La rétention de main d'œuvre résiste dans les PME et ETI depuis le Covid

Les PME et les ETI conservent davantage leurs effectifs que les grandes entreprises selon une nouvelle enquête de l'Insee, notamment grâce au « quoi qu'il en coûte».
Grégoire Normand
Dans la fabrication de matériel de transport, la rétention de main d'oeuvre est au plus haut.
Dans la fabrication de matériel de transport, la rétention de main d'oeuvre est au plus haut. (Crédits : Reuters)

La succession des crises donne le tournis aux économistes. Dans ce contexte instable, l'INSEE tente d'établir une photographie de l'emploi. Après trois années de pandémie mondiale et une crise énergétique dévastatrice, le marché du travail ne montre pas encore de signes de retournement conjoncturel. Le rythme des créations d'emploi (0,4%) demeure supérieur à celui de l'activité (0,2%) ces derniers trimestres, tandis que le taux de chômage au sens du bureau international du travail (BIT) se stabilise autour de 7,5%.

Les entreprises gardent des effectifs relativement stables

En Europe, l'emploi a accéléré au même niveau que l'activité au troisième trimestre (0,3%) selon les dernières données d'Eurostat dévoilée ce mercredi. Du côté des entreprises, l'explosion des prix de l'énergie a déjà contraint plusieurs entreprises à réduire la voilure. Et d'autres devraient suivre en janvier prochain en raison de la levée partielle du bouclier tarifaire.

Malgré ce contexte troublé, les entreprises ne sabrent pas dans leurs effectifs, bien au contraire. Dans son étude de référence consacrée aux entreprises dévoilé ce mercredi, l'Insee souligne que de nombreux employeurs continuent de garder de la main d'œuvre à l'intérieur des entreprises malgré les soubresauts de l'économie française. « Il y a une proportion assez stable de rétention de main d'œuvre en France, mais la crise sanitaire a renforcé cette rétention », a déclaré Sylvain Moreau, chef des statistiques d'entreprise à l'Insee lors d'un point presse.

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Rétention de main d'œuvre : un phénomène surtout présent dans les petites entreprises industrielles

Toutes les entreprises n'ont pas la même stratégie de gestion de leur main d'oeuvre. Les différentes enquêtes de conjoncture menées depuis une vingtaine d'années indiquent que la rétention de main d'œuvre est surtout un phénomène visible dans les entreprises ayant moins de 100 salariés et celles ayant entre 100 et 500 salariés. « Il peut paraître contre-intuitif que la rétention soit plus forte dans les petites entreprises, celles-ci ayant généralement une moindre capacité d'absorption des chocs économiques que les autres », soulignent les statisticiens.

En effet, les petites firmes, qui ont en général moins de marges de manœuvre financièrement pour encaisser une baisse des carnets de commande, gardent des effectifs relativement stables. A l'opposé, les entreprises de plus de 500 salariés sont celles qui font le moins de rétention de main d'œuvre depuis deux décennies. A l'exception de crises exceptionnelles comme le confinement du printemps 2020 ou la crise financière de 2008.

Des disparités importantes entre les secteurs

Outre la taille des entreprises, des disparités apparaissent selon la taille des secteurs. Dans l'agroalimentaire, le taux de rétention est bien moindre que dans la plupart des autres branches industrielles. « Le comportement de rétention des entreprises de ce secteur dépend donc moins de la conjoncture économique que dans d'autres secteurs en raison peut-être d'une demande plus stable », explique l'institut de statistiques. A l'inverse, la rétention est très volatile dans l'aéronautique. Elle oscille ainsi entre 14% hors période de crise et 40% au pic de la crise sanitaire.

Le rôle déterminant du « quoi qu'il en coûte »

L'économie française a enregistré un pic de rétention de main d'œuvre durant la pandémie. Au pic de la crise sanitaire, la moitié des salariés dans l'industrie se trouvait dans une entreprise en rétention. Une partie de cette rétention peut s'expliquer par le déploiement massif des aides du « quoi qu'il en coûte », qui limitent les licenciements économiques. Contrairement à 2008, l'Etat a mis en œuvre un dispositif d'activité partielle bien plus généreux au moment de la pandémie.

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A cela se sont ajoutés de nombreux dispositifs d'aides (Prêt garantis par l'Etat, fonds de solidarités, reports et annulations de cotisation) et subventions pour les secteurs les plus en difficulté. « Les aides ont joué un rôle important », a expliqué Sylvain Moreau. A cela s'ajoutent « les tensions sur le marché du travail et les difficultés de recrutement », précise le statisticien. Enfin, préserver sa main d'œuvre présente certains bénéfices. En effet, se séparer de salariés et engager de nouveau du personnel peut représenter un coût non négligeable pour beaucoup d'entreprises.

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Grégoire Normand
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