Emprunts toxiques : la Seine-Saint-Denis a trouvé la parade

En parvenant à un accord avec la Société de financement local (Sfil) sur ses crédits toxiques, le conseil général de Seine-Saint-Denis ouvre peut-être la voie à d’autres collectivités qui souhaitent solder cette affaire. Mais auront-elles les mêmes arguments à faire valoir ?
Mathias Thépot
Les petites collectivités auront-elles le même pouvoir de négociation que la Seine-Saint-Denis face aux banques ?

Soulagée, la Seine-Saint-Denis dit s'être enfin sortie du piège des emprunts toxiques. Elle vient de passer en ce sens un accord avec la Société de financement locale (Sfil), qui a repris dans son bilan une grande partie des crédits structurés octroyés par Dexia aux collectivités locales avant sa faillite. Le conseil général du 93 a ainsi renégocié un paquet de plusieurs prêts d'un montant global de 331 millions d'euros de dette risquée (dont les taux d'intérêt pouvaient atteindre 9%), et qui représentaient environ un tiers de sa dette totale.

Il a pour ce faire souscrit trois nouveaux crédits d'un montant global de 407 millions d'euros à des taux fixes d'entre 3,59% et 3,99%. Ce montant intègre le capital restant dû des anciens prêts, l'indemnité de remboursement anticipée (IRA) ainsi que des financements pour de nouveaux investissements.

Négocier l'indemnité de sortie

Pour l'entité publique Sfil, c'est la première opération de « désensibilisation » de cette envergure conclue, et éligible à l'appui du fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant contracté des emprunts structurés à risque. Le conseil général de la Seine-Saint-Denis pourra en effet solliciter l'aide du fonds pour couvrir une partie de l'IRA négociée avec la Sfil dont il devra s'acquitter. De fait, bien négocier l'IRA est un postulat indispensable pour une collectivité qui sollicite l'accès au fonds.

En effet, pour octroyer ses aides, le fonds de soutien se basera sur l'indemnité de remboursement anticipé déterminée avant les négociations. L'aide du fonds ne pouvant statutairement pas excéder 45% de l'IRA initiale, si la collectivité arrive à la faire baisser substantiellement pendant les négociations, elle peut in fine obtenir une aide du fonds au-delà de ce plafond.

Ainsi le conseil général de Seine-Saint-Denis, qui table sur une aide du fonds d'environ 26 millions d'euros, estime que celle-ci couvrira une grande partie de l'indemnité de remboursement anticipée (IRA) dont il s'est acquitté. Alors que l'IRA déterminé avant les négociations s'élevait à environ 110 millions d'euros.

Les petites collectivités auront plus de difficultés

Si toutes les collectivités pouvaient trouver une issue similaire au conseil général du 93 pour sortir des emprunts toxiques, l'avenir s'éclaircirait significativement pour celles qui deviennent, avec le temps qui passe, les grandes perdantes dans cette affaire.

Mais toutes ne pourront malheureusement pas obtenir les mêmes conditions de sortie que la Seine-Saint-Denis. La surface financière importante du département et son large périmètre d'action lui permettent en effet de négocier par ailleurs avec la Sfil des prêts pour de nouveaux investissements. Cet argument du recours à un nouvel emprunt est un élément non négligeable qui s'intègre pleinement dans les négociations avec la banque pour obtenir gain de cause sur le montant de l'IRA.

Ainsi, la grande taille d'une collectivité "rend les choses plus facile pour obtenir gain de cause", reconnaît-on au conseil général de Seine-Saint-Denis. En revanche, "c'est beaucoup plus compliqué pour les petites collectivités qui ont souscrit une part importante de leur dette en crédits structurés et qui n'ont par ailleurs pas la capacité de lancer des investissements supplémentaires", ajoute-t-on.

L'affaire est loin d'être bouclée

Malheureusement, ces petites collectivités sont encore très nombreuses à être en conflit ouvert avec leur banque. Jusqu'ici, la Sfil a fait des propositions à 714 acteurs publics emprunteurs sur 879 concernés, pour un montant de 5,7 milliards d'euros. A ce jour, des "opérations de désensibilisation ont été conclues avec 204 clients pour un encours quitté de 1,495 milliard d'euros", a précisé la Sfil.

Autrement dit, une grande majorité des collectivités n'ont pas encore réussi à se mettre d'accord avec la Sfil. Elles préfèrent régler l'affaire en justice où comme nous l'évoquions il y a deux semaines, plusieurs espoirs de victoires sont encore permis pour les collectivités.

La Sfil n'est d'ailleurs pas la seule banque visée en justice, même si elle concentre l'écrasante majorité des conflits. La Seine-Saint-Denis est par exemple toujours en contentieux avec le Crédit Agricole CIB, Natixis, la Société générale et la banque germano-irlandaise Depfa, pour un montant global d'encours de crédits structurés de 150 millions d'euros.
Elle non plus n'a donc pas encore complètement tourné la page de ces crédits structurés souscrits dans les années 2000, et dont les taux d'intérêt se sont envolés après le déclenchement de la crise financière.

Mathias Thépot
Commentaires 10
à écrit le 11/12/2014 à 8:33
Signaler
Car, il semble d'après les chiffres présentés que le coût du solde de l'emprunt est elevé (exhorbitant ?). Donc au final, combien le conseil général de Seine Saint Denis a-t-il économisé par rapport à un bon et un mauvais scénario d'indexation ? Le ...

à écrit le 10/12/2014 à 23:59
Signaler
Bref, on augmente la dette, mais à taux fixe et plus bas, le tout payé par le contribuable.

à écrit le 10/12/2014 à 16:16
Signaler
Lamentables ces élus irresponsables et démagos.

le 23/12/2014 à 12:08
Signaler
Ce sont en majorité des élus de Gauche.

à écrit le 10/12/2014 à 15:47
Signaler
En tout cas les anciens dirigeants de DEXIA sont riches comme Crésus, c'est ce qu'on appel de la bonne finance.

à écrit le 10/12/2014 à 12:04
Signaler
Comment échapper à ses responsabilités: faire payer le contribuable français.

à écrit le 10/12/2014 à 9:11
Signaler
Si trouver la parade est de mettre les frais à la charge du contribuable français ( et surtout ceux qui ne sont pas directement concernées) also chapeau pour le raisonnement. Tout ce que Dexia devra payer est à la charge de lEtat, qui doit souteni...

à écrit le 10/12/2014 à 8:42
Signaler
ils ont bien magouille, bravo! apres avoir SPECULE sur les marches avec l'argent public, au lieu d'aller en prison et de ne pas etre reelus, ils refilent la patate chaude au niveau au dessus

à écrit le 09/12/2014 à 20:25
Signaler
ok donc la solution c'est payer et c'est les contribuables vont payer avec les impots locaux...bravo l'arnaque !

à écrit le 09/12/2014 à 17:02
Signaler
Donc ? Qui va payer ? L'ensemble des contribuables ?

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.