Maurice Denis, la religion de l'art

Le Musée d'Orsay à Paris rend hommage à Maurice Denis à travers une belle exposition. Une oeuvre singulièrement anachronique au regard de l'histoire de l'art du XXe siècle.

Il n'avait pas 15 ans, mais déjà une idée très précise de son avenir. "Il faut que je sois peintre chrétien [...]. Et puis je ferai de l'Art, de l'Art en masse, en tout et partout", confie Maurice Denis (1870-1943) à son journal en 1885. Mission accomplie. Car sa vie durant, le peintre -initiateur et théoricien du nabisme- s'est acharné à appliquer ce programme. En témoignent l'exposition que lui consacre actuellement le musée d'Orsay.

Pour l'occasion, les commissaires ont rassemblé les plus beaux tableaux ou panneaux décoratifs exécutés par l'artiste. Déroulés dans un ordre chronologique, l'ensemble donne à voir l'évolution d'un extraordinaire coloriste proche des avant-gardes à ses débuts, avant de se replier sur un classicisme singulièrement anachronique au moment où ses contemporains, Picasso en tête, bousculaient l'ordre établi de l'histoire de l'art.

Intimement mêlées, l'oeuvre et la vie de Maurice Denis se sont toujours organisées autour d'une sainte trinité : l'art, l'amour et la religion. Trois dates jalonnent son parcours. 1890, tout d'abord. Non seulement le jeune homme rencontre sa future femme (elle deviendra par la suite une figure récurrente de sa peinture), mais il découvre aussi le fameux "Talisman", cette huile peinte par Sérusier sous la directive de Gauguin. De quoi lancer le mouvement Nabis et inspirer à Maurice Denis -alors influencé par les estampes japonaises, Puvis de Chavannes ou Seurat- un ensemble de petits tableaux aux couleurs vibrantes, parfois brûlantes, d'une beauté à couper le souffle, dans lesquels s'entremêlent encore avec douceur sacré et profane.

Ces oeuvres, remarquablement mises lumière par l'exposition du Musée d'Orsay, tranchent avec la production à venir. Car dès son retour d'un voyage à Rome en 1898, Denis revient à une peinture plus classique, kitsch au regard de cet ensemble.

Parti sur cette lancée, l'artiste (membre de l'Action Française), se fend même d'une réponse à "La joie de vivre" hédoniste de Matisse en 1905, à travers une série de tableaux ayant la plage pour sujet. Campés à Perros-Guirec, fourmillant de baigneuses monumentales, de figures grecques et de personnages contemporains inspirés des membres de sa famille, portés par des couleurs tendres et cette ligne en arabesque souvent éblouissante, tous exaltent les thèmes de la famille, des enfants et de la nature. L'art, l'amour et la religion à nouveau réunis.


Jusqu'au 21 janvier. Tel : 01 40 49 48 00.
Catalogue : "Maurice Denis", édition RMN, 288p., 44 euros.
"Maurice Denis", Hors Série Connaissance des Arts, 9euros.

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