L'économie française fait du surplace au premier trimestre

Le produit intérieur brut (PIB) a reculé légèrement de 0,1% au premier trimestre 2021. L'Insee a ainsi révisé à la baisse ses chiffres de 0,5 point en raison notamment de l'activité décevante dans la construction pour les trois premiers mois de l'année. C'est une sévère correction pour l'économie tricolore.
Grégoire Normand
L'activité a été moins forte que prévu dans le bâtiment au cours du premier trimestre. L'Insee a également revu l'ampleur de la récession de l'économie française en 2020: le PIB a finalement chuté de 8%, contre 8,2% précédemment estimé.
L'activité a été moins forte que prévu dans le bâtiment au cours du premier trimestre. L'Insee a également revu l'ampleur de la récession de l'économie française en 2020: le PIB a finalement chuté de 8%, contre 8,2% précédemment estimé. (Crédits : Reuters)

L'économie française peine à sortir de sa torpeur. Dans sa dernière livraison dévoilée ce vendredi 28 mai, l'Insee a révisé ses chiffres de croissance de 0,5 point pour le premier trimestre. Le PIB a ainsi reculé de 0,1 point contre +0,4% prévu initialement et un dernier trimestre 2020 douloureux (-1,5%).  Avec deux trimestres de croissance négative, la France est techniquement en récession. « Cette révision à la baisse n'est pas vraiment surprenante. On avait prévu une croissance proche de 0 au premier trimestre » explique Philippe Ledent, économiste chez ING en charge du suivi de la France et de la zone euro interrogé par La Tribune.

Cette révision à la baisse risque d'avoir des conséquences sur la croissance 2021. Si la réouverture de l'économie, l'accélération de la vaccination et la baisse des contaminations ont pu insuffler un vent d'optimisme, l'acquis de croissance cette année s'est fortement détérioré passant de 4,1% à 3,5%. L'objectif du gouvernement d'obtenir une croissance de 5% en 2021 s'éloigne un peu plus. « Le dernier trimestre 2020 et le premier trimestre 2021 sont des trimestres perdus. L'économie était toujours 5% en dessous de son niveau d'avant-crise. Le début de la reprise est attendu au deuxième trimestre comme les autres pays de la zone euro » ajoute l'économiste. En outre, ces mauvais chiffres fragilisent toujours la possibilité d'une reprise robuste et rapide de la croissance. Le décrochage de la richesse produite est particulièrement important. « On n'attend pas de retour au niveau d'avant-crise avant la deuxième partie de l'année 2022 », indique Philippe Ledent.

PIB Insee

Le bâtiment dans le rouge, la consommation a stagné

Cette croissance décevante au premier trimestre s'explique en partie par de très mauvais résultats dans le bâtiment. Les statisticiens de l'organisme public expliquent que « l'estimation du premier trimestre 2021 est révisée de -0,5 point, en raison notamment de l'intégration de données sur la construction, nettement moins dynamiques que les extrapolations mobilisées lors de la première estimation : l'évolution de la Formation brute de capital fixe (investissement) en construction au T1 passe ainsi de +5,1% à +0,6% ».

L'activité au premier trimestre a également été plombée par de piètres performances sur le commerce extérieur. La contribution des échanges de biens et services au produit intérieur brut entre janvier et mars est largement négative (-0,4 point). Le prolongement de la crise sanitaire, des restrictions commerciales et la fermeture de certaines frontières ont pu contribué à dégrader les résultats de l'appareil exportateur français déjà frappé de plein fouet par une année 2020 catastrophique.

Par ailleurs, la demande intérieure, traditionnel moteur de la croissance hexagonale, affiche une modeste contribution au PIB au premier trimestre (+0,1 point). « Les dépenses de consommation des ménages sont quasi stables (+0,1% après -5,6%) et restent nettement en deçà de leur niveau d'avant crise (-6,8% par rapport au T4 2019) » précise l'Insee. Le prolongement et le renforcement des mesures d'endiguement à l'ensemble du territoire ont clairement freiné les possibilités de consommer dans les magasins physiques même si les ventes en ligne ont pu leur épingle du jeu. Avec le troisième confinement, la consommation des ménages a continué de chuter lourdement (-8,3%) par rapport à mars. Enfin, l'investissement a très peu accéléré (0,2%) par rapport au dernier trimestre (1,7%).

