
Sa parole était devenue rare au moment où est débattue la « mère des réformes », sa réforme des retraites. Ce mardi à l'aube, Emmanuel Macron a repris pied sur le terrain médiatique à Rungis après plus d'un mois de silence. Un passage obligé des présidents, auquel il s'est plié dans la fraîcheur matinale, vêtu de la veste blanche des 13.000 employés du plus grand marché alimentaire du monde, représentants de « la France qui travaille tôt », selon l'Elysée.
Au milieu des carcasses suspendues et des meules de fromage, les échanges ont porté sur les conditions de travail « difficiles » - dixit Emmanuel Macron - sur place dans le « ventre de Paris » avant de basculer immanquablement sur la réforme des retraites. « Tout le monde a du bon sens », a-t-il martelé au sujet du report voulu à 64 ans de l'âge de départ à la retraite.
« Il faut qu'on travaille plus longtemps »
« On sait tous que, vivant plus âgés, il n'y a pas de miracle: si on veut préserver un système par répartition, il faut qu'on travaille plus longtemps (...). Je préfère la vérité qui fâche (...) à un mensonge qui rassure », a-t-il ajouté.
Les mots du chef de l'Etat sur le projet de loi controversé n'ont pas suscité de réactions particulières parmi la foule de fromagers, tripiers et autres volaillers, dont la plupart arpentaient les artères de la ville-entrepôt depuis minuit la veille.
Manutentionnaires et artisans ont surtout soulevé les problèmes de leurs conditions de travail, à savoir les salaires qui stagnent en période d'inflation, l'usure professionnelle provoquée par le port des charges lourdes et surtout la pénurie de main d'œuvre. Autant de préoccupations qui font écho aux tensions dans le monde du travail, à l'heure du télétravail généralisé et de la grande démission.
La « valeur travail », clin d'œil à la droite
« Les gens, ils dorment, ils ne veulent pas se lever à 2 heures du matin », a fustigé un des bouchers en référence aux difficultés des nouvelles halles de Paris à trouver des collaborateurs bien formés. Il y a « trop de social » d'après ce boucher, suscitant des réactions de la députée LFI du Val-de-Marne Rachel Keke et d'Emmanuel Macron.
S'il juge qu'il ne faut pas « moins de social » mais que « le travail continue à payer davantage », Emmanuel Macron s'est emparé de ce thème aussitôt qu'il a été soulevé et déroulé un discours sur « la valeur travail » chère à ses ministres mais brocardée par une partie de la Nupes, à commencer par la députée Sandrine Rousseau qui y voit une « valeur de droite ». La référence n'a rien d'hasardeuse quand la majorité présidentielle s'évertue à convaincre LR de voter le texte de loi sur les retraites.
Une réforme parmi d'autres
Soucieux d'apparaître au-dessus de la mêlée parlementaire, Emmanuel Macron s'est contenté d'appeler au calme dans l'Hémicycle et la rue sans s'appesantir sur les détails de la réforme. Et ainsi tenter de la replacer dans le cadre de sa politique de plein-emploi, promesse centrale de son second quinquennat.
« Moi je crois dans le travail (...) Toutes les réformes que l'on fait vont dans ce sens-là », a revendiqué le Président de la République à plusieurs reprises, vantant les réformes passées notamment sur l'apprentissage et en préparation dans les lycées professionnels. Et remettre la France au travail, aurait-il presque pu proclamer avec ses accents sarkozystes du jour.
Les bons chiffres de l'économie russe ? « C'est de la propagande » Interpellé en marge du déplacement, à propos des chiffres officiels sur la contraction du produit intérieur brut (PIB) russe de 2,1% en 2022, le président français a répondu: « C'est eux qui disent -2%, moi je dis que c'est beaucoup plus ». « Ils font du fric avec le gaz qu'ils vendent à d'autres mais le reste de l'économie souffre beaucoup. Donc je ne crois pas du tout à ces chiffres », a affirmé le chef de l'Etat. Les statistiques russes « c'est de la propagande, c'est un pays qui n'est plus un pays démocratique, libre, avec un institut (de statistiques) indépendant », a-t-il jugé. Emmanuel Macron a souligné en outre que « des centaines de milliers de jeunes (...) sont partis pour ne pas être mobilisés » et que les Russes avaient « perdu plein d'opportunités » d'un point de vue économique.
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