Après le 1er mai, le blocage politique de la France ?

POLITISCOPE. Quelles suites donner après ce 1er mai ? Malgré leur mobilisation réussie pour la fête du travail lundi, les syndicats craignent le pourrissement. Face à l'impasse, le gouvernement tente de diviser l'intersyndicale et joue la CFDT contre la CGT. Sur le plan politique, les positions se figent sans offrir de débouché clair ni à droite, ni à gauche.
Marc Endeweld
(Crédits : STEPHANE MAHE)

À Paris, les manifestations syndicales du 1er mai ont attiré beaucoup de monde malgré les vacances. Si l'on en croit les chiffres de la préfecture de police, c'était même la deuxième plus forte affluence dans les rues de la capitale depuis le début du mouvement contre la loi du gouvernement sur les retraites. Et pourtant : l'exécutif compte encore sur un éventuel essoufflement de la mobilisation sociale d'ici les vacances d'été.

Cette carte classique du pourrissement ne pourra néanmoins résoudre l'équation politique qui est aujourd'hui posée à la France : car c'est l'ensemble de l'arc politique français qui est dans l'impasse. Certes, pour s'en sortir, le gouvernement tente une nouvelle fois de diviser le front syndical, de jouer la CFDT contre la CGT. Mais, finalement, la plus grande latitude d'Elisabeth Borne lui vient du blocage du champ politique français. Si l'on se place du coté des formations politiques, de gauche, de droite, du centre, de l'extrême droite et de l'extrême gauche, rien ne permet de penser, aujourd'hui, que l'une d'entre elle pourra récupérer un jour la majorité qui semble de plus en plus introuvable dans notre système institutionnel.

Alors oui, chez les alliés du président, on tente désormais des ballons d'essai médiatiques, histoire de prendre ses distances et ne pas insulter l'avenir. Comme François Bayrou ce week-end qui n'a pas hésité dans le JDD de pointer la responsabilité du gouvernement dans la crise actuelle, en estimant que « rien n'a été clairement expliqué », faute d'avoir porté « le débat sur l'inéluctable rééquilibrage du système ». Face à la « blague » du discours des oppositions, l'élu béarnais ne comprend pas pourquoi « le gouvernement n'ait pas présenté aux Français » les « chiffres de la comptabilité nationale ». Et le leader du Modem d'exposer une « bonne méthode » de gouvernement : « Aucune grande réforme ne peut être conduite si l'on n'a pas porté l'exigence de totale information et de prise de conscience partagée », fait ainsi valoir François Bayrou, en estimant que « les fractures, les résistances et les réticences » viennent « quand l'organisation du pouvoir se réduit à une confrontation entre un "sommet" qui ne dit pas qui il est et ce qu'il veut et une base à qui on ne demande que d'obéir ».

Reste que ni François Bayrou ni Édouard Philippe, officiellement alliés à l'Élysée, n'osent proposer un autre projet aux Français. Comme tous les leaders politiques, leur horizon est désormais fixé sur 2027. Pas question pour eux donc de voter une éventuelle nouvelle motion de censure au Parlement. Idem, bien sûr, pour les Républicains. Ceux-là n'ont pas fini d'imploser. La « séquence » sur les retraites aurait été terrible pour le parti historique de la droite, perdant sur tous les tableaux. Devant faire face à leurs « frondeurs », les LR n'apparaissent plus comme un partenaire crédible pour le gouvernement, à la fois incapables de constituer une force d'appoint au Parlement et ayant perdu tout crédit d'opposant efficace aux yeux des Français. Le grand rêve de Nicolas Sarkozy que les LR puissent s'allier à Renaissance semble être tombé à l'eau.

À gauche, l'ambiance est à la méthode Coué. Si l'écologiste Sandrine Rousseau en appelle au retour de la « guérilla » dans l'hémicycle dans les prochains jours, un voeu partagé par ses camarades de la NUPES, les ambitions se multiplient pour la présidentielle de 2027, un mouvement propice à la cacophonie. Ainsi, alors que la liste des prétendants s'allongent, l'ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve tente péniblement de revenir dans l'espace de gauche en multipliant les critiques contre Jean-Luc Mélenchon sans pour autant proposer un projet aux Français.