L'inflation a accéléré

L'indice des prix à la consommation a accéléré au premier trimestre de 0,8% après 0% au dernier trimestre 2021 en raison notamment de la hausse des prix des matières premières. L'inflation a continué d'accélérer en France en mai sur un an, atteignant 1,4% après 1,2% en avril, toujours poussée par une accélération des prix de l'énergie, selon des chiffres provisoires de l'Insee publiés vendredi.

« En zone euro, l'inflation n'est pas encore trop élevée par rapport aux Etats-Unis » a expliqué Philippe Ledent, « et même si elle est relativement élevée par rapport à d'autres périodes, ce phénomène devrait être temporaire. Après cette poussée d'inflation liée à la hausse des matières premières et la réouverture des économies, l'inflation devrait refluer en 2022 même si on devrait encore assister à des poussées de fièvre » a ajouté Philippe Ledent.

Depuis quelques mois, l'inflation enflamme les débats entre économistes. Si les poussées inflationnistes sont constamment surveillées par la plupart des économistes, la crainte d'une inflation durable en Europe est à ce jour peu exprimée en Europe. « L'évolution et la dynamique des salaires va devoir être surveillée » indique Philippe Ledent, mais pour l'instant l'effet boucle prix salaire ne semble pas vraiment inquiété les économistes interrogés par La Tribune. « L'analyse dominante des banques centrales est que le sursaut d'inflation est transitoire, de quelques trimestres au maximum, et à ce titre tolérable, sinon désirable. Cela dit, il faut nuancer selon les cas. De toute évidence, un risque de surchauffe existe aux Etats-Unis, mais pas en Europe » expliquait l'économiste de Oddo Securities Bruno Cavalier dans une récente note. « Les partisans de la stricte orthodoxie monétaire (arrêter la « planche à billets ») et budgétaire (rétablir l'équilibre) et les prophètes de l'effondrement monétaire ont intérêt à alimenter ce buzz inflationniste » ajoutait-il.

> Lire aussi : Le risque d'inflation est-il durable ?

Grégoire Normand
Commentaires 6
à écrit le 29/05/2021 à 16:34
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Comment l'INSEE a-t-il pu laisser passer une telle bourde? En réalité, je crois que ce gouvernement a voulu se parer d'un résultat partiel flatteur. Mais, tout-de-même, accuser son "compteur" ressemble un peu à l'automobiliste pincé par la "Force de ...

à écrit le 28/05/2021 à 19:23
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l'economie va bien d'ailleurs les chiffres sont tellement vrais

à écrit le 28/05/2021 à 14:31
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"Quoi qu'il en coûte", eh bien: ça coûte ! Avec une saison de ski moribonde et des dizaines de milliards perdus, il faut espérer que la saison d'été soit excellente, sinon ça va coûter encore plus cher, d'autant plus que l'évocation d'une troisième ...

le 29/05/2021 à 11:12
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Saison de ski moribonde. Et pourtant les bonnes autres années passées,qu'ont 'ils fait de tout l'argent amasser avec ce qu'il nomme dans les stations L'OR BLANC! Vous n'avez qu'à regarder les chiffres d'affaires passés des Sociétés de Montagne en mil...

à écrit le 28/05/2021 à 14:12
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@Grégoire Normand Est-ce que ce terme exact dans ce cas ne serait pas "récession à double creux" (double-dip recession) au lieu de "faire du sur-place", compte-tenu des chiffres des trimestres précédants, même si c'est un gros mot ? merci.

à écrit le 28/05/2021 à 13:11
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LE "REBOND DE CROISSANCE" ÉTAIT FAUX ! La joie du gvt était infondée: après vérifications, le PIB de la France n'a pas crû de +0,4% au 1er trim. mais baissé de -0,1% et le PIB restait à -4,7 % de déc.2019 ! L’«acquis de croissance» n'est plus que de ...

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