L'Etat français se fixe de nouveaux objectifs. Il espère réduire de 5% par an ses émissions de gaz à effet de serre jusqu'en 2027 en France, dans le cadre d'un « plan de transformation écologique » consulté ce mercredi par l'AFP. Au total, ce sont 15 engagements qui ont été publiés en annexe d'une circulaire envoyée le 21 novembre par Elisabeth Borne aux ministères et à l'administration.
Objectif affiché : « permettre de respecter une trajectoire visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre de l'Etat de 22% en 2027 par rapport à 2022 », détaille la Première ministre. En effet, selon les dernières données disponibles, les émissions de l'Etat français se sont établies à environ 10 millions de tonnes équivalent CO2 (Mteq CO2) en 2019.
Pour rappel, le ministre de la Fonction publique Stanislas Guerini avait déjà annoncé en mars vouloir diviser par cinq les émissions de gaz à effet de serre des services de l'Etat, pour les porter à 2 Mteq CO2 en 2050, mais sans préciser la trajectoire aussi finement.
Transports et parcs immobiliers dans le viseur
Le plan de transformation écologique rassemble ainsi une série de mesures et objectifs déjà rendus publics au compte-gouttes, et détaille quantité de nouvelles cibles à atteindre pour verdir l'appareil d'Etat.
Dans le domaine des transports, l'Etat, qui emploie 2,5 millions d'agents publics, espère ainsi réduire de 5% sa consommation de carburant en 2024 par rapport à 2022, et de 10% en 2027. Les trajets des agents en avion devront être réduits de 20% entre 2019 et 2024, et même de 30% en 2027.
Le plan prévoit également de réduire la consommation énergétique de l'imposant parc immobilier de l'Etat et de ses opérateurs, qui émet selon le gouvernement 2,6 Mteq CO2 annuelles. D'ici 2027, la consommation d'énergie devra ainsi être abaissée de 25% par rapport à 2022 dans les bâtiments tertiaires, dans le droit fil du « plan de sobriété énergétique » déployé depuis l'automne 2022. L'ensemble des chaudières au fioul devront enfin être supprimées « avant 2029 », et la consommation d'eau réduite de 15% en 2027 par rapport à 2022.
Un plan de transformation qui ne plaît cependant pas à tout le monde. Dans un communiqué publié mercredi, l'Unsa-Fonction publique, (4e syndicat du secteur) a regretté qu'il n'ait « pas été discuté formellement avec les organisations syndicales ». « La réussite d'un tel plan ne peut se concevoir sans les agents publics, ni au détriment de leurs conditions de travail », a poursuivi le syndicat.
Des objectifs globaux insuffisants ?
Des engagements qui interviennent en pleine COP28 et alors que le programme européen Copernicus a annoncé que 2023 serait l'année la plus chaude de l'Histoire. De son côté, le gouvernement français a rendu public mi-novembre sa stratégie énergétique, dans le but de « sortir la France de sa dépendance aux énergies fossiles ». Il vise dès lors à doubler le rythme de déploiement de l'énergie solaire, de l'éolien en mer et relancer le nucléaire. La France est parvenue à diminuer de 2,7% ses émissions l'an dernier.
Plus globalement, les Vingt-Sept, dont la France, avaient entériné la décision de sabrer 55%, par rapport à 1990, leurs émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030. Un objectif cependant jugé insuffisant par certains pays, dont le Danemark. Ce mercredi, le ministre danois du Climat a notamment appelé l'UE à réduire ses émissions de 90% de gaz à effet de serre d'ici 2040, comme le recommande le Conseil consultatif scientifique européen.
La transition énergétique fera perdre 13 milliards d'euros aux recettes de l'Etat d'ici à 2030, en fiscalité sur les carburants, et 30 milliards d'ici à 2050, estime la Direction générale du Trésor dans un rapport. La sortie des énergies fossiles implique une baisse des taxes sur ces énergies : à fiscalité inchangée, elles pourraient s'éroder « de 13 milliards d'euros à horizon 2030 et 30 milliards d'euros à horizon 2050 », estime le Trésor dans ce rapport intermédiaire de l'étude sur « les enjeux économiques de la transition vers la neutralité carbone » qu'il publiera en 2024. Ces chiffres s'inscrivent dans le scénario d'un réchauffement mondial limité à 1,5°, pour lequel la France et l'Union européenne ont pris des engagements de réduction de leurs émissions nettes de gaz à effet de serre de 55% en 2030 par rapport à 1990, et de neutralité carbone en 2050. Par ailleurs, le rapport estime que 110 milliards d'euros supplémentaires par an (en brut, par rapport à 2021) en investissements privés et publics seront nécessaires pour les projets de décarbonation. Il n'a pas encore d'estimation pour 2050. Mais malgré ces coûts, la direction du Trésor rappelle "qu'à long terme, la transition sera bénéfique à l'économie et au bien-être" par rapport au statu quo, et elle encourage très fortement à une forte anticipation des mesures à prendre.La transition énergétique va faire perdre 13 milliards d'euros au fisc d'ici 2030
(Avec AFP)