"Le passage aux normes IFRS va accroître la volatilité des titres"

latribune.fr.- Le calendrier de la mise en place des normes est-il tenu? Patrick Legland.- A priori, il n'y a pas de raison pour que le calendrier soit modifié. Il était recommandé aux sociétés de donner des éléments sur l'impact des normes, mais cela n'était pas une obligation. Les premiers résultats sous normes IFRS seront donc ceux du premier trimestre 2005. A ce stade, il n'y a pas de retard.Reste-t-il des précisions à donner sur ces normes? Les normes IFRS sont bien connues, elles ont été bien expliquées. En revanche, c'est au niveau de leur interprétation que la situation est plus délicate, car le contour est moins précis. Par exemple, le goodwill [écart d'acquisitions] devra être analysé et traité en fonction de ses composantes et de sa génération de cash-flow. De telles difficultés d'interprétation se retrouveront souvent dans les normes IFRS.Ce flou sur l'interprétation peut-il avoir un impact négatif sur les sociétés?Clairement oui, et particulièrement dans les comparaisons sectorielles pendant la période de transition. C'est pourquoi de gros investissements ont été fait pour aider nos analystes - à la Société Générale - à réagir rapidement à un besoin d'ajustement ou à une surprise. Quels sont les secteurs qui seront les plus touchés par le changement de normes? Les secteurs les plus impactés sont ceux qui sont exposés aux taux d'intérêts, aux effets de changes et qui sont à fort goodwill. Ainsi, les sociétés financières (banques et assurances) seront relativement impactées. De même que les groupes qui ont une forte activité à l'export, comme le luxe ou les biens d'équipements. Ou encore les médias, pour des raisons de stock options. Quoi qu'il en soit, la valeur fondamentale des sociétés restera inchangée. Comment cela?En effet, c'est la perception boursière des sociétés qui peut changer. Les normes IFRS peuvent rendre les résultats des sociétés volatils. Ainsi, des sociétés qui affichaient jusqu'alors des résultats stables risquent de publier des comptes plus irréguliers. Or, il y aura une double lecture des comptes, qui seront retraités pour les rendre comparables. Ce travail sera très important. Les fluctuations dans les comptes ne risquent-elles pas de compliquer leur analyse et l'estimation de la valorisation des sociétés?Tout à fait. C'est pourquoi nous serons très axés sur la valeur de l'entreprise sur le long terme. Les normes IFRS apportent une meilleure transparence dans les comptes des sociétés. Mais le poids des comptes trimestriels sera beaucoup plus important, alors que ce n'est pas cela qui donne la valeur de la société. Est-ce positif pour les actions?Sur une période de 6 à 18 mois, le changement de norme va accroître la volatilité des titres, car il y aura des effets surprises sur les comptes, même si beaucoup sont anticipés. Ainsi, l'effet pourrait être assez négatif sur le court terme. En revanche, sur le plus long terme, l'impact du changement de normes sera positif, avec une réduction de la prime de risque. En effet, les sociétés européennes vont gagner en transparence. Il sera plus facile de les comparer. Quel est l'impact des changements par pays?C'est en France, en Italie et en Espagne que le passage aux normes IFRS sera le plus ressenti, car les normes de ces pays sont conceptuellement éloignées des IFRS. En revanche, au Royaume-Uni et en Allemagne, les impacts seront moindres.Le changement de norme peut-il influencer la stratégie des dirigeants, notamment en raison du non amortissement des goodwill?Il est vrai que désormais les dirigeants auront moins de temps pour mettre en place des synergies après une acquisition. Les activités devront avoir très rapidement un impact sur les bénéfices. Ce qui peut rendre les managers plus prudents dans leur stratégie d'acquisition, dans une vision à court terme : cela peut être dommageable dans le cadre d'un développement à long terme d'une société. Les méthodes de valorisation et comparaison des sociétés seront-elles touchées? Les ratio resteront, mais ils nécessiteront plus d'ajustement de la part des analystes. Le PER (ratio cours sur bénéfice) restera sans doute utile, mais sans être forcément très pertinent. En revanche, le ratio dettes sur fonds propres [gearing] devrait pour sa part être impacté, mais avoir un effet neutre dans la valorisation, tous les retraitements ayant déjà été effectués.Le bureau de recherche actions pan-européennes de la Société Générale a d'ailleurs mis en place une méthode "normative" qui revient à créer une marge de milieu de cycle pour chaque secteur. L'objectif est de ne pas rester dans une valorisation à court terme des sociétés.
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