Les clignotants passent au vert pour l'économie française. Dans un rapport publié le mercredi 7 mars, la commission européenne a salué l'amélioration de la situation macroéconomique de la France tout en reconnaissant que la croissance à long terme devrait rester modérée.
"Après trois années de croissance modérée, l'activité économique a connu une forte accélération en 2017. Le gouvernement entreprend d'importantes mesures de réforme."
Ces bonnes performances permettent à la France de passer du groupe des pays européens en situation de "déséquilibre macroéconomique excessif", auquel elle appartenait ces dernières années avec notamment l'Italie, à ceux présentant quelques déséquilibres comme l'Allemagne - c'est-à-dire la deuxième catégorie sur quatre. L'Allemagne, qui multiplie les excédents budgétaires record depuis plusieurs années et qui est donc elle aussi en situation de déséquilibre macroéconomique, se fait régulièrement épinglée pour son manque d'investissement notamment.
Deux procédures
L'Union européenne dispose en effet de deux procédures pour évaluer les performances des États membres. La première porte sur les déficits. La seconde, moins connue et moins contraignante, porte sur les résultats macroéconomiques et sur l'efficacité des réformes entreprises pour réduire les déséquilibres. La seconde procédure mise en place après la crise permet de faire un bilan approfondi des mesures de prévention et de correction. Le document souligne :
"Les déséquilibres macroéconomiques de la France sont dus à une dette publique élevée et à une faible compétitivité dans un contexte de croissance atone de la productivité."
De bonnes prévisions à court terme
Selon l'institution européenne, l'activité économique devrait rester solide dans un avenir proche. Les auteurs du rapport, qui évaluent une croissance légèrement inférieure aux dernières révisions de l'Insee (1,8% contre 2% pour 2017), notent que cette accélération repose avant tout sur une forte croissance des investissements privés et une forte reprise du marché du logement. Selon les dernières prévisions de Bruxelles, la croissance du PIB devrait atteindre 2% en 2018 et 1,8% en 2019. Cette dynamique devrait être portée par une croissance de la consommation privée alors que l'investissement devrait se maintenir à des niveaux soutenus.
"L'investissement des ménages devrait conserver son dynamisme, comme l'indique l'augmentation du nombre de constructions neuves. De plus, l'investissement public devrait, après plusieurs années de repli, se redresser en 2018."
Amélioration des finances publiques
En ce qui concerne les finances publiques, la Commission européenne souligne que la baisse "du déficit sous la valeur de référence de 3% du PIB semble durable, mais le déficit structurel devrait augmenter". Selon les dernières projections, le déficit public devrait tomber à 2,9% du PIB en 2017. Cependant, les experts expliquent que la recapitalisation d'Areva et l'abrogation de la contribution de 3% sur les dividendes pourraient remettre en question cette baisse. Au niveau de la dette, l'organisme européen souligne que la soutenabilité à court terme ne semble pas préoccupante malgré le ratio d'endettement public privé. Il prévoit une stabilisation du ratio 96,9% du PIB sur la période de prévision (2017-2019).
Manque d'intégration sur le marché du travail
Si les fonctionnaires européens expliquent bien que la situation du marché du travail s'est améliorée avec une baisse du chômage depuis plusieurs semestres, ils restent de nombreux défis à relever. Parmi les problèmes persistants figurent celui du chômage des jeunes et les personnes peu qualifiées. Des efforts devraient également être menés pour favoriser l'intégration de personnes défavorisées sur le marché du travail. Les auteurs soulignent, par exemple, le cas des personnes issues de l'immigration.
"Les conditions d'emploi pour les personnes issues de l'immigration, qu'elles soient nées en France ou hors de l'Union européenne, restent difficiles, avec des taux de chômage élevés, qui ne baissent que lentement."
Outre le chômage élevé des personnes issues de l'immigration, la Commission recommande d'augmenter l'apprentissage de la langue française pour les immigrés qui n'ont aucune connaissance. Le nombre d'heures proposées par l'Office français de l'immigration et de l'intégration s'élève actuellement à 200 heures au maximum contre 600 en Allemagne par exemple.
Commerce extérieur et productivité en berne
La multiplication des déficits commerciaux de la France inquiète la Commission européenne. Si le rapport note que "la compétitivité a cessé de se dégrader [...] Le solde du commerce extérieur s'est cependant détérioré en 2016, aussi bien pour les biens que pour les services". Pour les spécialistes européens, la compétitivité-coût s'est améliorée mais le ralentissement de la productivité continue de peser. "La croissance de la productivité reste modérée et empêche la compétitivité de la France de se rétablir plus rapidement." La croissance de la productivité de la main d'oeuvre en France (0,5%) demeure à un niveau inférieur à quelques voisins comme l'Allemagne (0,6%) ou l'Espagne (0,7%). La commission prévoit dans les prochaines années une poursuite du ralentissement de la productivité en raison de la baisse du taux du CICE et de la fin des aides aux nouvelles embauches.
La loi Pacte attendue
Le plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (loi Pacte) qui doit être présenté le 18 avril prochain en Conseil des ministres est attendu par la commission. L'administration européenne souligne également que le grand plan d'investissement devrait permettre de soutenir l'économie tricolore. Elle indique cependant que des obstacles demeurent comme "la complexité des exigences réglementaires et administratives qui empêche l'économie numérique collaborative de croître", par exemple.
Des inégalités en matière d'éducation
Les membres de la commission alertent sur les inégalités persistantes en matière d'éducation.
"Le système de formation et d'enseignement professionnels ne facilite pas suffisamment l'accès à l'emploi, malgré les réformes entreprises."
Les fonctionnaires européens mettent en exergue les lacunes du système de formation professionnelle continue qui ne profitent qu'à une certaine catégorie de chômeurs ou de travailleurs salariés. Ils indiquent également que les inégalités liées à l'origine socio-économique demeure notamment dans les zones urbaines défavorisées ou même dans l'accès au logement qui peut être difficile dans dans des métropoles où les loyers sont excessifs.