Marie Antoinette, la reine "bling bling"

La dernière reine de l'ancien régime fut adulée lors de son arrivée à Versailles, mais haïe sur l'échafaud. Aujourd'hui, livres, films et expositions en font une super star. A l'aide de 300 superbes oeuvres d'époque, le Grand Palais décortique un personnage ambivalent. Et d'actualité.

Du château viennois de Schönbrunn à la prison parisienne de la Conciergerie, de l' "Autrichienne écervelée" à "Madame déficit", la vie de Marie Antoinette est un scénario bien réel. Née en 1755, dernière fille de l'empereur d'Autriche, destinée très jeune à devenir l'épouse du Dauphin et futur Louis XVI, la petite archiduchesse arrive à Versailles où la Cour, puis le peuple, lui font un accueil enthousiaste, à la hauteur des espérances.

En 1770, elle devient reine et l'intérêt général grandit encore, d'autant que par son caractère bien affirmé, elle joue un rôle majeur dans la vie publique, notamment par son sens artistique, face à un monarque plutôt fade. Mais peu à peu, d'adulée, elle devient détestée, d'abord car elle tarde à donner un héritier au trône, ensuite car elle dépense sans compter de manière pour le moins tapageuse, enfin car elle s'éloigne de plus en plus des préoccupations - dramatiques - du peuple. Elle finira, après le départ du couple royal de Versailles et la fuite à Varennes, sur l'échafaud. Le mythe de Marie Antoinette est créé.

Un mythe soigneusement entretenu par la petite histoire (l'affaire du collier), la Révolution ("donnez leur de la brioche"), de nombreux livres et films, le dernier succès cinématographique étant celui de Sofia Coppola la représentant comme une rebelle férue de mode, sorte de reine fastueuse du tape-à-l'oeil.

C'est ce mythe qu'a voulu contredire ou entretenir, on ne sait trop, l'exposition que lui consacre, à l'aide du Musée de Versailles, le Grand Palais. Une exposition en trois parties, savamment mise en scène par l'homme d'opéra qu'est Robert Carsen en utilisant sa science des décors.

La première scène, en forme de pièces de château, montre la toute jeunesse de Marie Antoinette, dans l'insouciance viennoise. L'acte deux est somptueusement consacré à la nouvelle reine de France, grâce notamment à ses commandes royales, étonnante commode nacrée de Riesenner, fauteuils en hêtre sculpté de Jacob, table à écrire dorée de Weiseler, rien que les meilleurs et plus chers ébénistes du moment. Des tableaux d'Elisabeth Vigée Lebrun et des sculptures de Louis Simon Boizot accompagnent cette période d'épate. La dernière partie, en forme de goulet trop sombre aux cartels illisibles se veut le symbole de sa chute, du Petit Trianon à la prison de la Conciergerie, s'achevant par un dessin de David "Marie Antoinette conduite au supplice".

De cette exposition, très riche et fort documentée, le visiteur ressort repu, car il a eu le plaisir de découvrir nombre d'objets remarquables, notamment le mobilier et les peintures, dans un décorum majestueux. Mais il reste encore en appétit, car il est difficile de saisir le pourquoi de cette manifestation non commémorative. Est-ce pour entretenir, une fois encore le mythe ... ou est-ce, parce qu'on y consacre une régnante "bling bling", qui après avoir entretenu l'espoir, a déchanté?

Jusqu'au 30 juin, Grand Palais, Paris. Renseignements: www.rmn.fr

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