Dans le labyrinthe mental d'une actrice

Dernier opus de David Lynch, "Inland Empire" explore le labyrinthe mental d'une actrice amoureuse, incarnée par l'extraordinaire Laura Dern.

Cinq ans après "Mulholland Drive", le réalisateur de " Elephant man" revient, plus énigmatique que jamais. Tourné entièrement en numérique, "Inland Empire" déroutera les amateurs de belles images dont le cinéaste américain les avait régalés mais hypnotisera ceux qui se laisseront emporter dans ce maelström de visions à la tonalité très sombre que l'on peut voir en boucle, sans début ni fin.

Explorant la vie intérieure d'une actrice amoureuse, le film-gigogne plonge d'emblée dans l'univers du fantasme et sans aucun fil narratif joue de la confusion permanente entre le rêve et la réalité, entre la vraie vie et le cinéma, entre sentiments vrais et joués, ouvrant sans ordre une multitudes de portes qui donnent sur l'inconscient, comme autant de départs de récits virtuels.

Certains moments ont l'intensité de cauchemars vécus en temps réel, d'autres provoquent le vertige des jeux de miroirs répétés à l'infini, d'autres encore ressemblent à des énigmes de jeu vidéo. Le tout a la fantaisie d'une oeuvre d'imagination libérée de toutes les contraintes, économiques, esthétiques, narratives.

Financé par StudioCanal, David Lynch a composé une partie de la musique de ce film-fleuve de près de trois heures, foisonnant autant qu'épuisant. "Inland Empire" tient son nom du quartier de Los Angeles où habite Lynch (ce qui est sans doute une piste). Le film est de bout en bout tendu par Laura Dern qui a déjà tourné pour lui dans "Blue Velvet" (1986) et "Sailor et Lula" (1990) et qui joue ici le rôle d'une actrice d'Hollywood, lieu de perdition mentale où "les stars font des rêves et où les rêves font les stars".

Dédoublée dans le rôle de Nikki (l'actrice du film de David Lynch) et dans celui de Susan (l'interprète du film qu'elle est en train de tourner), Laura Dern incarne avec une vérité confondante les visages les plus divers de l'effroi, de l'angoisse, du sado-masochisme, de l'érotisme.

Tout commence par une bonne nouvelle (ce sera la seule): Nikki décroche un rôle dans le remake d'un film inachevé dirigé par un metteur en scène célèbre (Jeremy Irons). Mais très vite les choses se compliquent. Car sur le plateau, elle tombe amoureuse de son partenaire (Justin Theroux, très drôle), lequel est un séducteur invétéré. Or, le mari de Nikki (Peter Lucas) est jaloux jusqu'à la folie.

A partir de là, Nikki entre et sort de son propre personnage comme à travers un miroir sans fond et de flash-backs en fantasmes passe de l'usine à rêves d'Hollywood au monde glauque de la prostitution en Pologne, dont elle pourrait bien être issue. Chemin faisant, elle perd tous ses repères. Le spectateur aussi. Ce qui n'est pas la moindre réussite de ce film unique, novateur à plus d'un titre.

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