Les grandes manoeuvres se multiplient dans le ciel européen

C'est officiel depuis ce mardi: Lufthansa va prendre le contrôle de la compagnie helvétique Swiss (lire ci-contre). Ainsi, un peu plus d'un an après le rapprochement d'Air France et de KLM, la compagnie allemande s'engouffre dans la brèche de la consolidation et du remodelage du secteur aérien européen. Le mouvement de consolidation des compagnies européennes, qui a été lancé en mai 2004 par la fusion Air France-KLM se confirme ainsi, et pour les observateurs ainsi que pour les acteurs du secteur, il est désormais inéluctable. "J'attends un processus de concentration (du secteur) en particulier en Europe", a récemment déclaré le président de l'Association international du transport aérien (IATA). "Le rapprochement de nos deux compagnies est à présent scellé. Nous vivons une date importante pour le transport aérien mondial et une étape essentielle vers la consolidation du secteur en Europe", avait prédit en mai 2004, Jean-Cyril Spinetta, le PDG du groupe, à l'annonce de la fusion. "Air France-KLM ont créé le mouvement il y a 18 mois, et le fait que maintenant, deux autres opérateurs comme Lufthansa et Swiss adoptent une démarche équivalente me paraît aller dans le sens de ce qui est nécessaire en Europe", a même ajouté le PDG d'Air France récemment, en réponse à la nouvelle fusion. "La situation actuelle n'est pas viable", commente pour sa part un spécialiste du secteur. Un secteur en criseEt pour cause. Il existe aujourd'hui près de cinquante compagnies à bas coûts, parmi lesquelles EasyJet, Virgin Express et Ryanair. Autant de concurrents féroces pour les grandes compagnies, attachées à fournir des services de qualité. De même, l'offre est pléthorique du côté des compagnies nationales. Ainsi, à terme, seules quelques compagnies low-cost survivront et le ciel européen ne sera plus guère occupé que par les trois grands groupes actuels, British Airways, Lufthansa et Air France. Prenant l'exemple de leurs grandes soeurs, les low-costs ont déjà commencé les manoeuvres de consolidation. La compagnie autrichienne Austrian Airlines a pris le contrôle de Slovak Airlines. La société Sterling European a été vendue à une société islandaise pour 54 millions d'euros. Virgin Express, pour sa part, est en plein processus de fusion avec la compagnie SN Brussels. En outre, le secteur a été très fragilisé par des années de crises, suivant les attentats du 11 septembre 2001, tout comme l'épidémie de Sras en Asie. Cette situation désastreuse du marché a d'ailleurs coûté la vie à nombre de compagnies aériennes, en particulier aux Etats-Unis. Beaucoup se trouvent encore aujourd'hui très fragilisées, comme Swiss qui a dû réaliser quatre restructurations depuis sa création en 2002, et a été contrainte d'accepter une alliance avec Lufthansa pour assurer son avenir. La situation semble similaire pour Alitalia. Le groupe, qui fait des appels du pied pour entrer dans le giron d'Air France-KLM, est en proie à de grandes difficultés financières. Il a lancé en automne dernier un plan de restructuration qui passe par un scission et une recapitalisation massive, ce qui devrait lui permettre de revenir à l'équilibre en 2006 et d'espérer intégrer le nouveau géant des airs.Economies de coûts et croissanceDe son côté, la hausse continue du prix du pétrole n'arrange évidemment pas la situation et joue encore une fois en faveur de rapprochements. "Cette hausse restera un problème majeur en 2005", prévoient d'ailleurs les analystes de Goldman Sachs, qui tablent en moyenne sur un baril de Brent à 43 dollars. Les compagnies, confrontées à ces hausses de coûts, trouvent ainsi dans les rapprochements une possibilité de réaliser des économies d'échelle, dont la fusion réussie d'Air France et KLM est un exemple. Comme en témoignent les 580 millions d'euros de synergies que le groupe veut réaliser à horizon 2008-2009. "Le rapprochement réussi d'Air France et de KLM crée un précédent dans l'industrie européenne dans laquelle les rapprochements semblent le moyen le plus simple de prendre des parts de marché significatives à l'étranger", ajoutent les analystes de CIC dans une note. Car, outre les difficultés actuelles, les groupes doivent penser à leur croissance future. Or, la réglementation internationale, qui était un vrai frein au développement des compagnies, a vocation à s'alléger en Europe, mais aussi aux Etats-Unis. "Le changement de réglementation entre les pays devrait permettre de plus grandes opérations de rapprochement", note un analyste. Même si l'ouverture du ciel européen et des lignes transatlantiques risque de prendre du temps, les alliances sont les étapes préliminaires aux rapprochements.Dans ce contexte global, les rumeurs vont bon train au sujet des futurs rapprochements. Des bruits de marché font état d'un prochain rachat d'EasyJet, probablement par le groupe islandais Icelandair, alors que son président, Hannes Smarason, a déclaré que "Easyjet dispose de fondamentaux solides, dans un secteur des compagnies low-cost appelé à se concentrer". Par ailleurs, certains parient volontiers sur un rapprochement entre British Airways et Iberia, pour contrer les deux nouveaux géants que représentent Lufthansa et Air France. Quant à des rapprochements avec des compagnies américaines, il semble que ce ne soit qu'une question de temps...
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