Alan Greenspan durcit le ton

Le ton est donné. " Une Fed vigilante continuera de contribuer à la poursuite de la hausse des taux d'intérêt de marché ", a indiqué, sans équivoque, le président de la Réserve fédérale, Alan Greenspan, lors de son audition semestrielle " Humphrey Hawkins ", face au Congrès américain. Pour les derniers investisseurs encore sceptiques à l'égard de l'intention des autorités monétaires de remédier aux déséquilibres croissants au sein de l'économie américaine et à l'intensification des risques de surchauffe, le message est clair. Le cycle de hausse des taux courts est loin d'être achevé.Et les arguments abondent. " Les tensions sur le marché du travail pourraient avoir de graves conséquences sur l'inflation ", s'est tout d'abord alarmé Alan Greenspan. Même si la croissance maximale considérée par la Fed comme non inflationniste a été révisée de 3,5 % à 4 %, un tel rythme reste, en effet, bien en-deçà de la progression réelle du PIB, en hausse de 5,8 % en rythme annuel au cours du dernier trimestre 1999. Peu importe la faible inflation réelle, de l'ordre de 2,7 % en décembre en glissement annuel, le risque serait bien réel. Le maintien du taux de chômage autour de 4 %, soit son plus bas niveau depuis 30 ans, l'illustre.Par ailleurs, les sources de désinflation, qui ont largement contribué à contenir les tensions sur les prix, ces dernières années, se tarissent progressivement. " Certains facteurs de limitation de l'inflation s'amenuisent en raison de la reprise des économies étrangères ", a-t-il indiqué, en s'émouvant de la hausse du cours du pétrole. Reste que pour l'heure, sur le front des prix, le calme règne toujours. Les prix à la production ont baissé de 0,2 % en janvier, hors énergie et alimentation, tandis que l'indice global est resté stable. L'annonce, vendredi, de l'évolution des prix à la consommation sur la même période devrait confirmer la tendance.Et les déséquilibres internes ne seraient pas en reste. Même si l'effet modérateur de la hausse des taux longs se confirme sur l'investissement, la consommation des ménages augmente toujours fortement, au prix d'une poursuite de la baisse du taux d'épargne et d'une explosion de l'endettement des particuliers. Supportable dans le contexte actuel de dynamisme du marché de l'emploi et d'optimisme de l'ensemble du secteur privé, un tel levier financier des personnes physiques est potentiellement déstabilisateur en cas de brusque retournement de tendance.Par ailleurs, le dynamisme de la consommation et des investissements immobiliers des ménages trouve aussi sa source dans l'effet de richesse que confère la progression de leurs avoirs boursiers sur le pouvoir d'achat. Une tendance dangereuse, le jour où l'exubérance de Wall Street, et en premier lieu du Nasdaq, prendra fin. D'où l'inquiétude de la Fed face à l'inflation des actifs financiers. " Une limitation des effets de richesse démesurés est nécessaire pour prolonger l'expansion ", a indiqué Alan Greenspan, en notant qu'une " hausse des valeurs mobilières américaine supérieure à la croissance des bénéfices ne peut se poursuivre ".Seul problème, le crédit accordé par les investisseurs à l'efficacité de la politique monétaire américaine rend les marchés confiants dans le contrôle de l'inflation et entretient la poursuite du rally du Nasdaq et la vigueur de l'économie, en dépit du climat de plus en plus restrictif sur les marchés financiers outre-Atlantique. D'où la nécessité, pour la Fed, de réaffirmer sa détermination à lutter contre la moindre menace sur le front des prix, afin de justifier le la poursuite du resserrement de sa politique monétaire et de maintenir la pression sur les taux à long terme. Une position d'autant plus difficile à tenir que ceux-ci profitent aujourd'hui des perspectives de réduction de la dette publique.Pour preuve, le rendement des emprunts d'Etat américain à 10 ans s'est inscrit en franche baisse par rapport à la veille, à 6,53 %, en dépit du ton ferme d'Alan Greenspan. Parallèlement, le Nasdaq s'est renchéri de plus de 1,2 % à 4.484 points, jeudi à 17 heures. La marge de manœuvre d'Alan Greenspan n'est décidément pas large.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.