Bataille des normes, le retour

C'est un combat de longue haleine, engagé il y a maintenant plus d'un an et dont l'issue est encore incertaine. Les banques européennes, comme toutes les entreprises cotées, doivent appliquer à partir du 1er janvier prochain les nouvelles normes comptables internationales, baptisées IFRS. Cette petite révolution, voulue par la Commission européenne, vise à améliorer la transparence de la communication financière et la comparabilité des comptes entre les entreprises. Deux ambitions fort louables auxquelles les banques, elles aussi, se doivent de souscrire. Mais voilà, le projet élaboré par l'IASB, organisme international où les grands cabinets d'audit anglo-saxons sont très présents, pose un sérieux problème aux établissements financiers. Le point de crispation porte sur une seule norme, l'IAS 39, consacrée à la comptabilisation des instruments financiers. Ici aussi, le dogme de la "juste valeur", selon les spécialistes de la comptabilité, doit s'appliquer. Concrètement, cela signifie que tous les instruments de couverture mis en place par les banques doivent être évalués à la fin de chaque exercice pour que les pertes ou les gains latents soient intégrés dans les comptes. Problème : la conséquence sera d'introduire une forte dose de volatilité dans les résultats des banques, alors que les instruments de couverture sont justement mis en place pour éviter ce phénomène fort gênant lorsqu'il s'agit d'entreprises cotées en Bourse.On comprend mieux pourquoi les banques sont montées au créneau à Bruxelles. Jusqu'à présent, elles sont parvenues à bloquer l'adoption de cette fameuse norme 39 mais l'issue du combat est encore incertaine. Sur les 25 pays membres de l'Union, 15 sont favorables au projet, 4 farouchement contre et 6 se posent encore des questions. La majorité qualifiée penche en faveur du non mais la Commission attend maintenant des explications écrites. Le lobby bancaire, français et européen, n'est donc pas près de relâcher ses efforts. Pour lui, une adoption de la norme contestée signifie ni plus ni moins la mort du métier de banquier tel qu'il se pratique encore aujourd'hui dans la vieille Europe. Bigre ! Une chose en tout cas est sûre, le nouveau référentiel comptable, et l'application de la juste valeur, ne risque pas de poser de problèmes aux établissements américains. Ils sont habitués à ces concepts, et l'organisation de leur métier, notamment avec les techniques de titrisation, leur évite de recourir massivement aux instruments de couverture. Derrière ces débats techniques, c'est en quelque sorte une bataille franco-américaine qui se livre actuellement dans les coulisses de la Commission européenne.
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