Dette, déficit : le FMI désavoue le gouvernement pour 2027

Le Fonds monétaire international a noirci ses prévisions de déficit pour 2027 à 4,5%, contre 4,3% auparavant. C'est un camouflet pour le gouvernement qui prévoit de revenir sous la barre des 3% (2,9%) d'ici la fin du quinquennat. Malgré les 50 milliards d'euros de coupes budgétaires annoncés, cette révision défavorable plonge la Macronie dans l'embarras à quelques jours de la note fatidique de l'agence Standard and Poor's et des élections européennes.
Grégoire Normand
Le FMI table sur une croissance du PIB tricolore de 0,8% contre 0,7% auparavant.
Le FMI table sur une croissance du PIB tricolore de 0,8% contre 0,7% auparavant. (Crédits : Reuters)

Le répit aura été de courte durée pour le gouvernement. Après des chiffres de croissance meilleurs que prévus au premier trimestre et une légère accélération de l'emploi, l'exécutif va encore devoir déminer le terrain budgétaire. Dans ses conclusions dévoilées ce jeudi 23 mai, le Fonds monétaire international (FMI) a étrillé une nouvelle fois la trajectoire budgétaire de l'exécutif.

« Malgré un ralentissement de la reprise en 2023, l'économie française reste relativement résiliente face au resserrement des conditions financières et à l'affaiblissement de la demande extérieure de la zone euro », a déclaré Manuela Goretti, cheffe de mission pour la France au FMI, lors d'un point presse ce jeudi.

Et d'ajouter : « Les autorités françaises ont mis l'accent sur le rétablissement des marges de manœuvre budgétaires, mais des efforts supplémentaires significatifs seront nécessaires dès 2024 pour parvenir à 4,9% de déficit. » Dans ce contexte, la France  pourrait passer en procédure de déficit excessif au mois de juin.

La note de l'agence Standard and Poor's met la pression

Au mois d'avril, l'exécutif a échappé aux remontrances des agences Moody's et Fitch. Mais les inquiétudes devraient à nouveau gagner les couloirs de Bercy dans les prochains jours. La très influente agence de notation Standard and Poor's doit remettre son bulletin de notes à la fin du mois de mai.

A quelques jours des élections européennes, une sanction ou une note, assortie d'une perspective négative, pourrait plonger la majorité présidentielle dans l'embarras face à ces adversaires politiques prêts à sauter sur l'occasion pour tirer à boulets rouges sur la stratégie budgétaire du gouvernement Attal.

Pourquoi un tel écart entre les prévisions du FMI et de l'exécutif ?

Dans une note de 8 pages, le FMI a donc dégradé sa prévision de déficit pour 2027 à 4,5%, contre 4,3% en avril dernier. De son côté, le gouvernement anticipe dans le Programme de stabilité, envoyé à Bruxelles au printemps, de ramener le solde des comptes publics à 2,9% du produit intérieur brut (PIB) d'ici la fin du quinquennat.

Pourquoi un tel différentiel entre le scénario du gouvernement et celui de l'institution internationale ? Les économistes pointent notamment l'absence de documentation des économies à réaliser. « Les principales mesures de revues et d'économies en dépenses qui sous-tendent l'ajustement prévu restent à identifier ».

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Le gouvernement a certes annoncé un décret de 10 milliards d'euros de coupes budgétaires pour 2024 en février dernier, mais il reste encore 10 milliards d'euros à trouver pour cette année, et 20 milliards d'euros en 2025. Au total, le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, a évoqué 50 milliards d'euros de coupes à réaliser d'ici la fin du mandat d'Emmanuel Macron pour parvenir à ramener le déficit en deca de 3%. Pour 2024, le FMI estime que de nouvelles mesures de l'ordre de 0,4 point de PIB seront nécessaires, contre 0,3% annoncé dans le programme de stabilité pour parvenir à l'objectif de déficit de 4,9%.

En dépit des vastes débats sur le manque de recettes fiscales en France, l'institution de Washington n'a pas évoqué de hausses d'impôts lors de sa présentation. La mission préconise de se concentrer sur « des mesures ciblées visant les dépenses courantes ». Le FMI prône également « un meilleur ciblage des allocations chômage » et « des dispositifs de soutien aux travailleurs et aux entreprises qui pourraient générer des économies ».

Pas de reprise avant 2025

Sur le front de la croissance, les économistes du Fonds ne s'attendent pas à de véritable « reprise » avant 2025. « La croissance du PIB réel devrait progressivement atteindre 1,3% en 2025 contre 0,8% en 2024 », a affirmé Manuela Goretti. C'est « une légère révision à la hausse  pour cette année» par rapport à avril. Au début du printemps, le FMI tablait sur 0,7% en 2024 et 1,4% en 2025. Là encore, il s'agit certes d'une révision favorable pour l'exécutif, mais ce sont des estimations bien inférieures à celles de janvier (1% en 2024 et 1,7% en 2025). Sur le moyen terme, l'organisation internationale table sur un croissance potentielle annuelle de 1% compte tenu du vieillissement de la population française.

