![Le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave et le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.](https://static.latribune.fr/full_width/2380557/thomas-cazenave-bruno-le-maire.jpg)
Les nuages s'accumulent au-dessus du ministère des Finances. Après le sévère avertissement du Fonds monétaire internationale (FMI) la semaine dernière, le gouvernement s'apprête à devoir affronter les tirs de barrage des oppositions parlementaires. Le député de la France Insoumise (LFI) et président de la Commission des Finances, Eric Coquerel, a confirmé, ce mardi, que son groupe allait déposer une motion de censure sur le budget en fin de semaine. Le texte devrait être présenté en début de semaine prochaine au Palais Bourbon. Fin avril, le groupe de gauche avait réclamé un budget rectificatif au gouvernement pour l'année 2024.
Restés sans réponse, les parlementaires ont décidé de passer à l'offensive. « C'est une question grave, car si notre assemblée n'a pas pu voter un budget depuis deux ans, le budget reste en théorie une prérogative essentielle de l'Assemblée », a déclaré l'élu de Seine-Saint-Denis, lors d'un point presse au Palais Bourbon. Or, d'après les derniers chiffres, « nous avons un nouveau budget qui fait le choix de réduire la dépense publique pour s'adapter aux nouveaux chiffres de croissance du gouvernement ». L'exécutif dit que « c'est indolore », mais « très franchement, il y a bien une aggravation de la situation dans les ministères ».
Une motion le même jour que le couperet de l'agence Standard and Poor's
À quelques jours du couperet de l'agence de notation Standard and Poor's, cette annonce remet la pression sur la Macronie en perte de vitesse dans les sondages aux élections européennes. Les communistes et les socialistes ont déjà affirmé qu'ils allaient soutenir cette initiative. Cette motion a cependant peu de chances de passer compte tenu de la composition de l'hémicycle peu favorable au groupe de la France Insoumise. Le groupe LIOT a déjà affirmé que les députés du groupe n'avaient « pas vocation à participer à cette logique », a souligné Benjamin Saint-Huile, porte-parole pour LIOT.
Pour l'heure, Gabriel Attal n'a affronté qu'une seule motion de censure, largement rejetée, en février. Sa prédécesseure Elisabeth Borne a réussi à en surmonter 31. Mais l'exécutif avait échappé de peu à un renversement (9 voix) l'année dernière lors du débat houleux sur la réforme controversée des retraites. Le groupe LIOT avait réussi à rassembler un grand nombre de voix suscitant de vives inquiétudes dans les rangs de la majorité.
Eric Coquerel dénonce « un tour de passe-passe »
En pleine tempête budgétaire, le gouvernement avait annoncé une première salve de coupes en février de 10 milliards d'euros dans le budget de l'Etat. Mais pour parvenir à ces objectifs de réduction des déficits, le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, a finalement dévoilé une nouvelle série de coupes au printemps de 10 milliards d'euros à réaliser cette année.
« Tout cela est consternant et antidémocratique », a dénoncé Eric Coquerel. Pour rappel, les lois de finances autorisent l'exécutif à sabrer dans le budget de l'ordre de 1,5% des dépenses chaque année par décret, soit 10 milliards d'euros. Le ministre du Budget a annoncé qu'il passerait par « un projet de loi de fin de gestion ». Dans les faits, « ces coupes représenteront 4% des dépenses publiques qui auront été baissées sans projet de loi de finances rectificatives », a-t-il ajouté.
Le Rassemblement national (RN) doit également déposer une autre motion de censure
Le RN a également annoncé son intention de déposer une motion de censure. « Elle arrive », a confirmé sur TF1 la députée Laure Lavalette, soulignant que « ça va être l'occasion de voir ce que vont faire Les Républicains », selon que la droite décide de voter la censure ou « d'être une fois de plus la béquille du gouvernement ».
De son côté, le député LR Philippe Juvin a assuré défendre « l'idée d'une motion de censure, dans l'hypothèse où, sur un des textes budgétaires (...), nos propositions seraient refusées », alors qu'il était invité de l'Association des journalistes parlementaires (AJP). « Nos propositions sont toujours niées, que ce soit sur le budget ou dernièrement sur la fin de vie, donc il y a un moment où même les gens les mieux disposés comme moi (...), on prendra une décision ad hoc », a-t-il argumenté.
Des dialogues de l'Assemblée prévus après les Européennes
Les ministres de Bercy ne sont pas au bout de leur peine. Début mai, le président de la Commission des finances a annoncé le lancement des dialogues de l'Assemblée nationale sur la fiscalité. « Il s'agira de débattre entre les représentants de tous les groupes, de faire un état des lieux et de travailler concrètement sur les recettes publiques », a expliqué l'élu dans un communiqué.
Prévu entre les mois de juin et de septembre, le calendrier de cette commission devra permettre d'aborder « l'impôt sur le revenu, la TVA, la taxation du capital, les dépenses fiscales, les collectivités locales, les prélèvements obligatoires », avant les débats sur le budget 2025. Répondant aux dialogues de Bercy lancés par le gouvernement, cette initiative veut redonner du poids au Parlement sur les questions budgétaires. Mais déjà, les craintes d'un nouveau 49-3 planent au-dessus du prochain budget 2025.
Dette de l'Etat : la France bénéficie « d'une très forte demande » des investisseurs (Agence France Trésor) Pressé par la décision de Standard and Poor's du 31 mai prochain, le gouvernement est critiqué de toutes parts. Le député Les Républicains, Philippe Juvin, a récemment lancé une commission d'enquête sur la croissance de la dette depuis 2017. Dans le cadre de cette instance, le patron de l'agence France Trésor en charge de la gestion de la dette de l'Etat, Antoine Deruennes, a voulu se montrer rassurant ce mardi 28 mai. « Nous bénéficions la France comme la plupart des pays européens d'une très bonne demande pour les obligations de long terme supérieures à 30 ans », a-t-il déclaré devant les parlementaires. Avec la remontée des taux de la Banque centrale européenne (BCE), les inquiétudes sur la signature de la France et la capacité du pays à rembourser ses créanciers se sont amplifiées. Mais faute de concurrence, la dette de la France aiguise toujours les appétits des investisseurs étrangers. « Le fait qu'il y ait des investisseurs étrangers est une bonne nouvelle, car ce sont des épargnants qui ont confiance dans la France, dans sa signature et sa capacité à rembourser », a déclaré le haut fonctionnaire.