Le giga plan de subventions américain menace 10 milliards d'euros d'investissements et 10.000 emplois en France

Susceptible de fausser la concurrence, le programme de réformes environnementales et sociales venu de l'autre côté de l'Atlantique (un plan de plusieurs centaines de milliards de dollars d'investissements) pourrait coûter très cher à l'Europe et à la France. Le gouvernement français estime que les pertes potentielles pour le pays s'élèveraient à « 10 milliards d'euros d'investissements » et « 10.000 créations potentielles d'emplois » perdues. Paris et Berlin ont d'ores et déjà appelé à une « réponse forte » de l'Union européenne qui risque de voir se détourner les investisseurs du continent européen.
La Première ministre Elisabeth Borne a confirmé que les pertes potentielles pour la France s'élèveraient à « 10 milliards d'euros d'investissements » et « 10.000 créations potentielles d'emplois ».
La Première ministre Elisabeth Borne a confirmé que les pertes potentielles pour la France s'élèveraient à « 10 milliards d'euros d'investissements » et « 10.000 créations potentielles d'emplois ». (Crédits : BENOIT TESSIER)

Le plan massif d'investissements lancé par le gouvernement américain cet été - l'Inflation reduction act (IRA) - pourrait faire très mal à l'Europe et à la France. Dans un entretien aux Echos, la Première ministre Elisabeth Borne a confirmé que les pertes potentielles pour le pays s'élèveraient à « 10 milliards d'euros d'investissements » et « 10.000 créations potentielles d'emplois » perdues.

« Compte tenu de la nature des soutiens et de leur caractère très massif, ce plan ne respecte pas les règles de l'OMC (Organisation mondiale du commerce », a condamné la Première ministre, Elisabeth Borne dans un entretien aux "Echos".

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Pour rappel, les Etats-Unis ont mis en place cet été le plus gros plan d'investissements jamais décidé dans la lutte contre le changement climatique. Ce plan prévoit 370 milliards de dollars pour la construction d'éoliennes, de panneaux solaires et de véhicules électriques. Mais aussi un crédit d'impôt pour les particuliers - jusqu'à 7.500 dollars - réservé à l'acquisition d'un véhicule électrique sortant d'une usine nord-américaine et dotée d'une batterie fabriquée localement. Ce qui exclut de facto les automobiles produites dans l'Union européenne.

Menacés par la récession, les Européens inquiets

L'Europe dénonce ces aides exceptionnelles, contraires aux règles du commerce international. Les firmes européennes sont déjà pénalisées par la flambée des prix de l'énergie qui les frappe bien plus durement que leurs concurrentes américaines. Des milliers d'emplois sont en jeu. Le sujet inquiète d'autant plus que la récession menace de s'abattre sur le continent européen dès cet hiver en raison des conséquences économiques de la guerre en Ukraine.

Les dirigeants du Vieux Continent sont à ce titre particulièrement inquiets. « C'est un sujet de préoccupation important que nous allons porter au niveau européen », a souligné Elisabeth Borne. « L'Europe ne peut pas être le seul endroit où il n'y a pas de "Buy European Act", nous souhaitons un débat politique et industriel à l'échelle européenne et internationale », a-t-elle affirmé. Le président français, Emmanuel Macron, qui a appelé à un « réveil européen », a prévu d'évoquer cette question lors de sa visite d'Etat à Washington fin novembre.

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Les entreprises commencent à hésiter à s'établir en Europe

Avec ce choc de compétitivité venu de l'autre côté de l'Atlantique, « certaines grandes entreprises étrangères qui voulaient s'installer en Europe hésitent désormais entre des sites européens et des sites américains », expliquait début novembre, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, sur BFM Business.

« Dans certains cas, le montant des subventions que l'administration Biden propose est 4 à 10 fois le montant maximal autorisé par la Commission européenne », avait poursuivi le ministre, réclamant lui aussi une « réponse coordonnée, unie et forte de l'Union européenne vis-à-vis de nos alliés américains ».

Breton agite la menace de mesures de rétorsion contre les Américains

Le commissaire européen chargé du marché intérieur, Thierry Breton, a été jusqu'à agiter la menace de « mesures de rétorsion » contre les Américains car ces subventions sont « contraires aux règles de l'Organisation mondiale du commerce ». Si les Américains ne répondent pas aux différents points soulevés par l'Europe, alors l'Union européenne pourrait « aller devant l'OMC ».

La France n'est pas seule à dénoncer les subventions massives accordées par les Etats-Unis aux entreprises sur leur sol et à agiter la menace de poursuites à l'OMC.

