Geoffroy Roux de Bézieux (Medef) : la fin d'une présidence « peinarde »

PORTRAIT- En fin de mandat, Geoffroy Roux de Bézieux quittera la présidence du Medef le 17 juillet avec le sentiment du travail accompli. A 61 ans, le fondateur de The Phone House (société qu’il a revendue en 2000) a adoré son mandat, sans clash avec Emmanuel Macron, aux petits soins avec les patrons, qui a maintenu la politique de l’offre, initiée en milieu de mandat sous François Hollande. Un mandat qu’il qualifie de « peinard »même s’il fut marqué par la crise du Covid-19 où ce sportif accompli a dû concevoir en toute hâte avec les responsables de Bercy, le gouverneur de la Banque de France et celui de la Banque publique d’investissement (BPI), le prêt garanti par l’Etat (PGE) pour sauver les entreprises tricolores. « Le moment le plus intense de ma présidence », estime-t-il avec le recul. Pour la suite, il reste mystérieux, mais certains le verraient bien ministre. Ce dont il se défend. « Ministre de Macron est un métier de merde », a-t-il confié à un proche, relate Bruno Jeudy.
Geoffroy Roux de Bézieux va quitter la présidence du Medef
Geoffroy Roux de Bézieux va quitter la présidence du Medef (Crédits : DR)

« La quille, c'est le 17 juillet ! » L'ancien commando marine compte les jours qu'il lui reste à la tête du Medef. D'ici le jour de son départ effectif de la tête de l'organisation patronale, Geoffroy Roux de Bézieux aura passé le flambeau à son ou sa successeure (Patrick Martin ou Dominique Carlac'h) dont le nom sera connu le 6 juillet. Dans son vaste bureau de président du Medef, ses photos de champions sportifs (Jimmy Connors, Jacques Fouroux et d'autres) ornent toujours les murs ainsi qu'une affiche de l'Appel du 18 juin. Jusqu'au bout, il remplit sa mission. Le week-end dernier, il était au Québec pour présider une rencontre des entrepreneurs francophones. Il conservera d'ailleurs jusqu'en 2024 son mandat de président de l'Alliance du patronat francophone. L'intéressé y tient : « Je garderai un pied dans l'intérêt général. »

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Un président « bluffant »

Après dix années à la tête du Medef - cinq comme vice-président aux côtés de Pierre Gattaz et cinq en tant que président - le dixième « patron des patrons » depuis l'après-guerre s'apprête à quitter la scène sociale. Avec le sentiment du travail accompli à l'entendre. A 61 ans, le fondateur de The Phone House (société qu'il a revendue en 2000 avant de se diversifier dans des sociétés internet) a adoré son mandat. Un mandat sans clash avec le pouvoir. Il est vrai que sa tâche était sûrement plus facile sous Emmanuel Macron que ferrailler avec l'exécutif socialiste de François Hollande. Il admet lui-même que son mandat fut « peinard », lâche-t-il avec le sourire. Avec le maintien d'une politique de l'offre, initiée en milieu de mandat sous François Hollande, l'exécutif macroniste a été plutôt aux petits soins pour les patrons. « En contrepartie, on a fait le boulot. On a créé 1,3 million d'emplois depuis 2019 », rappelle le chef de file du patronat tricolore.

Geoffroy Roux de Bézieux n'est pas un ingrat avec Emmanuel Macron. Ce président, dit-il, « assez bluffant » qui « parle le langage du business, et sans accent ». Les compliments fusent. Il n'a pas hésité non plus à signer un communiqué sanglant contre Marine Le Pen dans l'entre-deux-tours de la dernière élection présidentielle, jugeant que le programme de la candidate du Rassemblement « risquerait de placer le pays dans une impasse ». Il a aussi régulièrement salué l'action du ministre de l'Economie Bruno Le Maire. Bref, le patron des patrons s'est « mouillé » sur le plan politique. Il a naturellement pris position en faveur de la réforme des retraites et il a été très actif au moment de la pandémie du Covid-19. Avec les responsables de Bercy, le gouverneur de la Banque de France et celui de la Banque publique d'investissement, il conçoit en toute hâte au printemps 2020 le prêt garanti par l'Etat (PGE) qui va permettre à des milliers d'entreprises de soutenir leur trésorerie pendant la crise sanitaire. « Le moment le plus intense de ma présidence », estime-t-il avec le recul.

Homme de communication, il modernise l'organisation patronale. Pour les premières « Rencontres des entrepreneurs de France » (REF), il déroule le tapis rouge à Nicolas Sarkozy. Suivront aussi les Premiers ministres successifs, Jean Castex qui y dévoilera son plan de relance (2021) et Elisabeth Borne qui annoncera en 2022 le plan de sobriété pour les entrepreneurs. Mais son meilleur coup est la présence l'année dernière, par visio, du président ukrainien Zelensky en tant qu'invité d'honneur. Soucieux de ne pas « ringardiser » l'image du Medef, il n'est pas mécontent de constater une amélioration qu'il espère durable.

Ministre de Macron ?

En interne, il a voulu aussi ouvrir des pistes de travail nouvelles pour le Medef. A son arrivée, il surprend ses adhérents en créant une commission consacrée à la « souveraineté et la sécurité économique ». Un sujet qui sera repris par tout le monde - le président de la République en tête - après le Covid et la prise de conscience du besoin de réindustrialisation du pays.

Ce sportif accompli s'apprête donc à retourner dans les affaires. Après le Fondant baulois, il vient d'investir dans une chocolaterie. A 61 ans, ce sportif accompli (marathonien et triathlète de bon niveau) ne va sûrement pas se contenter de parcourir les sentiers côtiers de la Côte sauvage entre La Baule et le Croisic (où il possède un manoir). « Je ferai une pause », dit-il un brin mystérieux. On sent qu'il a encore envie d'action publique. A l'Elysée, Alexis Kohler a sondé ses intentions. Roux de Bézieux ministre ? Ce n'est pas dans la tradition des responsables de l'organisation patronale. « Pas question de gêner le successeur », jure l'intéressé. Et puis deux raisons rendent, à ses yeux, l'hypothèse improbable : « Ministre de Macron est un métier merde », a-t-il confié un jour à un proche et « pas question de passer sous les fourches caudines de la HATVP (Haute Autorité pour la transparence de la vie publique) ». En attendant de rebondir, le premier patron de France va marier son fils en septembre au Croisic.

Commentaires 2
à écrit le 16/06/2023 à 9:31
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Peinard : C’est bien après l’annonce du confinement du au coronavirus que Geoffroy Roux de Bezieux, président du Medef, a trouvé refuge dans son manoir du Croisic (Loire-Atlantique), niché dans les rochers avec vue imprenable sur l’océan. Il est v...

à écrit le 15/06/2023 à 9:08
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On a eu pendant toutes ces années un discours mesuré de la part du Medef, et apparemment un vrai respect entre patronat et syndicats, un vrai dialogue, et de vraies avancées : il va peut être nous manquer, M. Roux de Bézieux. Qui aura été un vrai r...

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