Faut-il croire François Hollande ? (2) Zone euro : la crise de la dette, c'est du passé ?

Le président français a classé la crise de la zone euro dans les tiroirs de l'histoire ce week-end à Tokyo. Si une stabilisation semble se dessiner, la conclusion de l'hôte de l'Elysée semble un peu hâtive...Seconde partie de cette analyse: la crise de la dette.
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François Hollande avait un message à faire passer aux Japonais ce week-end, celui de leur faire « bien comprendre » que la crise dans la zone euro est « terminée. » Des propos qui, tiennent beaucoup de la communication, mais qui méritent sans doute d'être vérifiés par les faits en observant la situation sur les multiples fronts de cette crise. Penchons-nous dans la deuxième partie de cette analyse sur la crise de la dette.

Lire aussi => Faut-il croire François Hollande? (2)Zone euro : la crise économique est-elle derrière nous?

La crise de la dette souveraine de la zone euro a pris plusieurs visages depuis ses débuts en 2010. Un des plus inquiétants, celui de la hausse des taux semble apaisé, sous l'effet conjugué des anticipations de sortie de récession, des délais accordés par Bruxelles sur les objectifs de réduction de déficit, mais aussi et surtout du programme de rachat illimité des obligations souveraines de la BCE, le fameux OMT, dont la menace a suffi, depuis septembre dernier, a ralentir la crûe des taux.

Par ailleurs, les mesures de création monétaire prises aux Etats-Unis et surtout au Japon, ont déversé des liquidités qui ont stimulé le marché de la dette souveraine. Compte tenu de la détermination de la BCE à « sauver l'euro », les dettes des pays périphériques ont été jugés attirantes et les taux de ces dettes ont fortement reculé. En mai, le taux italien à 10 ans est repassé sous les 4 %, retrouvant brièvement un niveau proche de 2010. Le taux grec à 10 ans s'est installé sous les 9 %. Tous les taux ont remonté depuis lors, mais le risque d'une crise des taux, comme à l'été 2011 ou 2012, semble en effet, pour le moment, écarté.

Pas de retour à la normale

Pourtant, la crise n'est pas « finie. » D'abord, parce que la zone euro n'est pas dans la situation où elle était avant la crise. Trois de ces pays membres n'ont pas accès au marché pour refinancer leur dette et sont donc entièrement dépendants de l'aide du MES. La situation des finances publiques de la plupart des pays de la zone euro reste difficile. L'Union bancaire reste à faire, ses modalités sont incertaines : les Allemands veulent une réforme des traités.

De plus, il n'est pas certain que le mécanisme de supervision commun prenne en compte au final les dettes « héritées », ce qui laisse certains pays comme l'Espagne à la merci d'une crise bancaire. Du reste, la BCE se préparerait, selon le quotidien espagnol El Pais, à prolonger jusqu'à la fin de l'année - au moins - sa ligne de crédit de 100 milliards d'euros accordée voici un an pour la recapitalisation des banques espagnoles. Le retour à la normale dans les pays périphérique reste donc lointain. Le feu couve donc toujours sous l'optimisme.

La Slovénie inquiète toujours

L'autre épée de Damoclès, c'est la Slovénie. Si sa récente levée de fonds sur les marchés américains met le pays de l'ex-Yougoslavie à l'abri d'un besoin urgent de refinancement, les investisseurs demeurent inquiets. Plusieurs incertitudes demeurent, notamment celui de l'ampleur des créances douteuses dans le bilan des banques, la stabilité et la détermination du gouvernement de coalition au pouvoir à Ljubljana, la mise en place concrète de la structure de défaisance.

Du reste, l'obligation slovène de référence, qui arrive à maturité en 2014, affiche un taux autour de 6,3 % qui reste assez élevé et qui est remonté depuis mai de près de 60 points de base (0,6 point de pourcentage). Nul ne peut donc écarter l'hypothèse d'une demande d'aide slovène. Ce serait un nouveau défi pour la zone euro. Chypre a démontré que la (petite) taille du pays n'est qu'une piètre défense. Si cette aide est structurée comme celle de Chypre, avec une participation des déposants, elle pourrait bien inquiéter à nouveau les investisseurs sur leurs dépôts dans les autres pays périphériques.

La BCE au centre du jeu

Plus généralement, l'apaisement a moins été le fruit de la politique des dirigeants européens que de celle la BCE. L'OMT reste la pierre angulaire de cette « fin de crise. » Or, c'est un concept encore très flou. Mario Draghi a annoncé que les modalités légales et techniques seraient publiées sous peu. Elles devront être crédibles pour ne pas affaiblir l'impact de l'OMT.

Surtout, il sera très intéressant de surveiller la décision sur l'OMT de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Si elle pose des conditions à la participation de l'Allemagne à sa mise en place ou à la mise en place d'autres mesures non conventionnelles, l'autorité de la BCE pourrait en pâtir. Et l'efficacité de son action également. Les marchés pourraient alors reconsidérer le risque européen. C'est la mise en garde qu' a adressé ce lundi le membre allemand du directoire de la BCE, Jörg Asmussen, dans Bild Zeitung exhortant Karlsruhe à ne pas "mettre la zone euro en danger" par sa décision.

