
Tic, tac, tic, tac... à quelques heures de la levée des restrictions, de nombreux professionnels trépignent d'impatience. Restaurants, bars, hôtels, cinémas, et théâtres vont pouvoir rouvrir après une longue période d'interruption de plus de six mois. Sur tout le territoire, les terrasses se préparent à accueillir leurs premiers clients après un long hiver marqué par des vagues épidémiques et des confinements à répétition.
La France a dépassé les 20 millions de doses de vaccins ce week-end, s'est réjoui le président de la République Emmanuel Macron. Après un important retard à l'allumage, la campagne de vaccination s'accélère dans les centres. Certains indicateurs sanitaires s'améliorent, notamment sur le nombre d'admissions en réanimation et de morts du Covid. Malgré ce regain d'optimisme, les entreprises et les clients vont devoir s'adapter à de nouvelles règles et des contrôles renforcés.
Une réouverture sous contrôle, une économie en sous-régime
La levée des mesures d'endiguement va se faire progressivement. Comme l'ont précisé le chef de l'Etat et le Premier ministre Jean Castex dans leurs différentes interventions, la stratégie de réouverture doit être guidée par trois principes : "progressivité, prudence et vigilance". Le couvre-feu est ainsi repoussé à 21 heures au lieu de 19 heures. Les commerces, terrasses, musées, salles de cinémas et théâtres vont pouvoir rouvrir avec des jauges limitées. A partir du 9 juin, le couvre-feu sera encore décalé à 23 heures et les conditions du télétravail seront assouplies. Enfin, le couvre-feu est censé prendre fin le 30 juin prochain.
En attendant, l'exécutif se laisse la possibilité d'activer des "freins" si de nouvelles flambées apparaissent. Compte tenu de l'ensemble de ces mesures, l'économie devrait encore fonctionner en sous-régime pendant plusieurs semaines. Si certains économistes tablent sur une reprise rapide de la croissance comme au troisième trimestre 2020, d'autres misent sur la prudence. De nombreux risques et aléas sanitaires planent encore au dessus de l'économie et le retour entier de la confiance chez les entreprises et les consommateurs n'est pas pour demain.
Au Royaume-Uni, les craintes sur le variant indien notamment se multiplient alors que l'euphorie semblait gagner une bonne partie de la population après quelques jours d'ouverture. Beaucoup de secteurs risquent de se remettre péniblement de cette longue période, notamment dans le tourisme international très dépendant des conditions de circulation, ou encore l'événementiel, au coeur de la tourmente depuis le début du premier confinement.
Des tensions sur les approvisionnements et la main-d'œuvre disponible
La réouverture de l'économie tricolore pourrait entraîner une hausse des frictions entre l'offre et la demande. En effet, le rebond de l'économie aux Etats-Unis, porté par une amélioration de la situation sanitaire et les plans de relance gigantesques annoncés par Joe Biden, a provoqué de fortes tensions sur les chaînes d'approvisionnement dans le monde et une hausse des prix sur certains produits ou marchés. C'est par exemple le cas des véhicules d'occasion. Confrontés à une pénurie de composants, l'industrie automobile américaine a des difficultés pour répondre aux ventes de véhicules neufs. En France, l'industrie automobile est également sous pression depuis plusieurs mois face aux difficultés à se fournir en semi-conducteurs. A ce stade de la réouverture, la multiplication de ces tensions n'a rien d'étonnant après plus d'un an et demi de pandémie mondiale et une mise sous cloche de l'économie.
"Dans la crise présente, les goulots d'étranglement sont plus serrés que d'ordinaire. La pénurie de certains matériaux limite l'offre, notamment dans l'industrie, surtout la branche automobile. Cela explique largement la faiblesse de l'activité en zone euro au premier trimestre 2021", explique l'économiste en chef Bruno Cavalier de Oddo Securities dans une récente note.
L'autre risque, qui pourrait venir freiner la reprise, est le manque de main-d'œuvre disponible. En effet, plusieurs secteurs comme la restauration ont dû se séparer de leurs salariés ou ont dû faire face au départ d'une partie de leurs équipes après de grandes périodes de chômage partiel. Les difficultés pour recruter se multiplient pour beaucoup de responsables d'établissements. "La réouverture de l'économie peut créer des goulets avec des difficultés de recrutement. En période de reprise de l'activité, il est possible que beaucoup d'entreprises aient dû mal à recruter", a rappelé l'économiste de la Banque de France Olivier Garnier lors d'un récent point presse.