Emploi : une grande majorité des entreprises cherchant à embaucher toujours à la peine

Les difficultés de recrutement sont particulièrement criantes dans l'industrie et les entreprises de plus de 10 salariés, selon le dernier baromètre de la Grande consultation des entrepreneurs réalisé par OpinionWay pour CCI France, La Tribune et LCI. Sur les 22% d'entreprises qui cherchent à recruter, 16% sont à la peine. Malgré l'inflation persistante, près d'une entreprise sur deux n'envisage pas de revalorisation salariale.
Grégoire Normand
(Crédits : Reuters)

Les tensions sur le marché du travail sont toujours aussi vives. Après deux ans et demi de pandémie et neuf mois après l'éclatement de la guerre en Ukraine, beaucoup d'entreprises tricolores manquent toujours de bras. Alors que près d'un quart (22%) des entreprises cherchent à embaucher actuellement, cette volonté se heurte à des barrières dans les processus de recrutement pour 16% des dirigeants interrogés dans le cadre de la Grande consultation des entrepreneurs réalisée par OpinionWay pour CCI France, La Tribune et LCI.

Sur ces 22%, seule une minorité (6%) n'a aucune difficulté à recruter. A l'opposé, 78% des entrepreneurs interrogés ne cherchent pas à embaucher actuellement. En dépit d'une conjoncture morose et d'un ralentissement de l'activité, les indicateurs de l'emploi demeurent globalement stables. Dans sa note de conjoncture du mois d'octobre, l'Insee table sur un maintien du taux de chômage à 7,4% de la population active en fin d'année.

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Des tensions au sommet dans l'industrie et les grandes entreprises

Dans le détail, l'industrie est en première ligne face à tous ces obstacles. Ainsi, près d'un tiers des entreprises industrielles (36%) exprime des difficultés pour trouver de la main d'œuvre. Viennent ensuite la construction (23%) et le commerce (20%) sans vraiment de surprise.

Dans le tertiaire, la proportion d'entreprises (10%) à connaître des difficultés est bien plus faible. Par taille d'entreprise, ce sont les établissements de plus de 10 salariés qui sont principalement concernés (71%). A l'opposé, les entreprises de moins de 10 salariés demeurent relativement préservées.

Ces difficultés entraînent des conséquences parfois désastreuses pour un très grand nombre de directions (82%). Le principal problème concerne des perturbations dans la logistique (34%). Arrivent ensuite les refus ou pertes de clients (19%), une désorganisation de la gestion RH (19%), des cessations d'activités ponctuelles (11%) ou encore une surcharge de travail (11%) pour le reste du personnel.

Près d'une entreprise sur deux n'envisage pas de hausse de salaire pour favoriser les recrutements

La flambée des prix ces derniers mois a alimenté la grogne sociale dans de nombreux secteurs. En effet, beaucoup de salariés ont perdu du pouvoir d'achat, grignoté sans cesse par la flambée des prix de l'énergie et des matières premières. Dans ses prévisions, l'Insee estiment que le pouvoir d'achat par unité de consommation pourrait reculer de 0,6% en 2022.

Compte tenu de la hausse de l'inflation au mois d'octobre (6,2%), la situation du porte-monnaie des Français ne devrait pas s'améliorer dans les prochaines semaines. Ce contexte inflationniste joue incontestablement un rôle dans l'attractivité des métiers.

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Beaucoup de secteurs sont en manque de bras en raison de salaires jugés trop faibles relativement à la hausse des prix galopante. C'est par exemple le cas dans l'hôtellerie-restauration. Face à cette poussée de fièvre de l'indice des prix, l'hypothèse d'une revalorisation des salaires divise les entreprises en deux camps. Près de la moitié des entreprises (46%) n'envisage pas de revalorisation car leur santé financière ne leur permet pas (19%) ou par principe (27%). A l'opposé, plus d'un tiers des dirigeants ont déjà procédé à des revalorisations. Par taille d'entreprise, ce sont davantage les entreprises de plus de 10 salariés (44%) qui ont déjà revalorisé les salaires de leurs employés que les plus petites.

PGE : des conséquences néfastes à venir

Au début de la pandémie au printemps 2020, le gouvernement avait mis en place les prêts garantis par l'État destinés à amortir le choc du plongeon de l'activité. Après la récession vertigineuse de 2020, le rebond quasi mécanique de la croissance en 2021 avait facilité le début des remboursements des PGE. Avec l'éclatement de la guerre en Ukraine en février dernier et l'inflation grandissante, la donne a complètement changé.