Ce qui est étrange dans cette situation, c'est que la BCE refuse ce rôle de « dernier filet » pour sauver l'euro qu'elle exerce de facto. Sous la pression des pays du « nord », l'institution de Francfort pourrait profiter du léger mieux conjoncturel pour tenter de quitter ce rôle. Plus généralement, le calme sur les marchés dépend largement des politiques des banques centrales. L'avenir va beaucoup dépendre de la gestion de la sortie de crise de ces pays. L'ennui, c'est que tout mouvement dans le sens d'un léger resserrement de la politique monétaire peut provoquer une correction. C'est pourquoi la volatilité est forte sur les marchés. Proclamer la fin de la crise reste bien hardi. Là aussi, il y a surtout une stabilisation.

Et la situation politique?

La crise économique et financière en Europe a conduit à une crise politique dans la zone euro et l'Union européenne avec la montée des mouvements populistes et des gouvernements fragiles. Depuis la mise en place du gouvernement Letta en Italie et le recul dans les sondages du parti anti-euro allemand AfD, ce risque semble également en recul. Mais là encore, la situation n'est pas sans risque. La coalition italienne est fragile et les mouvements politiques populistes, opposés aux politiques « d'ajustement structurel » restent forts en Italie et en Grèce. A l'inverse, les mouvements de droite anti-euro demeurent très forts dans les sondages en Finlande, en France, aux Pays-Bas et en Autriche. En Espagne aura lieu l'an prochain le référendum sur l'indépendance de la Catalogne qui est, rappelons-le, une conséquence de la crise de la dette. Au gré des élections et des vies politiques, la tension peut donc réapparaître. D'autant que les conséquences sociales de la crise vont encore se faire sentir longtemps....

En conclusion, les propos de François Hollande semblent bien optimistes. Même si un apaisement est indéniable, cette pause ne signifie pas que l'on soit entré dans une phase de sortie de crise.

 

Lire aussi => Faut-il croire François Hollande? (2)Zone euro : la crise économique est-elle derrière nous?

 

Commentaires 15
à écrit le 10/09/2013 à 20:59
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Il se fout de notre gueule, comme d'habitude et comme ses prédécesseurs.

à écrit le 12/06/2013 à 9:39
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Tant que l'Euro ne sera pas aligné sur le dollar US la zone Euro sera à la peine, Y compris face aux pays Européen hors zone Euro. Ces dernier pays ont bien compris que leur monnaie nationale favorise leur propre production.(Alors pourquoi adhérer à ...

à écrit le 11/06/2013 à 23:29
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Encore un mensonge de normal premier. Bientôt la rue le chargera de le renvoyer dans sa Corrèze ou à Mougins dans sa villa sous évaluée pour ne pas payer l'ISF créé par son mentor Mitterand!

à écrit le 11/06/2013 à 22:06
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lui on ne le paiera pas pour des conférences d'économie mondiale....;)

le 12/06/2013 à 7:00
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+1 pour me faire sourire. C'est vrai en plus

à écrit le 11/06/2013 à 15:11
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allez encore 4 ou 5 élections ,au parlement ils ne sont plus majoritaires !!!!!

le 11/06/2013 à 15:50
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Le groupe PS n'aurait plus la majorité absolue mais la gauche oui. Ils pourraient toujours gouverner à coup d'article 49-3 en cas de problème. On voit mal les verts ou le Front de gauche renverser le gouvernement.

à écrit le 11/06/2013 à 15:05
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Pour sauver son honneur vu le nombre de mensonges M Hollande devra se faire hara kiri.

le 11/06/2013 à 15:23
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Et s'il refuse, le clan devra lui envoyer un samourai pour l'éxécuter.

à écrit le 11/06/2013 à 14:54
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Le critère d'une toute petite croissance éventuelle semble être très hasardeux pour affirmer que la crise est derrière : - d'une part, le taux de croissance minimum pour inverser la courbe du chômage est de l'ordre de 1,7%. Ne faut-il pas mieux atten...

à écrit le 11/06/2013 à 14:36
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Bienvenu dans le monde des bisounours. Comme d'habitude, les politiques et leurs laquais journalistes traquent tous les indices qui montrent une amélioration de la situation ou, au moins, une moindre régression. Il faut dire que dans les milliers de ...

à écrit le 11/06/2013 à 13:19
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Après une période dure de 5 ans la crise économique commencée dans ses effets en août 2007 mais prévisible déjà 18 mois auparavant (Articles d'économistes dubitatifs ou alarmistes mais aussi grand public comme ceux d'Investir, inquiêts, ou Fortune, j...

à écrit le 11/06/2013 à 12:48
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Excellent article aussi synthétique qu'accessible de la part de la Tribune. Ils ont dû quant même bien se marrer les japonais après son départ. Je propose maintenant que F Hollande renouvelle ce discours devant les salariés de Michelin, de Virgin,......

le 11/06/2013 à 19:20
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Autre réforme de fond entreprise pour sortir de la crise : supprimer le statut d'AE. On se marre ! Honnêtement, je n'ai pas voté pour lui, mais je ne le croyais pas si nul et surtout si menteur et faux jeton. Hollande est en dessous de tout.

le 12/06/2013 à 9:03
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Moi non plus je n'ai pas voté pour Flamby ceux qui l'on fait doivent se mordre les doigts.

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