Escalade dans le conflit entre la Somalie et l'Ethiopie

L'Ethiopie, principal allié des Etats-Unis dans la Corne de l'Afrique, a engagé ces derniers jours son armée en Somalie arguant que l'implantation d'un mouvement islamiste puissant chez son voisin livré au chaos depuis quinze ans constituait une menace intolérable pour sa sécurité.

C'est l'escalade dans la bataille. L'Ethiopie, principal allié des Etats-Unis dans la Corne de l'Afrique, a engagé ces derniers jours son armée en Somalie arguant que l'implantation d'un mouvement islamiste puissant chez son voisin livré au chaos depuis quinze ans constituait une menace intolérable pour sa sécurité. Pour Addis Abeba, les tribunaux islamiques constituent une menace à plus d'un titre, selon un haut responsable du ministère éthiopien des Affaires étrangères. Ils "soutiennent et arment des opposants politiques, des séparatistes éthiopiens qui menacent la sécurité de notre pays", a déclaré ce responsable s'exprimant dimanche 24 décembre sous couvert d'anonymat. Il a indiqué que des "incursions massives de terroristes avaient été signalées ces derniers temps".

Addis Abeba -qui bénéficie d'un programme d'assistance militaire américain depuis 2002, notamment dans le contre-terrorisme- a la même analyse que Washington sur la nature d'une partie des islamistes somaliens. Selon les deux capitales, ils sont liés au terrorisme international et particulièrement au réseau Al-Qaïda d'Oussama ben Laden.

Mi-décembre, Washington a ainsi estimé qu'Al-Qaïda avait désormais pris le contrôle des tribunaux islamiques.
"Le Conseil des tribunaux islamiques est désormais contrôlé par des individus appartenant à des cellules d'al-Qaïda", a affirmé le 14 décembre la secrétaire d'Etat adjointe aux Affaires africaines, Jendayi Fraser: "les plus hauts responsables des tribunaux sont des extrémistes purs et durs, ce sont des terroristes".

Début 2006, Washington a apporté un soutien financier à une coalition de chefs de guerre somaliens pour contrer les islamistes. L'opération s'est soldée par un fiasco qui a permis aux islamistes de prendre la capitale puis la majeure partie du centre et du sud du pays en quelques mois, avec à leur tête cheikh Hassan Dahir Aweys, répertorié comme terroriste par les Etats-Unis.

Cheikh Aweys a multiplié les appels au "jihad" (guerre sainte) contre l'Ethiopie, pays majoritairement chrétien, en "oubliant que notre pays compte une forte population musulmane depuis des siècles", souligne le responsable éthiopien. Aux yeux des Ethiopiens, la perspective de voir le chef des islamistes s'imposer en Somalie est inacceptable, du fait de son passé et de sa volonté de rassembler tous les Somalis, ethnie implantée à Djibouti, au Kenya et en Ethiopie, dans la région de l'Ogaden.

Adepte de la "grande Somalie", cheikh Aweys a d'ailleurs participé dans les années 70 à la guerre de l'Ogaden et l'Ethiopie l'accuse d'avoir par la suite organisé des attentats sur son sol. La Somalie et l'Ethiopie s'étaient affrontées après des revendications territoriales de l'ancien dictateur déchu Mohamed Siad Barre qui voulait créer une "grande Somalie" englobant Djibouti, ainsi qu'une partie de l'Ethiopie et du Kenya. La chute de Siad Barre en 1991 a précipité la Somalie dans la guerre civile. Ce conflit toujours en cours a permis à Addis Abeba de tisser de solides alliances en Somalie. Aussi, quand cheikh Aweys a pris en juin la direction du Conseil suprême islamique de Somalie (SICS), Addis Abeba a immédiatement pris fait et cause pour un de ses plus anciens et plus farouches ennemis somaliens, l'actuel président Abdullahi Yusuf Ahmed, fondateur en 1998 de la région autoproclamée autonome du Puntland (nord-est du pays). Depuis, Addis Abeba n'a cessé de prévenir que l'Ethiopie n'hésiterait pas à lancer une opération militaire d'envergure contre les islamistes s'ils s'attaquaient au gouvernement de transition.

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