En quelques mois, la pression sur la trésorerie des entreprises s'est amplifiée. Sur l'ensemble de l'échantillon interrogé par l'institut de sondages, 19% affirment avoir contracté un prêt garanti par l'État. Sur ce total, un tiers redoute des répercussions néfastes sur leur activité. A l'opposé, 66% affirment que ces prêts n'ont pas de conséquences négatives sur leur entreprise. Si l'activité continue de ralentir en 2023 et que l'inflation se maintient dans les semaines à venir, les entreprises pourraient avoir des difficultés pour rembourser leur prêt garanti par l'État. A ce stade, il est encore difficile de mesurer l'ampleur du coup de frein prévu l'année prochaine.

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Plusieurs États européens sont déjà entrés dans un cycle récessif particulièrement dangereux. En France, la menace de récession existe même si le gouvernement veut rester optimiste dans ses prévisions. Le prolongement de coûts énergétiques exorbitants à l'approche de l'hiver va sans doute encore accroître les tensions sur la trésorerie des entreprises industrielles particulièrement gourmandes en énergie ou en matières premières. A cela s'ajoutent le ralentissement brutal de l'activité dans plusieurs grandes puissances européennes (Royaume-Uni, Allemagne, Italie) et le contexte géopolitique toujours aussi tendu. L'hiver promet d'être particulièrement douloureux pour un grand nombre de secteurs.

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(*) Méthode : étude réalisée auprès d'un échantillon de 607 personnes. L'échantillon a été réalisé par téléphone du 12 au 19 octobre dernier. La représentativité de l'échantillon a été assurée par un redressement selon le secteur d'activité et la taille, après stratification par région d'implantation.

Grégoire Normand
Commentaires 13
à écrit le 02/11/2022 à 16:40
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Augmentez les salaires pour les rendre à leur juste valeurs et vous recevrez des candidats...

à écrit le 02/11/2022 à 9:18
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Olivier Dussopt propose de créer un titre de séjour métiers en tension , la liste est d'environ 20 métiers dont des médecins, infirmiers etc.. Il veut par exemple mettre fin sous conditions au délai de carence qui empêche les demandeurs d’asile de ...

à écrit le 01/11/2022 à 9:41
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de tout temps y a eu a boire et a manger, des deux cotes.......mainenant, oui, les boites qui cherchent un bac, bac-2, avec un doctorat en maths et un en droit du travail irelandais, de mois de 25 ans avec 15 ans d'experience dont 6 au bresil, qui pa...

à écrit le 01/11/2022 à 9:20
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Dans une ambiance aussi négative, pourquoi voulez-vous que les entreprises soient d'un optimisme béat ? Elles sont plutôt prêtes à mettre la clef sous la porte pour ne pas se faire surprendre ! Ce qui plombe encore plus cette "ambiance" ! ;-)

à écrit le 31/10/2022 à 23:36
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Les entreprises qui ne veulent pas augmenter les salaires vont attirer comment ? Sur leur seul nom? Lol Comme des centaines d autres , la sncf qui n arrive pas à recruter des conducteurs de rer à 2000€ net par mois ou des surveillants travaux à 16...

le 01/11/2022 à 6:13
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Même en acceptant des salaires bas, les candidats n'ont pas le bon "profil". Les entreprises font la chasse au CV de compétition, alors qu'un candidat standard ferait largement l'affaire. On a pourtant pas besoin d'un pilote de formule 1 pour conduir...

à écrit le 31/10/2022 à 20:53
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France, un navire ivre qui navigue à reculons depuis 40 ans sur les océans de l'hypocrisie, les mers du mensonge et les fjords de la corruption financière . Pousser par un moteur V8 Chevrolet.

à écrit le 31/10/2022 à 18:56
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Une majorité de minorité cela reste une minorité...

à écrit le 31/10/2022 à 18:30
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Rien d'étonnant des dizaines d'années d'incurie su système éducatif français qui donne un savoir alors que l'Allemagne donne un métier.

le 31/10/2022 à 19:28
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Et l'incurie des entreprises qui refusent de former , les millions d'euros de la formation continue qui disparaissent dans le trou noir des syndicats et autres instances profess0onnelles patronales et toutes ces grandes entreprises qui sous traitent ...

le 31/10/2022 à 20:55
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Le but de l"ecole n'est pas de "donner" un métier. L'école est le lieu des apprentissages, des savoirs, de la socialisation, de préparer à la vie professionnelle, de former des citoyens responsables, tolérants, aptes à penser par eux même...

le 01/11/2022 à 1:39
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si le but de l'école n'est pas de donner un métier, alors elle peut disparaitre sans problème. L'école n'est certainement pas le lieu de la socialisation cela , c'est la famille qui en est responsable de la même façon que de former des hommes et des...

le 01/11/2022 à 15:57
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Bonjour, le but de l'école est d'instruction, lecture , écriture et réfection.., Malheureusement, beaucoup quittent le système éducatif sans avoir acquis grand chose... Pour les métiers, ils y a l'apprentissage, les centre de formation, mais lorsqu...

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