La demande de transfèrement des membres de l'Arche de Zoé transmise aux autorités tchadiennes

Le ministère français de la Justice a annoncé ce jeudi soir qu'il a adressé aux autorités tchadiennes une demande de transfèrement pour les six membres de l'Arche de Zoé. Après deux mois de crise, le retour en France de ces derniers, condamnés hier à 8 ans de travaux forcés, pourrait s'effectuer dans les prochains jours, si le gouvernement tchadien le permet.

La France, par le biais de sa ministre de la Justice Rachida Dati, a demandé jeudi au Tchad le transfèrement des six membres français de l'Arche de Zoé condamnés mercredi à N'Djamena à 8 ans de travaux forcés, a annoncé ce jeudi la Chancellerie. Selon leur avocat tchadien, les six condamnés sont très affaiblis par leur grève de la faim entamée le 8 décembre, et étendue à une grève de la soif après la proclamation du verdict. Ils avaient fait parvenir dans la journée une demande de transfèrement au Quai d'Orsay.

Condamnés également à verser solidairement 6,25 millions d'euros de dommages et intérêts aux familles des enfants, une commutation de leur peine est possible en vertu de l'accord judiciaire de 1976 signé entre la France et le Tchad. Albert Pahimi Padacké, ministre tchadien de la Justice, se dit prêt à confier les accusés aux autorités françaises, mais rappelle que "toute commutation de peine ne peut se faire qu'avec l'accord des autorités tchadiennes." Une fois en France, les accusés seront soumis au régime d'application des peines français, leur ouvrant la possibilité d'une libération conditionnelle à mi-peine.

Le jugement rendu le 26 décembre par la cour de N'Djamena marque une étape importante de la crise déclenchée le 25 octobre. L'arrestation par la police tchadienne de neuf ressortissants français à Abéché alors qu'ils préparaient l'évacuation par avion de 103 enfants africains, marquait alors le début d'un imbroglio judiciaire, politique et diplomatique.

La justice tchadienne a prononcé un verdict qui, malgré les doutes émis sur la régularité de la procédure, malgré les supposées pressions politiques pesant sur les magistrats, lui permet de réaffirmer sa souveraineté. Les cinq jours de procès, s'ils ne répondent pas à toutes les questions, ont apporté un éclairage sur trois faits: l'acquittement du maire et du secrétaire général de Tiné; la dissimulation de l'identité et de la situation réelle des enfants par les deux intermédiaires tchadiens; la volonté cachée de l'Arche de Zoé d'envoyer les enfants dans des familles d'accueil en France.

A l'issue de ce procès, un nouvel équilibre diplomatique se dessine entre la France et le Tchad, dont les relations sont ambiguës. Un millier de militaires français sont en place au Tchad depuis 1986 dans le cadre de l'opération Epervier, alors qu'aucun accord de défense n'existe entre les deux pays. La France soutient le régime d'Idriss Déby, ce qui lui vaut l'hostilité de l'opposition et des rebelles tchadiens. Les manifestations anti-Français dans les rues de N'Djamena, avec l'accord tacite du gouvernement, illustraient la situation délicate de la diplomatie française face au double jeu du président tchadien, soucieux de ne pas apparaître comme soumis à l'ancien colonisateur, mais dépendant du soutien de Paris pour se maintenir au pouvoir. L'opinion publique tchadienne a vécu comme une vexation la libération des journalistes français et des hôtesses de l'air espagnoles au cours d'un voyage du président Sarkozy, et l'intention de ce dernier de venir chercher les autres ressortissants français.

Alors que la France multipliait les efforts, depuis plusieurs mois, pour la mise en place d'une force de maintien de la paix au Darfour, l'affaire de l'Arche de Zoé rend plus difficile un accord avec les partenaires européens. En effet, ceux-ci craignent de venir s'embourber dans une situation complexe et inextricable. Les ONG travaillant au Darfour et au Tchad subissent une plus grande surveillance des autorités tchadiennes, et la méfiance des populations.

Les 103 enfants que l'équipe de l'Arche de Zoé voulait évacuer résident toujours dans une crèche d'Abéché et n'ont pas retrouvé leur famille, alors que des doutes subsistent sur leur identité. Un rapport conjoint de l'Unicef, du Haut commissariat aux réfugiés de l'ONU, et du Comité international de la Croix-Rouge affirmait que 85 des 103 enfants étaient Tchadiens et possédaient au moins un parent. Rédigé à la suite d'une enquête rapide et confuse auprès des enfants, ces chiffres sont aujourd'hui contestés. Alors que le gouvernement tchadien refuse le recours à des tests ADN pour identifier leurs familles, le gouvernement soudanais estime que nombre d'entre eux sont des ressortissants de son pays.

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