Chômage de longue durée : l'impasse dramatique des seniors

Jean Castex a annoncé ce lundi un vaste plan pour les demandeurs d'emploi de 1,4 milliard d'euros. Sa solution : la formation à tout-va, pour que les chômeurs, notamment les inscrits à Pôle emploi depuis plus d'un an, puissent adapter leurs compétences aux emplois non pourvus. Reste un angle mort, véritable tabou français: l'âge, à l'heure où les entreprises sont pour la plupart réticentes à embaucher des seniors quand elles ne les mettent pas en haut de la liste lorsqu'elles lancent des plans de départ. Décryptage.

Christian est comptable. Inscrit à Pôle emploi depuis maintenant près de 18 mois, il ne cesse de répondre à des offres, à solliciter son réseau. À 57 ans, il ne décroche que très rarement des entretiens.

« Personne ne le dit vertement, mais je sais très bien que mon âge est le principal frein à mon embauche. C'est la grande hypocrisie. Employeurs comme chasseurs de tête laissent entendre que je coûte cher et que je suis peu malléable. »

Lui, veut surtout mettre en avant son expertise, son autonomie, sa capacité à dénouer des situations managériales délicates...

Autant dire que les annonces du Premier ministre, ce 27 septembre, laissent Christian de marbre :

« Les formations, j'en ai fait une sur les outils digitaux par exemple, avec l'Apec (l'Association pour l'emploi des cadres). C'est toujours bien d'améliorer ses compétences, mais ça ne va pas changer grand-chose, je reste un senior... formé ou pas !  »

Dégradation de la situation des quinquagénaires

Les chiffres ont tendance à lui donner raison. Le nombre de chômeurs inscrits à Pôle emploi et sans activité a, certes, baissé de 51.000 en août dernier, selon la dernière publication de la Dares de ce 27 septembre, et de près de 320.000 sur quatre mois, mais, par rapport à l'avant-crise sanitaire, la situation des quinquagénaires s'est dégradée.

Les seniors sont les premières victimes du chômage de longue et même de très longue durée, puisque les 55 ans ou plus restent en moyenne inscrits plus de deux ans à Pôle emploi, soit plus de fois plus que l'ensemble des chômeurs.

La plupart des PSE ciblent souvent les plus âgés

Preuve en est, dans les entreprises - les grands groupes notamment-, la plupart des plans dits "de sauvegarde de l'emploi", inscrivent souvent en tête de liste des candidats au départ, les employés les plus âgés: Orange, Airbus, Michelin, SNCF, etc... tous jouent sur les mesures de préretraite pour alléger leur masse salariale. Le sujet est d'autant plus complexe que patronat et syndicats reconnaissent que, lors de la négociation de ces plans, l'inclinaison à faire partir les plus âgés fait l'objet d'un certain consensus. Elle est socialement plus acceptable que pour les plus jeunes.

Sans compter que, quand ils ne sont pas poussés vers le chômage, en France, les salariés du privé prennent en moyenne leur retraite à 62,8 ans (en 2020), bien plus tôt qu'en Allemagne (63,8) ou bien encore en Suède (65,9 ans).

Enfin, quand elles les gardent dans les effectifs, les entreprises ont du mal à faire des propositions de carrière aux plus de 55 ans. Plus un salarié avance dans sa carrière, moins il se forme.

Un phénomène qui serait "culturel", fondé sur des stéréotypes

Une grande partie du phénomène serait culturel. C'est la conclusion d'une mission d'information relative à l'emploi des seniors, présidée par Valérie Six (UDI et Indépendants) et co-rapportée par Didier Martin (LREM) et Stéphane Viry (LR), qui, mercredi 15 septembre, a présenté ses préconisations :

« Il est urgent de changer les représentations et les stéréotypes associés aux travailleurs expérimentés », écrit la mission.

Parmi les 34 solutions avancées, trois axes :

  • « maintenir des salariés expérimentés dans l'emploi »,
  • « renforcer le retour à l'emploi » et
  • « améliorer le passage de la vie professionnelle à la retraite ».

Personne ne pourra critiquer la volonté du gouvernement de mieux accompagner les seniors dans leurs carrières professionnelles. Avant lui, François Hollande et Nicolas Sarkozy avaient fait la même chose.

Sans grand résultat, puisque, pour le maintien en emploi des 55 ans et plus, la France fait partie des pires élèves de l'OCDE : avec un taux d'emploi des 60-64 ans d'environ 33% - même s'il s'est amélioré ces dernières années pour la tranche d'âge juste en dessous, celle des 55-60 ans.

Mais, alors que la nécessité d'une réforme des retraites allongeant la durée au travail va faire débat dans cette campagne présidentielle, la question de notre capacité à maintenir les seniors dans la vie va être cruciale. S'ils doivent travailler plus, ce n'est pas n'avoir pour seul horizon que le chômage !

Commentaires 25
à écrit le 29/09/2021 à 10:48
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Il faut supprimer les charges sur les salaires des plus de 50 ans.

à écrit le 28/09/2021 à 17:31
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La bonne réforme pour les retraites serait une cotisation proportionnelle au salaire et un pension forfaitaire! Le reste ne règle rien!

le 28/09/2021 à 20:43
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Votre truc ne marchera jamais. Personne n'est assez idiot pour se former, travailler durement, avec la perspective d'avoir une pension forfaitaire (nécessairement assez basse) en contrepartie de cotisations proportionnelles. Le système s'effondrera...

