La confirmation de l'Agence européenne des médicaments (EMA) mercredi d'un lien entre le vaccin AstraZeneca et des caillots sanguins rares ne va pas améliorer la popularité du vaccin, déjà considéré comme mal-aimé. Plusieurs pays européens en ont même suspendu ou limité l'utilisation bien que la balance bénéfice/risque reste largement positive, a souligné l'agence.
Malgré le très faible nombre répertorié de ces thromboses atypiques (222, dont 18 décès, sur 34 millions d'injections dans l'espace économique européen (EEE), rapportait l'AFP), la confiance dans ce produit va donc être un sujet crucial. En France, le vaccin étant réservé au plus de 55 ans depuis le 19 mars, quelle deuxième dose va-t-on administrer aux personnes plus jeunes ayant reçu une première injection d'AstraZeneca ? Le ministre de la Santé a répondu ce vendredi à la question : « si vous avez reçu une première injection et que vous avez moins de 55 ans, on va vous proposer un autre vaccin à 12 semaines après la première injection, vous recevrez une injection d'un vaccin ARN messager ».
Ce jeudi, la France a dépassé les 10 millions de premières injections de vaccins contre le Covid-19, une barre symbolique mais encore très éloignée d'une protection totale face à l'épidémie, qui remplit toujours plus les services de réanimation. Rapportée à la population totale, la France reste en queue de peloton avec à date un peu plus de 14,6% de personnes ayant reçu au moins une dose (et 4,99% au moins deux doses), selon les données Covidtracker.fr / ministère de la Santé.
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AstraZeneca représente plus de 20% des vaccins reçus en France
Jusqu'ici, AstraZeneca a livré près de 3 millions de vaccins en France, selon les données du ministère de la Santé le 4 avril (mises à jour le 8 avril), soit plus d'un vaccin sur cinq reçu dans l'Hexagone.
Mais, cette conclusion de l'EMA risque d'aggraver la crainte déjà présente pour ce vaccin. Les médecins et responsables de centres de vaccination à travers la France s'alarment en effet de la méfiance vis-à-vis d'AstraZeneca. « Des personnes avaient des rendez-vous, elles sont reparties quand elles ont vu que c'était Astra, en disant "je n'en veux pas". Le centre de Dunkerque a tenté de nous envoyer des gens éligibles à l'AstraZeneca, personne n'est venu », explique à l'AFP le Dr Thierry Mraovic, en soulignant que les doses n'ont pas été perdues mais « rendues à la pharmacie hospitalière ».
Pourtant, avec 72,3 millions de doses cumulées prévues d'ici fin juin, selon la Direction Générale de la Santé le 23 mars, la France ne va pas pouvoir se passer du vaccin AstraZeneca avant le deuxième semestre. « AstraZeneca, on en a besoin jusqu'à la fin du premier semestre probablement », a d'ailleurs souligné Agnès Pannier-Runacher le 2 avril.
Cette désaffection pour l'un des quatre vaccins autorisés en Europe arrive ainsi au mauvais moment pour la campagne de vaccination française puisqu'au total ce sont 15,4 millions de doses d'AstraZeneca qui doivent arriver d'ici fin juin, soit pas moins de 21% du nombre de doses totales prévues (selon les données du 23 mars).
Pour éviter la catastrophe, dans l'entourage de Jean Castex, on insiste donc sur le besoin « de pédagogie, d'explications après tant de rebondissements dans le parcours de ce vaccin ».
« Il est important de pouvoir rassurer les gens sur le vaccin, non pas parce qu'on veut absolument le refourguer, mais parce que l'AstraZeneca protège efficacement des formes graves, quasiment autant que le Moderna et le Pfizer », ajoute-on au ministère de la Santé.
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(Avec AFP)