L'Allemagne, qui abrite les géants de l'automobile Volkswagen, BMW et Mercedes, est elle aussi préoccupée par les crédits d'impôt prévus par les États-Unis pour son marché national de véhicules électriques. Son ministre de l'Economie, Robert Habeck, a déjà appelé aussi à une « réponse forte » de l'Union européenne, estimant que « l'Inflation Reduction Act » mis sur pied par Joe Biden « ne doit pas détruire les règles du jeu équitables entre nos deux économies ». De son côté, le chancelier allemand Olaf Scholz a, lui, parlé du risque d'une « énorme guerre tarifaire ».

Risque d'une nouvelle guerre commerciale

La guerre commerciale n'est pas une nouveauté dans les relations entre les Etats-Unis et l'Union européenne, qui ont eu à régler ces dernières années plusieurs différends. Parmi eux, le face-à-face entre le géant européen de l'aéronautique Airbus et l'américain Boeing, sur fond là aussi de subventions, et l'imposition de tarifs douaniers additionnels par l'administration Trump sur l'acier et l'aluminium.

Avec ce plan, « un choc de compétitivité négatif pour l'Europe », les Etats-Unis « sont en train de basculer du mauvais côté » du protectionnisme, en privilégiant l'aide à l'achat de véhicules fabriqués localement, a regretté mercredi le ministre de l'Industrie Roland Lescure, à l'occasion d'une conférence organisée par Business France à Paris, disant craindre « un repli sur soi généralisé ».

« On va répondre à l'IRA » à l'échelle européenne a par ailleurs promis le ministre, rappelant que, face à la stratégie américaine « il ne faut pas être naïf » et que plusieurs options sont sur la table. Parmi ces options : la menace de saisir l'Organisation mondiale du commerce (OMC), ce qui risque de déclencher une nouvelle commerciale entre l'Union européenne et les Etats-Unis, ou encore la possibilité de recourir à des mesures protectionnistes, comme le font les Américains.

(Avec AFP)

Commentaires 10
à écrit le 19/11/2022 à 9:58
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Peut-être faut-il se remettre au travail en France? faire des mascottes Françaises par des Français?

le 20/11/2022 à 9:00
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Souvenir : Ils étaient entre 15 000 et 30 000 à manifester, samedi 2 novembre, pour l'emploi en Bretagne et contre l'écotaxe. Tous, pratiquement, portaient des bonnets rouges. Ils avaient décidé de remettre au goût du jour ce symbole de la révolut...

à écrit le 19/11/2022 à 4:41
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les usa ne respectent plus l'omc depuis un certain temps. L'affaire huawei a elle seule est suffisante. Mais l'Europe est désormais concernée. C'était facile de tapper sur la Chine (alors que malgré qu'elle ne soit pas blanche, fut moins épinglée...

à écrit le 19/11/2022 à 4:35
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les usa ne respectent plus l'omc depuis un certain temps. L'affaire huawei a elle seule est suffisante. Mais l'Europe est désormais concernée. C'était facile de tapper sur la Chine (alors que malgré qu'elle ne soit pas blanche, fut moins épinglée...

à écrit le 18/11/2022 à 23:21
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ça fait du bien d'être cité par le président lui même : "Le président français, Emmanuel Macron, qui a appelé à un « réveil européen »" Arrêtons de vanter les firmes américaines et mettons en avant les notres car les américains ne feront pas dans la...

le 19/11/2022 à 4:40
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nokia : démantelée par usa (via un transfuge finlandais de microsoft) pour ne pas gener android. ce qui l'en reste est fait en Chine (en téléphonie). C'est une coquille vide. Les réseaux c'est autre chose. Megane : batterie chinoise ou coréenne. Do...

le 19/11/2022 à 20:11
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Comme vous êtes drôle. Ça fait quarante ans que la France brade année après année ses bijoux de famille, démentelle ses industries, à un retard catastrophique dans le domaine du numérique sans compter que le domaine de la recherche n'est plus qu'une ...

à écrit le 18/11/2022 à 20:15
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Tiens-donc, nos gnomes réalisent en 2022 que l'Union européenne n'est pas une zone monétaire optimale (ZMO) selon les critères de l'économiste canadien Robert Mundell - à contrario des États-Unis. Et bien, il en aura fallu du temps! Mais le plus drô...

à écrit le 18/11/2022 à 18:44
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Il reste à l'Europe l'option passerelles Nord/Sud avant l'arrivée en force des pays du brigs et de la Turquie qui ont investi l'espace africain. A titre de rappel ,celui qui tient l'Afrique tient le monde !

à écrit le 18/11/2022 à 18:37
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Vraiment, les Américains n'en non rien à faire du vieux continent des fromages qui puent. Seule l'innovation européenne les intéresse, pour garder le leadership technologique mondiale. Il y a captation des sociétés innovantes européennes régulièremen...

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