Et si vous lâchiez votre télécommande pour passer de l'autre côté du petit écran ? La proposition peut sembler absurde, pourtant les chaînes de télévision commencent à y réfléchir très sérieusement. Inspirés par le succès croissant des sites communautaires sur la toile, les patrons de l'audiovisuel songent de plus en plus à faire collaborer les téléspectateurs à la conception de leurs programmes, bref, de transformer leur audience en réservoir de nouveaux contenus, comme ils en ont débattu ce matin à la conférence de l'Idate à Montpellier.

"Le développement de la vidéo en ligne sur le web est en train de modifier en profondeur l'industrie des médias", analyse Tony Dunaiff, vice-président de Brightcove, une plate-forme de diffusion sur Internet, "la démocratisation des outils met la production de contenus à la portée de tout le monde". Ainsi, alors qu'ils n'existaient pas il y a deux ans, l'américain YouTube, récemment racheté par Google, ou encore MySpace propriété de News Corp, drainent des audiences colossales et font trembler le monde de l'audiovisuel.

"En quelques années, la multiplication et la popularité des sites communautaires ont fait d'Internet un formidable outil de mise en valeur de l'ego", souligne Laurence Meyer, consultante à l'Institut de l'audiovisuel et des télécommunications en Europe. Selon elle, "cette tendance suppose à terme que les chaînes de télévision s'éloignent du modèle de massmedia pour se rapprocher d'un système plus centré autour de l'individu".

Et en la matière, les initiatives développées sur le web 2.0 en matière de vidéo préfigurent peut-être de ce que sera la "TV 2.0". Sentant le vent tourner, TF1 a lancé en juin dernier sur Internet sa propre plate-forme multimédia communautaire, baptisée WAT. "Un formidable laboratoire pour la chaîne", explique François Pélissier, le directeur adjoint du projet. Son objectif, "c'est de porter tous ces contenus sur le petit écran", poursuit-il. Ainsi à partir de vendredi prochain, TF1 diffusera chaque semaine une émission proposant une sélection des vidéos les plus populaires dénichées sur son site.

Avis aux amateurs, la diffusion des clips retenus sera rémunérée à hauteur de 100 euros. Certes, cette somme reste très inférieure aux budgets dont disposent les professionnels de la production audiovisuelle, mais la chaîne réfléchit à la mise en place d'un système de partage de revenu avec ces producteurs amateurs, en fonction du trafic qu'ils pourront générer sur le net. Si la télévision change, la loi de l'audimat perdure.