Pourquoi Paris peut s'inquiéter de la course à la chancellerie au sein du SPD

Sigmar Gabriel, seul "fédéraliste européen" parmi les trois candidats à la chancellerie au SPD lors des élections de l'an prochain, jetterait l'éponge. Une mauvaise nouvelle pour Paris, mais pas une surprise.
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La guerre pour la candidature à la chancellerie au sein du parti social-démocrate allemand, le SPD, est lancée. Et elle prend un tour bien peu favorable au gouvernement français. Ce lundi en effet, la Leipziger Volkszeitung, croyait savoir que Sigmar Gabriel, l'actuel président du SPD, jetait l'éponge. Il laisse ainsi la voie libre à un duel entre le candidat de 2009, Frank-Walter Steinmeier et l'ancien ministre des Finances de 2005 à 2009, Peer Steinbrück.

Sigmar Gabriel, «l'Européen»

C'est un mauvais coup pour le gouvernement français qui compte beaucoup sur les élections fédérales prévues en septembre 2013 pour rééquilibrer la relation franco-allemande. Sigmar Gabriel était sans doute la meilleure option pour François Hollande. Il représentait en effet l'aile de centre-gauche du parti. Début août, il avait proposé de placer dans le programme du SPD pour les élections de 2013 un parti pris résolument pro-européen. Il prévoyait notamment un mécanisme de «socialisation des dettes» associé à une européanisation accélérée des budgets nationaux. Une position très fédérale qui rompt franchement avec la politique prudente du gouvernement fédéral et avec la ligne non moins prudente du SPD sur la question.

Sigmar Gabriel, le «keynésien» du SPD

François Hollande aurait donc avec Sigmar Gabriel un partenaire plus keynésien et moins rigide sur le plan européen. L'élu de Goslar, en Basse-Saxe, était peut-être le seul à rejeter le plus fermement une «grande coalition» avec la CDU d'Angela Merkel. En 2009, il avait tenté une ouverture vers Die Linke, le parti de gauche du renégat Oskar Lafontaine. Mais Sigmar Gabriel, ancien ministre de l'Environnement, n'a jamais eu de véritable prise sur un parti resté très «schröderien». Il a dû fermer la porte à Die Linke et a fait chou blanc avec sa proposition pro-européenne.

Situation politique bloquée

Restent donc en lice Frank-Walter Steinmeier, vice-chancelier d'Angela Merkel durant la «grande coalition» de 2005 à 2009 et Peer Steinbrück, le ministre avec lequel la chancelière avait les meilleurs rapports durant cette même «grande coalition». Autant dire que quel que soit le candidat du parti (qui devrait être connu en décembre prochain), la voie semble ouverte à une grande coalition à partir de 2013. En effet, l'entrée au parlement des Pirates (à 6-7% des intentions de voix actuellement) et l'effondrement des libéraux, actuels alliés de la chancelière qui n'entreraient pas au parlement si les élections étaient imminentes, pourrait déboucher sur une situation bloquée puisque le SPD et les Verts refusent toute alliance avec Die Linke. Une telle situation débouche toujours outre-Rhin sur une grande coalition. D'autant qu'Angela Merkel conserve un bon souvenir de cette période où la coalition était bien plus paisible que celle qu'elle mène depuis 2009 avec les Libéraux.

Retour de la «grande coalition» ?

Pour Paris, la mise en place d'une «grande coalition» en 2013 sous la conduite d'Angela Merkel ou d'un des deux prétendants sociaux-démocrates, signifierait la poursuite de sa politique actuelle. L'idée d'une politique européenne de croissance n'aurait guère plus de chance de voir le jour. Sans compter que ni Peer Steinbrück, ni Frank-Walter Steinmeier ne sont connus pour être de grands francophiles. Fils spirituels de Gerhard Schröder, ils considèrent le PS français avec méfiance, à la différence de Sigmar Gabriel qui avait tenté de nouer des liens toujours très difficiles entre SPD et PS.

Défaite française

En réalité, l'option Gabriel semblait déjà écartée par le gouvernement Ayrault qui, il est vrai, a été victime, en juin dernier, de la stratégie du SPD. Alors que le premier ministre recevait les trois candidats à la candidature à Matignon afin de peser sur Angela Merkel et lui faire accepter un «volet croissance», le SPD négociait son ralliement au pacte budgétaire européen. Dès lors que les Sociaux-démocrates acceptaient de voter ce pacte, la marge de man?uvre de Paris devenait nulle. François Hollande s'est donc rallié dès lors à la stratégie allemande. Le vote des élus PS mercredi prochain sur ce même pacte est la conséquence de cette défaite stratégique. Mais du coup, Paris est déjà en accord parfait avec le futur chancelier allemand. Quel que soit son nom.

Commentaires 4
à écrit le 17/09/2012 à 21:34
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Pourquoi méfiance? Les messieurs Steinbrück et Steinmeier peuvent faire confiance en Hollande qu'il ne tiendra aucun de ses engaments européens, qu'il redéfinira librement tous traités européens et que la crise européenne sera perpétuer.

à écrit le 17/09/2012 à 21:15
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Les allemands respectent la démocratie et ne s'allient pas avec l'extreme gauche. Que les journalistes français en prennent de la graine.

à écrit le 17/09/2012 à 19:10
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Dans tous les cas de figure, les socialistes allemands ont des comptes à régler avec les socialistes français qui critiquaient tant l'agenda de Schroder, lui préférant des mesures comme les 35 h... Y a pas photo sur le résultat ! Les socialistes fran...

le 17/09/2012 à 21:10
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Comme disait M. Schroder, quand on lui demandait si les 35h étaient une bonne chose : "les 35h sont une bonne chose... pour l'Allemagne".

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