Raffarin au pied du mur

Sur le fond, Jean-Pierre Raffarin n'a pris qu'un seul engagement ferme : celui du calendrier. "Je présenterai le projet de loi pour l'avenir des retraites avec l'objectif d'un vote du Parlement avant l'été, " a-t-il déclaré hier devant le Conseil Economique et Social. " Je suis prêt à engager la responsabilité de mon Gouvernement devant le Parlement. "Pour le reste, la réforme doit être "progressive" et "ajustable". Il faut tout à la fois garantir le maintien du système par répartition, mais ouvrir la voie à l' "épargne volontaire (...) en donnant à chacun plus de souplesse pour choisir le niveau de sa retraite."Le Premier ministre se "refuse à opposer les fonctionnaires et les salariés du secteur privé." Mais, alors que les premiers doivent cotiser 37,5 années pour accéder à la retraite et les seconds 40 ans, il ajoute que "la spécificité de la fonction publique ne doit pas faire obstacle aux exigences de l'équité qui veulent que la situation de personnes placées dans des situations comparables soit harmonisée."Enfin, "il n'est pas question de remettre en cause l'âge légal du départ à la retraite à 60 ans," mais il faut aussi permettre à ceux qui le souhaitent de travailler plus longtemps, faire croître aussi le taux d'activité, singulièrement pour la tranche d'âge des plus de 50 ans.Il ne paraît pas abusif de résumer le discours de M. Raffarin en trois mots : tout est ouvert. Les syndicats se retrouvent ainsi dans une situation qu'ils pourraient bientôt regretter d'avoir appelée de leurs voeux. Samedi, ils ont fait la démonstration de leur capacité à se mobiliser. Banco, leur répond en substance Jean-Pierre Raffarin : vous voulez la parole, je vous la donne. Qu'avez-vous à me proposer ?Que les syndicats aient réussi à se mettre d'accord sur un mot d'ordre collectif ne doit pas tromper. Cette unité dissimule de nombreuses divergences de fond. Prendre parti pour tel ou tel aspect de la réforme, c'est s'exposer aux critiques de l'opinion. L'hôte de Matignon aime autant que les partenaires sociaux le fasse à sa place. On le comprend.Alors, de deux choses l'une. Soit les partenaires sociaux sont capables de s'entendre pour faire émerger les contours d'une réforme que le gouvernement pourra reprendre à son compte - tout en recueillant le bénéfice politique du "courage" à réformer alors que tant d'autres ont reculé ou échoué avant lui. Soit les dissensions de ses interlocuteurs apparaîtront au grand jour et il sera alors fondé à jouer les arbitres avec une importante marge de manoeuvre.Il restera ensuite à convaincre l'opinion publique. Les sondages semblent montrer qu'elle a sensiblement évolué depuis 1995. L'alignement du secteur public sur les 40 ans de cotisations du privé ne semble pas lui poser de problème majeur. Elle est prête aussi à cotiser davantage. Mais pas, semble-t-il, à travailler plus longtemps ou à percevoir une retraite amoindrie.Au bout du compte, Jean-Pierre Raffarin devra trancher, sans pouvoir satisfaire tout le monde. C'est à sa capacité à le faire que se mesurera le succès de son gouvernement.
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