à écrit le 28/09/2021 à 14:29
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Ce serait bien de trouver une statistique donnant la répartition des pensions de retraite par déciles dans la population française. Et de savoir combien pèsent dans le système les soixante-huitards partis à 56 ans avec des retraites canons. Mais j...

à écrit le 28/09/2021 à 10:17
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Toujours des raccords de bout de ficelle pour tenir le cap dogmatique d'un recul des retraites, d'une baisse des indemnités et donc de culpabiliser ceux qui sont dans la mouïse pour le bonheur d'un petit nombre!

à écrit le 28/09/2021 à 9:46
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Dire que l'on parle de plus en plus de créer un revenu universel dont personne ne sait comment il sera financer, alors que l'on retarde de plus en plus le départ de l'âge de la retraite pour des raisons financières ???

à écrit le 28/09/2021 à 9:04
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Quelqu'un au gouvernement fait-il le rapprochement entre cette situation et le projet de retardement de l'age de la retraite ? Ceux qui sont à même de continuer à cotiser après 60 ans sont soit inamovibles (dirigeants, fonctionnaires...) soit sont dé...

à écrit le 28/09/2021 à 8:26
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Le probleme est simple: un jeune est payé parfois 40 % moins, il est souvent plus motivé (ben oui il espere etre promu), plus flexible (pas de faimille a charge ni proprietaire) et au fait des dernieres avancees. A quoi ca sert d avoir de l experienc...

le 28/09/2021 à 9:50
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c'est pourquoi notre guide suprême et son clown Bayrou, ne veulent pourtant que la reproduction !

le 28/09/2021 à 20:48
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Il y a des métiers où l'expérience vaut de l'or. Dans le nucléaire (voir le désastre de l'EPR), l'aéronautique, la médecine, l'expérience et l'expertise (de 20 ou 30 ans) sont irremplaçables.

à écrit le 28/09/2021 à 2:53
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Partout dans le monde on vire les personnes des l'age de 50 piges et parfois plus tot. C'est dommage l'experience c'est precieux.

le 28/09/2021 à 8:27
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oui et non. a quoi ca sert d avoir une experience sur MS/DOS, savoir se servir d un fax ou autre chose obsolete ...

le 28/09/2021 à 21:03
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Pour concevoir un nouvel aéronef, une chaufferie nucléaire de nouvelle génération ou élaborer un protocole de traitement oncologique pertinent, il est recommandé d'avoir au minimum 20 ans d'expérience.

à écrit le 27/09/2021 à 20:48
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57 ans? Trop vieux, trop cher pour retrouver un emploi. La solution, il eut fallu l'anticiper avant 40 ans et s'installer à son compte en cabinet, si possible Expert Comptable...pas les mêmes contraintes comme salarié.

à écrit le 27/09/2021 à 19:27
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Il y a un moment où il faut se rendre compte qu'on n'a plus vingt ans et réfléchir à ce que l'on veut : rester au chômage avant de partir à la retraite ce qui allonge d'autant le temps où on sera à la charge des actifs ou travailler encore un peu. Un...

le 27/09/2021 à 19:55
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"Si les vieux salariés proposaient à leur entreprise de passer peu à peu au temps partiel" on dit salarié 'hyper expérimenté'. :-) L'employeur demande-t-il au comptable s'il voudrait bien ne travailler qu'à mi-temps ou décide tout seul de s'en débarr...

le 28/09/2021 à 7:07
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Hors sujet. Vous ne connaissez visiblement pas le "marché du travail" ni les problèmes de fin de mois.

le 28/09/2021 à 20:53
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Commentaire perché, à 1000 lieux de la vraie vie. Trouvez-moi un seul employeur qui acceptera d'embaucher un ingénieur technique au chômage de plus de 50 ans à un poste de technicien, même si le senior accepte la diminution de salaire, de responsabil...

le 28/09/2021 à 20:59
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Idem pour le temps partiel. Beaucoup de salariés notamment qualifiés, qui ont travaillé 50h hebdomadaires pendant 20 ou 30 ans, aimeraient lever un peu le pied à partir de 55 ou 60 ans quitte à perdre en salaire. La plupart des entreprises refusent...

le 19/10/2021 à 19:41
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@solaris, l'intelligence c'est la capacité d'adaptation. Si à 40 ou 50 ans, on n'a pas compris le système, on est en effet bon pour la retraite. Quand on postule à un poste de technicien, on envoie un CV avec des diplomes de technicien et une expérie...

à écrit le 27/09/2021 à 19:25
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Les entreprises de vont pas embaucher des jeunes émigrés sans quaification.

à écrit le 27/09/2021 à 18:21
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notre capacité à maintenir les seniors dans la vie va être cruciale.

à écrit le 27/09/2021 à 18:19
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Si les "seniors" (Mot politiquement correct pour désigner les gens âgés) ont du mal à trouver du travail, c'est avant tout parce que le marché est saturé par l'immigration. Aujourd'hui, des milliers de jeunes venus de l'étranger, quelquefois bien for...

le 27/09/2021 à 19:23
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Bizarre, cette immigration aux multiples visages, le bouc émissaire parfait. Tantôt, ce sont des fainéants qui viennent profiter des aides et n'ont de toute façon aucune qualification et connaissance de notre langue, tantôt ce sont des gens surdiplôm...

le 27/09/2021 à 19:58
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Y a même des gens restant à l'étranger, très capables, qui télétravaillent, pas besoin de français trop exigeants niveau salaire (vu les dépenses qu'on a dans notre pays). Des comptables en Inde, on doit en trouver plein devant leur clavier, prêts à ...

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