Malaise dans le travail

Chaque semaine, découvrez les chroniques sur la vie au bureau réalisée par Sophie Péters. Anecdotes, conseils, expériences : pour sourire mais aussi mieux se sentir dans son job.

On a envie de paraphraser le titre de Freud «Malaise dans la civilisation?» après avoir assisté vendredi et samedi dernier à La Défense au colloque de la SF Coach. à la tribune, des esprits brillants, historiens, philosophes, psychanalystes, médecins, sociologues. Tous sont venus débattre sur le devenir du travail. Tous arrivent à une même conclusion : le malaise est immense.

En question, ce besoin du « tout » : « tout tout de suite », « tout se maîtrise », « tout s'explique », qui érode le vivre ensemble. Une folie quantitative s'est emparée des gestionnaires obsédés par le mythe de l'individu homogène : productivité, performance, maîtrise de soi. Résultat : Catherine Blondel Coach et psychanalyste voit venir des clients avec les mêmes demandes « mieux gérer les autres », « optimiser mes relations », « tenir le rythme, le poste, les objectifs ». Sa conclusion ? « Le travail ne remplit plus sa fonction d'insertion et de reconnaissance. Ce qui compte aujourd'hui n'est plus de produire des richesses mais d'être rentable. » Un néolibéralisme qui ne donne plus le choix. « Devons-nous devenir des militants de la révolte ? » interroge alors Monique Brillaux, psychiatre, dirigeante d'un hôpital de jour. Elle témoigne du délire protocolaire, des impératifs de profit qui se sont emparés du monde médical. La logique purement économique y fait des ravages. Elle gangrène la relation au patient, ôtant le goût du soin des autres. « Cela a un effet de sidération sur les équipes. Ils ne savent plus où ils sont, quelle est la nature de leur travail : gérer ou soigner ? On nous déresponsabilise en voulant calibrer les patients », poursuit le médecin.

Même chose dans l'entreprise. L'historien du travail Hazem Ben Aïssa estime que le passage du poste de travail à la compétence puis à la performance est cause de nombreux maux. « L'individu doit faire preuve de son efficacité et il est géré en fonction de référentiels. Le principe du marché est au coeur de l'entreprise avec ses benchmarks internes, ses pratiques d'appréciation et de contractualisation, son management par objectif, et ses rémunérations variables. Le travail devient un lieu de conflit de rationalité entre performance économique et développement de soi. » Et Hazem Ben Aïssa d'interroger lui aussi l'assemblée : « Quels nouveaux compromis entre souffrance et lutte ? » En fustigeant psy et coach de tous bords qui voudraient s'engouffrer dans la course à la gestion... celle du stress ! « Comme si c'était un débordement de capacité du sujet. Mieux vaudrait lui trouver des solutions d'adaptation. » Les salariés souffrent d'un manque d'espace d'expression où ils peuvent construire leur identité et apporter une contribution au changement.

C'est donc l'organisation qu'il faut revoir, une histoire collective qu'il faut reconstruire et non chercher à faire rentrer chacun dans le moule. Attention mesdames et messieurs les coachs?! Votre discipline ne doit pas être une façon de faire accepter l'inacceptable.

La souffrance au travail, c'est l'impasse d'un modèle où on a sacrifié l'expression et l'identité au nom de la rentabilité et de la performance.?»

Azem Ben Aïssa, historien du travail.

Commentaire 1
à écrit le 01/04/2010 à 6:56
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