De son coté, Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT, appelle les parlementaires « à prendre leur responsabilité » et à voter la proposition de loi du groupe Liot, déposée le 20 avril, qui vise à repasser l'âge légal du départ à la retraite à 62 ans, et non 64. Si les 147 députés de la NUPES ont apposé leur signatures à côté de celle de Bertrand Pancher, le coprésident du petit groupe indépendant Liot, et de 16 autres membres de ce groupe, il manque encore de nombreuses voix pour que cette proposition de loi puisse avoir des chances d'être adoptée par l'Assemblée Nationale le 8 juin prochain.

À l'extrême droite, Marine Le Pen aura finalement très peu parlé des retraites et du travail lors de son discours au cours du congrès du Rassemblement National qui se tenait ce 1er mai au Havre. Pour la leader du RN, le mouvement social contre la loi sur les retraites n'a plus lieu d'être et préfère multiplier les critiques à l'égard d'Emmanuel Macron. Elle ne dit pas pour autant, comment elle espère récupérer le pouvoir dans quatre ans. Autant dire que les responsables politiques français semblent bien démunis après ce 1er mai.

Marc Endeweld.

Marc Endeweld
Commentaires 11
à écrit le 03/05/2023 à 14:24
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La Démocratie, ce n'est pas que l'Election; c'est aussi le Contrôle et la Sanction de l'Action des élus. Aucun pays démocratique n'est allé jusque là; imaginons un pays fonctionnant comme une entreprise privée avec donc une consultation annuelle (on ...

à écrit le 03/05/2023 à 9:50
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Mobilisation réussie, c'est vite dit : c'est toujours les mêmes professionnels de la manif qui défilent dans les rues. Qui ne sont pas si nombreux que ça. Et pas vraiment le peuple en colère, mais on préfère se vautrer dans l'éternelle fiction roma...

à écrit le 03/05/2023 à 9:33
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Quel blocage politique ? Les LR n'ont effectivement pas voulu assumer leurs propositions de campagne et voter le report de l'âge de départ en retraite à 64 ans, par lâcheté politicienne. Mais la loi a été adoptée légalement. Michel Rocard ne s'était...

à écrit le 02/05/2023 à 18:01
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Il faudrait peut-être arrêter avec tous ce psychodrame hors sol. Les français ont préféré partir en vacances que défiler, seules les groupies du Grand Soir font mine d’y croire encore. Heureusement ces faux patriotes playmobil ne sont guère nombreux,...

le 03/05/2023 à 3:08
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La France va bien. Il y en a qui ont besoin d'aller consulter d'urgence.

à écrit le 02/05/2023 à 15:33
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Avant la guerre civile qui pointe son nez, il y a depuis les gilets jaunes: la gurilla urbaine. Dans un pays en si mauvaise position économique et politique, nous glisserons inévitablement vers le pire et ce ne sont pas quelques marques d'attendrisse...

le 02/05/2023 à 19:37
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Je tiens a rappeler que Hollande avait viré Macron et sa loi travail lors de son quinquennat car Macron avait été son seul et unique ministre a provoquer la grève. Sa loi avait été reprise par El Komeri. Rien d'étonnant que les français soient dans l...

le 02/05/2023 à 23:06
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Dans ce cas boycott de la consommation .. les CRS ne changeront rien à l affaire …

à écrit le 02/05/2023 à 9:55
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Si les syndicats cèdent aux chant des sirènes, ils perdront la discipline de leurs bases, cela sera le retour de la "chienlit" !

le 02/05/2023 à 18:58
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La "chienlit" c'est quand on n'a plus affaire à des syndicats, mais à des coordinations, comme les mouvement des Gilets Jaunes que seul unissait le rejet d'Emmanuel Macron car pour le reste, on trouvait tout et son contraire, du zadiste comme du bour...

le 02/05/2023 à 23:08
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C est clair le 1 er qui va à l elysee est grillé !! Si la cfdt y va je rend la carte et vais chez sud !!

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