat a donné la priorité à l'environnement, les projets ruraux et les chemins de fer.
Des subventions pour l'achat de voitures de petite taille ou des biens ménagers ont été également annoncées. Un total de 4,8 milliards de dollars a été prévu à cet effet, une somme relativement modeste qui montre bien que comme en 2008 ce sont les entreprises d'Etats qui devront tirer la croissance.

La limite du recours aux instruments bancaires

« Il y a eu une vraie volonté de changement en faveur de la croissance. Si les investissements et les prêts n'augmentent pas rapidement, le secteur public sera mis sous pression pour dépenser davantage », considère Mark Williams, économiste pour Capital Economics.
Jusqu'ici, le gouvernement, qui avait officiellement annoncé qu'il souhaitait réduire le rythme de l'activité, avait surtout eu recours aux instruments bancaires pour ajuster sa politique économique.
Mais les statistiques du mois d'avril, qui font état d'une conjoncture partculièrement dégradée, montrent que l'abaissement du taux des réserves obligatoires, comme vient de le faire la troisième fois la banque centrale, ne suffisait plus.
De nombreux signes indiquent que la Chine s'achemine vers un sixième trimestre consécutif de ralentissement de son activité.

Les entreprises réticentes à investir

Ainsi, la crise que traverse l'Europe, premier partenaire commercial, de la Chine, perdure et la demande intérieure peine à prendre le relais. Le niveau des prêts bancaires est particulièrement significatif. En avril, les banques ont prêté 681,1 milliards de yuan, la quantité la plus faible depuis le début de l'année, signifiant que le problème ne se situe pas tant du coté de la liquidité que de la demande. Les entreprises ne sont simplement pas prêtes à investir, n'étant pas assurés d'un retour sur investissement suffisant.
Le gouvernement, soucieux d'éviter tout chamboulement économique à quelques mois de la passation de pouvoir, se retrouve donc devoir chercher d'autres moteurs de croissance.

Vers une baisse des taux directeurs dans les prochains mois

La publication jeudi d'un chiffre en baisse de la production manufacturière pour le mois de mai, et ce pour le septième mois consécutif, a poussé de nombreux analystes à dire qu'ils s'attendent encore à d'autres mesures, dont la baisse des taux directeurs, dans les mois à venir.
Cependant, même si beaucoup ont révisé à la baisse leur perspective de croissance pour l'année, ils ne s'attendent pas pour autant à un affaiblissement notable de la croissance chinoise qu'ils situent encore autour de 8 % pour 2012. « Nous pensons que les efforts du gouvernement seront efficaces, du moins pour le court terme pour relancer la croissance du PIB », assure Mark Williams.

"Dilemme du stimulus"

Toutefois, pour Pékin, ce n'est pas la panacée. La Chine va devoir à nouveau faire face à nouveau au "dilemme du stimulus", selon l'expression de Mark Williams. Comme c'était le cas il y a trois ans, cette relance sera en effet soutenue par les investissements, un modèle économique dont cherchent à se défaire à tout prix les autortités de la république populaire. "Les dirigeants ont le choix : soit répondre au ralentissement mais en risquant un nouvelle crise du surinvestissement dans trois ans, soit simplement regarder leur économie pousuivre son ralentissement », explique-t-il. Un choix cornélien.

 

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