L'Afrique du Sud a un devoir de réussite économique

Spécialiste du continent, le directeur Afrique chez EADS, a un avis particulièrement pointu sur le pays hôte de la dix-neuvième Coupe du monde. Intime de l'ex- président Thabo Mbeki, il rappelle les enjeux déterminants qui attendent les Sud-Africains.

L'Afrique du Sud est-elle au rendez-vous de la Coupe du monde ?

C'est un pays en pleine mutation. Certes, on parle beaucoup d'insécurité. Mais ce n'est pas une spécificité sud-africaine. Elle est due à l'immigration clandestine. Ce n'est pas facile à gérer dans une contrée de cette taille et la façon dont l'habitat est organisé dans les zones urbaines et péri urbaines. Mais le potentiel touristique du pays est connu et reconnu. La gestion du patrimoine cynégétique est remarquable. Les communautés locales sont associées dans chaque grande réserve. L'Afrique du Sud n'est pas une réserve naturelle pour les pays occidentaux qui viendraient y trouver soit des ressources écologiques soit des ressources stratégiques en terme de minerais. Ce pays a de véritables leviers technologiques qui lui permettent de soutenir le continent du Nord au Sud. Les dirigeants sud-africains ont réussi à maintenir l'équilibre en créant des emplois peu qualifiés pour régler le problème du chômage et le développement de grands partenariats industriels qui tirent le pays vers le haut. L'objectif du gouvernement est de passer d'un pays en développement à un pays émergent.

En a-t-il la capacité ?

C'est un pays à la croisée des chemins qui a compris sur le plan économique quels étaient les enjeux. Les dirigeants savent que s'ils se concentrent exclusivement sur la main d'oeuvre à bas coûts et peu qualifiée, ils vont être en concurrence directe avec la Chine et le Pakistan. Ce ne sera pas simple. Ils doivent résorber le chômage de masse. La base doit sortir de la misère et les inégalités doivent être résorbées. On ne peut pas résoudre cela en stigmatisant une population ou une autre. Il est important de ne pas séparer la base de l'élite. Il est important de créer une élite qui permette à la base de s'exprimer, de sortir de situations de misère entre zones rurales et urbaines. La « fertilisation croisée » doit permettre à chacun d'avancer dans le bon sens en fonction de ses intérêts.

Certaines mauvaises langues parlent de Nelson Mandela comme d'un produit de communication...

C'est une icône ! Il est le symbole qui montre que le pire n'est pas certain. Difficile de savoir qui a fait le plus pour ce pays. Mandela montre néanmoins qu'on peut faire évoluer une nation dans la paix. Il rayonne de l'intérieur. C'est un symbole humaniste. Dès qu'il apparaît, les antagonismes politiques s'effacent. J'ai rencontré de grandes figures du continent dans les luttes armées et dans les maquis. Avoir une figure comme celle-là fait que l'Afrique du Sud a gagné la guerre de la communication. Il y a eu un consensus mondial incroyable autour de Mandela...

Le président actuel n'a plus qu'à récolter les fruits semés par Mandela et Mbeki ?

Jacob Zuma contribue à consolider un processus initié depuis de nombreuses années par Mbeki et Mandela. Zuma est soutenu par un parti super puissant. Il a compris les enjeux stratégiques. L'Afrique du Sud a un devoir de réussite et d'exemplarité. Pas seulement sur le plan sociétal avec cette société arc-en-ciel. L'Afrique du Sud maintient le continent à ce niveau. Le Nigeria, par exemple, développe une technologie spatiale de façon très intelligente. Le travail n'est pas très facile pour lui car il fait face à une crise économique que nous connaissons tous. Il y a des querelles partisanes. La réalité des faits stipule que le passé existe, il ne disparaît jamais. Zuma sait écrire l'avenir en tenant compte du passé.

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