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Concernant l'inflation, elle devrait ralentir à 2,3% en 2024 et 1,8% en 2025, soit un niveau inférieur à la cible de la Banque centrale européenne (2%). D'ailleurs, le gouvernement compte sur l'assouplissement de la politique monétaire pour redonner du souffle aux entreprises et aux ménages après une hausse inédite de taux depuis l'été 2022 et la fin du « Quantitative easing » (assouplissement quantitatif ou rachat de titres de dette, ndlr).

Pressées par des conditions financières plus strictes, beaucoup de sociétés et de familles ont réduit la voilure sur leurs dépenses de consommation et leurs projets d'investissements. Mais les mesures de rigueur budgétaire annoncées par l'exécutif pourraient également peser sur la croissance de l'activité tricolore déjà atone.

Un marché du travail « robuste » mais une productivité en berne

S'agissant de l'emploi, les économistes soulignent que les performances du marché sont restées « robustes », mais pointent la faible productivité restée en deçà de son niveau d'avant crise sanitaire. Juste après la pandémie, la croissance de l'emploi a dépassé pendant plusieurs trimestres la croissance du PIB de l'économie tricolore. Dans certains secteurs comme l'industrie, le niveau de la production est même resté inférieur à 2019 alors que le nombre d'embauches a augmenté dans le même temps.

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Cela signifie qu'il faut plus de personnel pour produire moins de valeur ajoutée. Ce phénomène a fait plonger la productivité de l'emploi en France. Les économistes évoquent les nombreuses aides à l'apprentissage et l'embauche de personnel moins qualifié pour répondre aux tensions de recrutement, particulièrement élevées dans le secteur manufacturier. Mais une partie de cette érosion de la productivité dans la plupart des pays riches reste bien mystérieuse pour de nombreux économistes.

A l'Elysée, le chef de l'Etat compte sur le déploiement de l'intelligence artificielle (IA) dans l'économie pour rebooster la productivité. Mais là encore, des économistes proches d'Emmanuel Macron ont exprimé des doutes sur l'impact de l'IA sur la productivité au travail. En effet, une partie des contenus générés par les logiciels d'intelligence artificielle peuvent exprimer des informations fausses ou comportant de nombreux biais. Ce qui, au final, allongerait le temps de travail nécessaire à la vérification. Avec des gains de productivité atones, l'économie française devrait encore tousser dans les mois à venir.

Grégoire Normand
Commentaires 12
à écrit le 25/05/2024 à 22:56
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En 2027 Macron perdra son trône... Il n'en a rien à faire du déficit qu'il laissera voir il va fortement l'agrandir pour mettre son successeur le plus possible dans la galère et tenter de reprendre le trône en 2032...

à écrit le 24/05/2024 à 0:07
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Quand les retraites augmentent plus que les salaires faut pas s étonner … qui payent? Les salariés actuels et futurs … il est temps de mettre les retraités au régime sec qui majoritairement ne sont pas à plaindre . Les plus nantis nous parlent de r...

le 02/06/2024 à 10:06
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Sur les 30 dernières années les retraites ont augmenté en moyenne de 1% c'est bien moins que les salaires et l'inflation. Les retraités perdent du pouvoir d'achat c'est bien connu.

à écrit le 23/05/2024 à 20:51
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A ne rien y comprendre ! 50 ans de recettes toujours plus ultra-libérales et au final, patrata! Le FMI, l'OCDE et autres agences de notation qui décident à la place des élus auraient-ils menti?...

à écrit le 23/05/2024 à 19:45
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Quelle idée d'avoir rappelée Christine Lagarde pour la transférer finalement à la BCE.

à écrit le 23/05/2024 à 19:14
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Des gens payés des salaires à 5 chiffres pour nous dire que l'on dépense trop d'argent en salaires à 5 chiffres ? Ah ben non c'est forcément de notre faute faute pardon. Au moins ils osnt tous d'accord la dessus.

à écrit le 23/05/2024 à 18:50
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Lorsqu'on a un timonier totalement mytho à la barre, il ne faut pas venir s'étonner ensuite.

à écrit le 23/05/2024 à 16:12
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⚠️ Le régime francophobe et communiste de Macron vous offre LA RUINE 🤪📉💀‼️ Pour retrouver notre souveraineté monétaire, reconstruire le tissu industriel français et cheminer de nouveau vers la prospérité économique, l'UPR de François Asselineau prône...

le 23/05/2024 à 17:39
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" communiste " le " régime " d' Emmanuel %Macron ? Vous plaisantez ? Emmanuel Macron est si SERVILEMENT pro-américain qu' il a soutenu contre l' avis d' Angela Merkel la candidate " américaine " à la tête de la Commission de Bruxelles Ursula van De...

à écrit le 23/05/2024 à 15:23
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comment ca, un desaveu?????? mais evidemment que le budget sera sous les 3% en 2028, a l'equilibre en 2040, et excedentaire en 2070, c'est promis jure crache! le bon peuple de gauche tient toujours ses promesses......tiens segolene royal a transforme...

le 23/05/2024 à 17:45
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aber rasch laufen sie ... [ die Lügen ] !

le 23/05/2024 à 19:40
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La promesse d'un équilibre en 2040 est peut-être tenable car en 2040, la démographie aura rendu insignifiant le poids électoral de la clientèle du tandem Macron/Lemaire...

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